Elle passe de main en main. Comme il se doit, dans le respect des gestes barrières.
Je veux parler de la patate chaude des élections régionales et départementales.
Le compte à rebours est parti, puisque nous sommes à deux mois, pile poil, de l’échéance (le premier tour doit avoir lieu le 13 juin), et l’on ne sait toujours pas, finalement, si on votera. Pour l’instant, oui, puisque c’est la loi. Une loi votée tout récemment : le 22 février dernier.
Mais voilà : vendredi 9 avril, les maires ont reçu un message du préfet les enjoignant de se prononcer sur la faisabilité de ces élections dans leur commune. On ne leur demande pas un rapport avec de longues explications, justifications, attendus, considérants et autres circonlocutions. C’est pas pour eux, ça. Non, répondez par « oui » ou par « non », point barre. Et pour lundi 10 heures, « délai de rigueur », s’il vous plaît. Bienheureux les maires qui « ont fait l’armée », cela doit leur rappeler de bons souvenirs. En plein week-end, fallait le faire, tout de même !
Pourtant, si on lit le rapport que le gouvernement a rendu au Parlement, le 1er avril, sur les risques sanitaires à prendre en compte en vue des élections départementales et régionales, on lit ceci : « Le Gouvernement relève que le comité de scientifiques ne recommande pas de manière claire et explicite un report des élections convoquées les 13 et 20 juin. À ce stade, c’est donc le scénario du maintien des élections aux dates prévues qui est privilégié par le Gouvernement. » Et donc, une semaine après avoir privilégié le « scénario du maintien », le gouvernement se renseigne auprès des acteurs pour savoir si le scénario est jouable. Des fois que…
Il se renseigne auprès des maires en leur demandant si « les conditions préconisées par le Comité scientifique […] semblent réunies pour tenir les deux scrutins prévus en juin prochain ».Bien entendu, on leur balance le fameux rapport du Comité scientifique daté du 29 mars. Seize pages de jus de boudin bien serré dont la conclusion vaut son pesant de cacahuètes (toujours aller à la conclusion pour être fixé sur la teneur d’un document !). Et là, effectivement, on est fixé : neuf lignes, dont six pour rappeler que le Comité scientifique devait rendre un rapport et trois pour dire qu’il a bien rendu son rapport ! J’exagère à peine. Merci pour la patate chaude. Patate chaude que le gouvernement refile maintenant aux maires.
Question, à tout hasard : si les élections se tiennent comme prévu en juin, que des foyers de contagion se développent à l’issue de ce scrutin dans telle ou telle commune, ira-t-on chercher ce que les maires concernés ont répondu ce 12 avril 2021, « délai de rigueur » ? On peut s’attendre à tout, dans un pays qui judiciarise tout. Paraît que des ministres pensent aussi aux suites pénales de leur décision. On a toujours besoin d’un plus petit que soi, c’est bien connu…
Néanmoins, comment ne pas s’interroger sur la santé de notre démocratie, mise sur le flanc par un virus. À toutes fins utiles, on a voté, en Roumanie, le 6 décembre 2020. Certes, avec un taux de participation de moins de 32 %. On a voté au Portugal, le 24 janvier dernier, pour élire le président de la République. Certes, avec un taux de participation de 39,45 %. On a voté en Espagne, plus précisément en Catalogne, pour élire le Parlement régional, le 14 février. 53,54 % de participation. On a voté en Allemagne, plus précisément au Bade-Wurtemberg et en Rhénanie-Palatinat, le 14 mars. 63,8 % et 64,4 % de participation. On a voté aux Pays-Bas, pour les législatives, du 15 au 17 mars. Participation : 88,6 % !
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