Le « en même temps » au sommet de son art : voici le déconfinement confiné ou le confinement déconfiné.
Et l’arroseur arrosé, c’est le
Français qui a voté Emmanuel Macron, croyant voir dans sa devise la
quintessence de l’équilibre et du juste milieu permettant d’éviter le
chaos…
Atteinte à la liberté de culte, atteinte à la liberté de circulation,
atteinte à la propriété (pour ceux qui ont une résidence secondaire),
reprise de l’école oui-mais-non, bars et restaurants fermés, plages et
parcs aussi…
La vérité est que le
11 mai
sera pour tous, sauf pour certains commerçants, une non-date.
Comme le
non-anniversaire d’Alice au pays des merveilles.
Une échéance
artificielle pour donner une ligne d’horizon aux Français dans cette
purée de pois.
À présent que l’on est arrivé au pied du mur, ou presque,
allez hop ! on relance la baballe au chienchien, pour qu’il reparte en
frétillant de la queue : comme le tweete Léa Salamé (en anglais, s’il
vous plaît) :
« Le 2 juin is the new 11 mai. »
Tout cela peut nous emmener à Noël.
Comme toujours depuis le début de cette épidémie, le discours
commence par son couplet de justification : le manque de tests, de
masques et d’anticipation, c’est la faute des experts, des Français, de
pas de bol…
Au passage, petits ricanements amers du Premier ministre à
l’endroit des yakafokon.
Rhétorique classique consistant à excuser son
impuissance par la technique du « on aimerait les y voir ».
Nous aussi,
pour tout dire, on aimerait vachement les y voir.
Qui, « les » ? Soyons
clairs : n’importe qui d’autre.
Pourvu que ceux-ci passent la main.
Édouard Philippe épingle aussi les réseaux sociaux
« colériques » et les commentateurs de
« café du commerce » sur les plateaux télé.
C’est logique. Comme le fait remarquer Ivan Rioufol,
« le parti de l’ordre sanitaire veut aussi des commentateurs désinfectés. Une pensée saine dans un corps sain. »
Et si on pouvait, en sus, leur coller un masque FFP2 sur la bouche bien serré derrière les oreilles en guise de bâillon…
Les messes publiques (sauf enterrements limités à vingt personnes)
restent interdites jusqu’au 2 juin. Car le gouvernement fait l’affront
aux Français de penser qu’ils ne sont qu’un ventre inanimé.
« Et si je célèbre la messe à Intermarché, ça passe ? »
s’interroge ingénument l’abbé Guy-Emmanuel Cariot, curé-recteur de la
basilique d’Argenteuil.
L’Ascension est le 21 mai, la Pentecôte le 31
mai…
Cela s’appelle le sens du calendrier.
Doit-on leur signaler qu’il
restera ensuite l’épineux problème de la Fête-Dieu, sans parler du 15
août…
Allez, reprenons le culte le 26 décembre, c’est plus prudent.
Une
concession, néanmoins, est lâchée : les cimetières ne seront plus
fermés.
Monsieur est trop bon. La bonté de Monsieur le perdra.
Vient enfin la touche finale, la marque de fabrique, car un discours
de notre gouvernement ne serait pas tout à fait authentique s’il ne
comportait son ordre suivi de son contre-ordre débouchant sur le
désordre : le 23 avril, le site de
France Info titrait
« Déconfinement : Emmanuel Macron fait marche arrière sur un plan par région » :
« le président, [écartait] un déconfinement en fonction des régions ».
Le 28 avril, la marche arrière se mue en marche avant avec accélération
sur les chapeaux de roue (notre ami Marc Eynaud appelle cela sur
Twitter
« une décélération disruptive ») : il n’y aura pas de
déconfinement pas région mais par… département.
Bientôt par pâté de
maison ou par cage d’escalier ?
À quand l’autorisation d’Édouard
Philippe pour passer de la cuisine au salon ?
C’est le problème de la
ligne de front quand on n’a pas tenu l’ennemi à longueur de gaffe.
Mais tout est prévu : une gommette verte sur les départements peu
infectés, une rouge sur les autres, et pas de circulation des uns vers
les autres.
Un peu comme un contrôle aux frontières, en somme ?
Et dire,
c’est bête, qu’on n’y a pas du tout pensé au début… entre pays, quand
certains étaient rouges et le nôtre encore vert !
Gabrielle Cluzel
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