L’Absurdistan n’a pas de frontières.
Il y a quelques jours, à la veille de la réouverture des commerces dits non essentiels en Belgique, fermés depuis le 30 octobre, le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, a avoué : « Faire du shopping ne comporte pas de risques quand tout est bien contrôlé. »
Il explique ensuite avoir pris cette décision de fermeture le 30 octobre dernier « parce qu’à un moment donné, on devait prendre une décision choc. Il fallait vraiment faire un électrochoc. Il fallait dire clairement “On bloque”. » Saint Jean Bouche d’or d’outre-Quiévrain, le ministre avoue sans vergogne que la fermeture des commerces non essentiels était bien politique, n’avait aucun fondement sanitaire et visait l’impact psychologique. Pour cet ancien trotskiste, le gouvernement par la peur a ceci de bon qu’il permet de masquer le fait que « le système de santé était sous pression », dixit Bart Somers, vice-ministre président flamand, qui poursuit : « Nous devions intervenir de manière drastique et tout faire pour éviter les contacts. »
Ces déclarations, outre ce qu’elles révèlent d’une navigation « à vue » de la gestion de l’épidémie et d’un cynisme doublé d’incompétence qui tient lieu de méthode, donne aussi l’impression, exactement comme en France, que le gouvernement belge évolue dans un monde parallèle, irrationnel et de plus en plus liberticide. On imagine sans peine le tollé provoqué par ces paroles dans l’opinion publique. Le SNI, Syndicat neutre des indépendants, s’étrangle sur Twitter : « On ne peut pas sacrifier les commerces et risquer des milliers de faillites juste pour obtenir un effet-choc. C’est totalement irresponsable […] On joue ici avec la santé économique d’environ 35.000 entreprises, et leurs familles », tandis que Pierre-Frédéric Nyst, président de l’Union des classes moyennes, cité par RTBF, prévient : « Chaque fois que le ministre Vandenbroucke va prendre une décision, on va se demander si c’est une décision sensée ou si c’est un coup dans l’eau, un coup d’essai. »
Une gaffe stupide pour une « tempête parfaite », plus économique, sociale et politique que sanitaire : communication désastreuse, parole publique qui n’est plus crédible, confinement inutile aux conséquences économiques très lourdes, discours anxiogène, infantilisation de la population, décisions absurdes qui entament durablement le consentement à l’autorité… tout ceci ne vous rappelle rien ?
Mardi dernier, Emmanuel Macron recevait le Premier ministre belge Alexander De Croo : ils ont tenu ensemble une conférence de presse sur leur stratégie commune face à l’épidémie. Le pire était à craindre, et l’on n’a pas été déçu ! En effet, les Belges partant en vacances à l’étranger seront contrôlés à la frontière, « par solidarité européenne » (?) ; de son côté, Emmanuel Macron, piégé par sa décision absurde concernant les stations de sports d’hiver, n’avait plus que le choix de la fuite en avant. Ainsi, les Français qui auraient des velléités d’aller skier en Espagne ou en Suisse seront contrôlés et sanctionnés à leur retour par une quarantaine obligatoire d’une semaine, aussi inutile que vexatoire.
Outre le fait que, concrètement, cette mesure est inapplicable et hautement liberticide, Emmanuel Macron fait passer aux Français le message qu’ils sont contrôlés quand ils quittent le territoire, mais que les frontières restent grandes ouvertes et sans contrôle pour qui veut entrer en France. Bref, open bar pour les clandestins mais punitions pour les quelques horribles Français qui voudraient profiter des remonte-pentes suisses.
Quelques semaines après l’attentat de Nice, commis par un islamiste passé par Lampedusa et entré tranquillement en France, quelques jours avant son passage à l’acte, cette décision parait, en effet, ubuesque et scandaleuse. C’est ce qu’on appelle, et c’est un euphémisme, se tirer une balle dans le pied.
Comme dit le proverbe, Quos vult perdere Jupiter dementat prius (« Ceux que Jupiter veut perdre, il commence par leur ôter la raison »).
Mais à quoi joue donc Jupiter ?
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