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mercredi 2 avril 2014

Trois leçons pour accueillir Manuel Valls.

Rédigé par Denis Sureau le dans Société

Trois leçons pour accueillir Manuel Valls
 
L’annonce de la nomination de Manuel Valls à Matignon est tombée le jour même où l’Insee publiait les derniers chiffres – catastrophiques – de l’économie française.

Une dette publique abyssale : 1925 milliards d’euros, soit une augmentation de 85 milliards en un an et 93,5 % du PIB !
Un taux de prélèvements obligatoires de 46 %.
 Un recul de l’investissement des entreprises.
 Et le lendemain 1er avril, souvent plus drôle, entrait en vigueur une nouvelle baisse des allocations familiales.

Du local au national

Jamais autant des élections locales n’auront eu une signification autant nationale.
 Les journalistes ont rivalisé en termes sonnants pour exprimer la déroute historique de la gauche aux élections municipales : gifle, raclée, hécatombe, cataclysme…
 Le PS ne gère plus que 38 % des communes au lieu de 55 % et a perdu plus de 150 villes de plus de 9000 habitants, dont des bastions historiques.
 Il ne se maintient que dans les plus grandes villes (Paris, Lyon, Lille, Nantes, Rennes…) dont les centres ont été vidés des familles modestes.
Quant aux communistes, ils sont successivement chassés de leurs places fortes (comme Bobigny et Villejuif) ; il était temps…
La victoire de l’Ump n’est que la conséquence mécanique de ce recul, selon le mécanisme de balancier habituel.
 Plusieurs leçons peuvent être tirées de ce scrutin.

Trois leçons

Le désespoir des pauvres.
 L’abstention, en progression constante depuis trente ans, relativise toutes les autres données.
 Son ampleur n’a jamais été aussi grande (38 % au premier tour, 36,3 % au second).
 Plus du tiers des Français boudent les urnes, manifestant une profonde désespérance.
 La République même communale est minée de l’intérieur.
Ce ne sont pas les seuls électeurs de gauche qui ont refusé de voter : selon un sondage OpinionWay/Le Figaro, 58 % des 18-24 ans, 53 % des 25-34 ans et 60 % des personnes disposant d’un revenu inférieur à mille euros ont fait la grève des isoloirs.
Des jeunes, des pauvres.
Sans illusions face au système politicien, y compris à sa base.
 Désemparés dans le maelstrom de la mondialisation libérale qui délocalise et détruit nos emplois.
 Écœurés par la démagogie, les promesses non tenues.
Toujours plus de chômage, toujours plus d’impôts.
 La gauche bourgeoise-bohême les a abandonnés.
Autiste, elle se replie sur ses beaux quartiers.
Il semble même que l’électorat musulman, hostile aux réformes sociétales, commence à s’en détacher.
 
Le recours au Front national.
La « vague bleu Marine » est en grande partie une autre réponse au désarroi du peuple de France et au rejet de l’oligarchie : puisque les autres ont menti et triché, puisque le chômage et la misère explosent, pourquoi ne pas accorder sa voix à d’autres candidats, extérieurs à cette crise ?
 L’enracinement du FN est marqué sur deux grands territoires : le Nord ouvrier de gauche – l’élection du syndicaliste Cgt à Hayange est emblématique puisqu’il se déclare toujours de gauche –, et la Provence de droite.
Il n’est d’ailleurs pas sérieux de présenter le mouvement de Marine Le Pen comme un parti d’extrême droite car il bouleverse les clivages habituels, tant par son électorat que d’ailleurs son programme (dont l’étatisme jacobin ressemble en partie à celui de Jean-Luc Mélenchon).
Tout laisse à penser qu’il réalisera un beau score lors des élections européennes.
 
Un prolongement de la Manif pour tous.
Le pouvoir socialiste n’a pas compris que l’ampleur des manifestations contre le mariage homo était le symptôme d’un mouvement au plus profond de la société française.
 Et il n’est pas certain que l’Ump et l’Udi l’aient davantage compris. On ne s’attaque pas à la famille impunément.
 Selon un sondage Harris-Interactive pour La Croix (25/3), réalisé au soir du premier tour des élections municipales, la position des candidats sur le mariage ouvert aux homosexuels a joué un rôle important ou très important dans leur choix pour 37 % des Français.
 Un pourcentage considérable dans le contexte d’élections locales, où les débats portent davantage sur la gestion ou l’urbanisme que de questions « sociétales » aussi vastes.
 Le journaliste Jean-Marie Guénois (Le Figaro, 25/3) repère ici :
« une tendance lourde : le conflit ouvert par la gauche sur le ''mariage pour tous'' a laissé une trace durable dans l’opinion, au point de devenir, pour certains, un élément de choix politique. »

Valls ou l'absence de solution

Dans ce contexte, l’arrivée de Manuel Valls n’apporte aucune solution crédible.
 Et nous ne pouvons accorder aucune sympathie à celui qui, premier « flic » de France, a réprimé brutalement et gazé des manifestants pacifiques et menti grossièrement sur l’ampleur des mobilisations.

Nous devons cependant prier pour la conversion de celui qui, jeune catholique fervent, aurait envisagé de devenir prêtre (Selon sa sœur : cf. Jacques Hennen et Gilles Verdez, Manuel Valls, les secrets d’un destin (Ed. du Moment, 2013).).

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