Si l’on admet que l’objectif principal d’Emmanuel Macron est de se faire réélire en 2022, on comprend mieux sa stratégie, dans bien des domaines.
Voyez les élections régionales, prévues pour les 13 et 20 juin, qui constituent un préambule aux présidentielles. À défaut d’emporter des régions, il s’agit pour lui de faire bonne figure et pouvoir prétendre, quoi qu’il arrive, se trouver dans le camp des gagnants en laissant ses troupes pratiquer des alliances, à droite ou à gauche, en fonction des situations locales.
Le parti LREM ne manque pas, pour une fois, de lucidité. S’il se lance dans la compétition sous ses propres couleurs, la victoire est incertaine, la défaite quasi assurée. Lesté par l’impopularité du gouvernement, où certains ministres atteignent des records d’impéritie, faute de candidats suffisamment solides et crédibles, il pense avoir trouvé la panacée : donner, dans plusieurs régions, les têtes de listes à des partenaires de la majorité. MoDem, Agir, Territoires de progrès, ex-PS et ex-LR seraient mis au premier plan dans l’espoir que, moins impopulaires que les macronistes pur-sang, ils puissent au moins sauver les apparences. S’ils perdent, on pourra toujours dégager sa responsabilité.
À défaut de faire affaire dès le premier tour, il faudra choisir des alliances au second. On commence donc à préparer la tambouille électorale : un coup de cuiller à gauche, un coup à droite. La recette finale dépendra des résultats, au soir du 13 juin. On n’est pas trop regardant, on se vendra au plus offrant, à charge de revanche.
Il est d’ores et déjà acquis que les marcheurs pourraient soutenir Renaud Muselier en PACA, pour faire obstacle au Rassemblement national. De quoi ravir l’intéressé, qui peut affirmer, dans Nice-Matin, qu’il « ne souhaite aucun accord d’appareil ou de parti avant le premier tour ». Mais dans d’autres régions, la situation est plus complexe. Ainsi, selon le journal L’Opinion, un cadre de la majorité aurait déclaré « attendre le résultat du premier tour [en Nouvelle-Aquitaine] pour comprendre le second », ajoutant sans vergogne aucune : « Nous pourrions nous rapprocher autant d’Alain Rousset (PS) que de Nicolas Florian (LR). » Il est vrai que ce dernier s’était acoquiné au candidat LREM pour les municipales, ce qui ne l’a pas empêché de perdre la partie.
Sans doute présentera-t-on ces tripatouillages électoraux comme de savants calculs pour défendre l’intérêt des Français. Mais ils ne feront que discréditer encore plus les politiciens qui prétendent nous gouverner et, ce qui est sans doute plus grave, la démocratie elle-même, qui ne se montrera pas à son avantage. Ces manœuvres révèlent surtout la faiblesse du parti majoritaire qui, sauf exception, n’a pas su s’implanter en dehors des grandes métropoles. Elles permettront aussi, en fonction de leur réponse à ces appels du pied, de mesurer le degré de conviction ou d’opportunisme des oppositions PS ou LR.
Nul doute que ces tractations susciteront des remous dans ces deux familles politiques qui, depuis 2017, se sont divisées en Macron-compatibles et opposants déterminés. Il serait plus naturel et conforme au souhait d’une majorité de leurs électeurs que, pour ces régionales et les présidentielles à venir, des Républicains composent avec le Rassemblement national pour œuvrer ensemble au redressement de la France. Mais rien qu’à cette idée, le poil de leurs caciques se hérisse. Cette alliance salutaire n’est pas gagnée d’avance.
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