Il y a un an, Emmanuel Macron, avec cette autosatisfaction gênante qu'on lui connaît, se rendait sur le Champ-de-Mars pour fêter sa victoire.
58 % face à Hitler, il n'y avait pas de quoi pavoiser, mais lui, il voyait ça autrement.
Devant une mer de cheveux blancs et une meute de petits bobos, le chef de l'État réélu s'avançait sur l'« Ode à la joie », peut-être en guise de clin d'œil à ses ambitions futures. Un discours lénifiant au cours duquel il faisait montre de fausse humilité et disait vouloir rassembler. Quand il dit quelque chose, vous pouvez être sûr qu'il va faire le contraire - et on peut dire que, cette fois-ci encore, il n'a pas déçu.
Un an plus tard, Macron est entré dans l'âge mûr. Celui qui, selon une formule de Desproges, précède l'âge pourri : une impression de fin de règne, crépusculaire, lamentable, bas de gamme, s'est emparée des spectateurs de la Macronie en déroute. Violence de la réforme, violence des manifestants, violences policières, violence parlementaire : le Président de l'apaisement sème la déroute et l'excès, attise la colère et la haine. On a vu meilleur rassembleur ; mais, encore une fois, il fallait s'y attendre. Ça ne change pas, un homme, un homme, ça vieillit, chantait Johnny Hallyday. Même si Macron est encore jeune, il n'échappe pas à la règle. Qui aurait pu croire qu'il serait devenu « sympa », qu'il aurait commencé une carrière de vrai chef d'État à son deuxième mandat ? Beaucoup trop de Français, apparemment, y ont cru, castors éternels, cocus de l'Histoire qui se sont laissés abuser par les injonctions médiatiques.
« personne ne rentre dans la bulle »
— Alexis Poulin (@Poulin2012) April 25, 2023
Parfaite illustration de la déconnexion macroniste avec le réel.
Une bulle, prête à exploser à la moindre brise.
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Les images misérables de Pap Ndiaye bloqué en gare de Lyon par un concert de casseroles, puis entouré de gardes du corps qui disent métaphoriquement « personne n'entre dans la bulle », sont le énième signal de la décrépitude de ce ramassis d'ambitieux hors-sol, qui s'appela hier « En marche », s'appelle aujourd'hui « Renaissance », mais dont le nom, au fond, importe peu.
On comprend bien ce que recouvrent ces noms flous, interchangeables : une élite aveugle et sourde, qui fonce dans le mur pied au plancher sous les injonctions de l'Union européenne, des fonds de pension et des cabinets de conseil.
Alors, pour aller au peuple, il n'y a plus beaucoup de solutions : il y a la gesticulation et le ridicule. Incapable de sortir de l'« en même temps », Macron a choisi les deux. Alors, ses ministres se lancent dans une sorte d'« Intervilles » pitoyable, une tournée de province approximative, à laquelle ils ne sont - ça crève les yeux - pas habitués. Les hôtels petit format, les parkings de zone commerciale, les restos faussement créatifs, les gens en parka aux yeux baissés, les petites voitures blanches ou grises, les mères célibataires qui poussent des Caddie™, les cités perdues de la diagonale du vide : ils ne savent pas ce qu'est la France, la vraie.On nous transmet ces images qui résument la journée : un Intervilles Macron au niveau national pic.twitter.com/J1MXj8d3FE
— Intervilles Macron (@Interville2023) April 24, 2023
À ce sujet — Macron : un an déjà et ça ne passe pas
Comme dans une version politique du drôle et triste Tandem de Patrice Leconte, nos ministres sillonnent la France pour donner l'impression du courage physique et de la proximité affective, deux choses que, pourtant, il est impossible de simuler. Sur BFM TV, une pathétique carte de France montrait, le 24 avril, où les membres du gouvernement se déplaçaient. Leurs visages de losers anonymes, joints aux noms de Valençay, Lons-le-Saunier ou Montceau-les-Mines, donnent à la fois le sourire et la nausée. Le sourire : on a l'impression de voir une tournée de chanteurs d'autrefois (« Âge tendre et tête de bois ») ou de commerciaux ringards (avec la quinzaine des fromages à Valençay, puis les huit jours fantastiques à Lons-le-Saunier, puis une vente flash avec 30 % sur les outils de jardin à Montceau-les-Mines). La nausée : on ne peut pas sillonner en voiture officielle un pays que l'on méprise, pour serrer deux ou trois mains et « faire de la pédagogie », « expliquer sans relâche ». Les Français n'ont pas besoin qu'on leur explique : ils ont bien compris où menait ce second quinquennat. Ils le voient sur leur fiche de paie, ils le voient dans les rues et dans la rubrique faits divers, ils le constatent dans la tiers-mondisation de leur vie quotidienne. La pédagogie méprisante de ces petits ministraillons insupportables, il n'en veulent plus.
Âge mûr et têtes de cons : bon courage au bus qui assurera cette grotesque tournée. On attend, avec gourmandise, la liste des salles polyvalentes ou des amphis de zone industrielle dans lesquels vont se rendre ceux qui sont censés faire le bien du pays et que, désormais, tout le monde déteste. Ça ne suffira pas, mais on aura bien rigolé. C'est au moins ça, pas vrai ?
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