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vendredi 9 avril 2021

Les cinq ans de LREM : anniversaire ou enterrement ?


 

C’est en toute discrétion – et pas dans un clandestin, à en croire nos informations ! – que LREM a fêté son cinquième anniversaire. 

À l’origine, il ne s’agit pas véritablement d’un parti politique comme les autres, mais plutôt d’une sorte de plate-forme participative, façon nouveau monde. 

Paradoxalement, le but est avant tout de porter Emmanuel Macron au pouvoir, à l’instar du RPR pour Jacques Chirac et du PS pour François Mitterrand. Comme quoi, du vieux au nouveau monde, il n’y a qu’un pas ; alors allègrement franchi.

L’actuel Président est lui aussi à la lisière de ces deux univers : malgré son jeune âge, il a été formé à l’ancienne, son passé de banquier n’étant pas sans évoquer celui de . Pourtant, ces marcheurs ne jurent que par la « start-up nation », passant en frais généraux une France plus que millénaire, tandis que leur chef de file assure que « la culture française n’existe pas ». Mais, « en même temps », LREM prospère grâce au soutien de chevaux plus ou moins de retour, tels Gérard Collomb, Jean-Yves Le Drian ou Édouard Philippe.

À LREM, le ver est donc dans le fruit et la contradiction originelle. Cité par Le Point du 7 avril, Pierre Person, ancienne tendre pousse du Parti socialiste, fondateur en 2015 du mouvement Les Jeunes avec Macron, avant de démissionner de LREM en 2020, déplore aujourd’hui : « Personne n’a voulu donner de corps à LREM et c’était volontaire. Les présidents Castaner et Guerini ont toujours fait en sorte que LREM n’ait qu’un rôle subsidiaire et d’accompagnateur de la politique du gouvernement. » Pis : « La promesse originelle de la participation citoyenne à l’action politique n’a jamais été tenue. » Une telle naïveté est touchante. Il est vrai qu’on n’enseigne pas tout dans nos grandes écoles.

Pour tout arranger, l’actualité se charge de bousculer ce bel agenda, entre gilets jaunes, attentats islamistes et pandémie planétaire : c’est ainsi qu’on apprend que l’Histoire est tragique par nature et qu’un conseil d’administration ne saurait tenir lieu de gouvernement. Et le même Pierre Person de constater : « La véritable difficulté d’Emmanuel Macron, puisqu’il est sortant, est de réengendrer un autre rêve, un projet de . Il ne pourra se représenter seul en disant “j’ai changé”, en détricotant ce qu’il a fait en cinq ans. »

Au fait, un président de la République est-il forcément élu pour faire « rêver » ? Surtout quand les événements obligent à revenir aux fondamentaux de la Ve République, avec puissance étatique et souverainisme à tous les étages, obligeant à promettre aux électeurs le retour aux fondamentaux d’antan… À ce dilemme, Édouard Philippe, ancien de Matignon, jamais encarté à LREM et rejeton spirituel d’, répond, en forme d’aveu et de vœux d’anniversaire : « Il y a une forme de viscosité du réel, de résistance du réel à transformer la vie telle qu’on aimerait pouvoir le faire, qui est parfois lassante, parfois difficile et qui parfois peut, au fond, conduire à une forme de découragement, à une forme de lassitude, peut-être même à une forme d’amertume. »

Que tout cela est bien formulé et résume l’actuel désenchantement de crédules finissant par comprendre qu’il peut être vain de vouloir tordre ce même « réel » au seul gré de souhaits du moment et de caprices d’enfants. Ce qui aboutit à cette impasse : changer , on ne sait ; et le sauvegarder tel qu’il est, on ne peut.

Moins philosophe, Jean Castex affirme sans rire, sortant du gâteau d’anniversaire, telle une danseuse courte vêtue dans les aventures de Lucky Luke : « Si la France a tenu, si la France tient, c’est d’abord grâce aux décisions du président de la République et au gouvernement. » Dans le registre du lèche-bottes, nous tenons décidément champion.

Pour conclure, tandis que les hordes progressistes se déchirent pour savoir à quelle sauce accommoder ce que sera le monde de demain, d’autres, au premier chef, tentent de raccommoder ce qu’il est encore possible de sauver de celui d’hier. Et ça, c’est un défi autrement plus politique.

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