Le 22/09/2017
Javier Portella
Toute l’équipe chargée de l’infrastructure pour le référendum du 1er octobre se trouve désormais sous les verrous.
Ils ont tardé, ils se sont fait prier, ils l’ont fait avec plein d’égards et d’atermoiements, mais le gouvernement Rajoy a enfin agi.
Le 20 septembre, une vingtaine de hauts dirigeants du gouvernement catalan ayant proclamé le coup d’État sécessionniste (appelons un chat un chat) ont été arrêtés et leurs locaux perquisitionnés.
Les auteurs premiers du délit de sédition – le président et les membres du gouvernement de la Generalitat – courent toujours les rues, certes, mais toute l’équipe chargée de l’infrastructure pour le référendum du 1er octobre se trouve désormais sous les verrous.
Dix millions de bulletins de vote ont aussi été saisis dans des imprimeries, ainsi qu’une énorme quantité d’imprimés de toute sorte prêts à être employés.
Les propriétaires de ces imprimeries, eux aussi arrêtés, pourront attendre assis le paiement des factures…
Un paiement qui devrait être fait par Madrid, le ministère des Finances ayant pris en charge le versement direct de tous les salaires et factures de la Generalitat, au lieu de continuer à lui allouer tous les mois les 1,4 milliard d’euros nécessaires au fonctionnement d’une administration tombée en faillite.
La logistique essentielle du référendum ayant ainsi été démantelée, celui-ci ne pourra plus être célébré, quitte à organiser une pantalonnade limitée à quelques noyaux épars de la population.
La logistique essentielle du référendum ayant ainsi été démantelée, celui-ci ne pourra plus être célébré, quitte à organiser une pantalonnade limitée à quelques noyaux épars de la population.
Cette bataille aura donc été gagnée, mais la guerre…
La guerre est tout simplement perdue depuis le début, depuis l’avènement d’une démocratie incapable d’offrir un quelconque projet substantiel à une Espagne qui, engluée dans une perte complète de repères, n’a été capable de s’accrocher qu’aux pires déliquescences de la modernité : l’argent et le divertissement, auxquels se sont ajoutées la honte et la repentance pour les longues années – non seulement celles du franquisme – où l’Espagne fut grande (ou essaya de l’être), lorsqu’elle avait un projet – un destin – à accomplir.
Elle n’en a plus.
La guerre est tout simplement perdue depuis le début, depuis l’avènement d’une démocratie incapable d’offrir un quelconque projet substantiel à une Espagne qui, engluée dans une perte complète de repères, n’a été capable de s’accrocher qu’aux pires déliquescences de la modernité : l’argent et le divertissement, auxquels se sont ajoutées la honte et la repentance pour les longues années – non seulement celles du franquisme – où l’Espagne fut grande (ou essaya de l’être), lorsqu’elle avait un projet – un destin – à accomplir.
Elle n’en a plus.
Et c’est bien pourquoi l’idée même de peuple, de communauté, d’identité collective et historique s’est estompée chez nous à un degré qui dépasse de loin celui qu’on connaît partout ailleurs en Europe.
Or, c’est bien là que le grand paradoxe espagnol éclate.
Si l’ensemble des Espagnols n’ont plus de repères collectifs, si la patrie ne veut plus rien dire pour eux, s’ils sont les premiers à laisser tomber dans l’indifférence ou à se moquer même de son drapeau, de ses symboles, de son histoire, il n’en va absolument pas de même pour les Catalans (pour les Basques non plus).
Devant le néant qui engloutit le monde, ils s’accrochent, eux, à des repères, ils ont un grand projet, un destin, ils croient à la patrie, aux racines historiques sans lesquelles il n’y aurait ni monde ni hommes.
Le drame est qu’ils se trompent tout simplement de destin et de patrie !
Le drame est qu’ils se trompent tout simplement de destin et de patrie !
La seule qu’ils connaissent est celle de leurs spécificités régionales : absolument légitimes, absolument intégrables et intégrées dans l’ensemble espagnol, et absolument reconnues – jusqu’à la démesure – par le régime actuel.
La cécité (la poltronnerie aussi) de celui-ci leur a pendant quarante ans donné tous les ressorts par lesquels un pouvoir et ses élites mènent les foules : l’argent, l’enseignement, la télévision, la police (c’est la Guardia Civil espagnole qui a dû effectuer hier le sale boulot devant la passivité de la police autonome).
Mais ça ne leur suffit pas.
Ce qu’ils veulent, c’est l’indépendance, la séparation complètes, menant à la création d’un nouveau mini État-nation.
Voilà donc un deuxième paradoxe.
Voilà donc un deuxième paradoxe.
Car ce que ces curieux identitaires poursuivent, c’est la rupture… avec leur identité elle-même, avec leurs racines, avec leur histoire !
Bien plus important que tout cela (je l’expliquais déjà dans un article précédent) est finalement, pour eux, le « principe démocratique dernier », le principe individualiste ou nihiliste : le fait de suivre leur bon (ou mauvais) vouloir – le monde, leur pays y compris, dût-il en périr.
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