Comme chacun sait, le parti présidentiel n’a jamais tout à fait marché du même pas discipliné que ces légions romaines, jadis parties à l’assaut du vaste monde.
Récapitulatif de ces derniers jours.
Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, imagine malin de traiter Marine Le Pen de « molle » quant aux questions de l’islamisme de combat. Puis Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, déclare la guerre à « l’islamo-gauchisme » dans le monde universitaire. À première vue, voilà qui paraît bien vu. Seulement voilà, ces deux-là l’ont plutôt basse, la vue.
Car ce faisant, Gérald Darmanin donne à la présidente du Rassemblement national une sorte de brevet « républicain », ce qui n’était peut-être pas le but initial du débat du 11 février dernier, surtout à un an de la prochaine élection présidentielle. Quant à Frédérique Vidal, elle se prend les pieds dans le tapis en confondant des « décoloniaux » bien réels et plus qu’envahissants dans le monde universitaire et un « islamo-gauchisme », mot-valise tout aussi vaseux que « l’hitléro-trotskisme » cher aux communistes staliniens d’antan. La preuve en est qu’elle est sévèrement recadrée en ces colonnes par Christophe Bourseiller, éminent spécialiste des radicalités politiques françaises.
Cité par Le Parisien de ce jeudi 25 février, un conseiller élyséen déplore ainsi : « Au moment où on essayait de sortir du sanitaire pour remettre d’autres sujets en avant, on replonge dans la machine à couacs. » Et le même de conclure sur ce cri du cœur : « On a quand même une sacrée faculté à se prendre nous-mêmes les pieds dans le tapis… » Car, ensuite, survient l’affaire des « menus sans viande » dans les cantines lyonnaises, l’occasion pour Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, et Julien Denormandie, celui de l’Agriculture, de s’empailler en public.
Là, le brave Roland Lescure, député LREM du XIe arrondissement parisien, se signale par cette déclaration immortelle : « Moins nous alimentons les polémiques autoportées, mieux nous nous portons. » Et ta sœur, elle est autoportée ? serions-nous tentés d’ajouter, pour ne pas déchoir dans un débat de si haute tenue…
En bonne logique, ce serait donc au Premier ministre Jean Castex de remettre un semblant d’ordre dans ce boutre en perdition. Mais comme il est, depuis sa nomination à Matignon, réduit au seul rôle de porte-parole des bulletins de santé, non point de ceux du Président mais de la nation, on imagine qu’il n’est plus qu’un « collaborateur » comme les autres. Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy n’auraient pas mieux dit ; c’est dire le niveau.
Après, il y a ceux qui voient dans cette cacophonie une sorte de vision à long terme. Philippe Moreau-Chevrolet, communicant politique, toujours cité par Le Parisien : « La question qu’on peut se poser, c’est quelle est la part du couac, quelle est la part de la stratégie. » L’espoir fait vivre, comme chacun sait, et la pensée magique a encore ses adeptes, car la part des « couacs », on voit ; celle de la « stratégie », un peu moins.
Pourtant, et ce, toujours à propos de « polémiques autoportées », force est de noter que l’exemple vient de haut, soit du château. Ainsi, quel frelon asiatique a-t-il pu piquer Emmanuel Macron pour confier la communication élyséenne sur le (ou la) Covid-19 aux youtubeurs McFly et Carlito, auteurs d’un clip sur les « gestes barrières » ? Déjà, d’un point de vue musical, on constate qu’à côté, Vianney, c’est au moins David Bowie. Ensuite, on voit bien quelles sont ces arrière-pensées gouvernementales consistant à se faire entendre de jeunes qui ne votent pas ou plus, grâce aux réseaux sociaux, et à séduire les influenceurs et influenceuses pour, justement, influer sur le scrutin de 2022.
Seul petit problème : les derniers jeunes à encore voter le font plus souvent pour Marine Le Pen que le Président de fait. De là à imaginer que cette stratégie de racolage jeuniste est, elle aussi, passablement « autoportée »…
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