Il n’est pas besoin d’attendre le rapport de l’ONU, ni la décision du Congrès des Etats-Unis. Il faut y aller. Tout de suite. En force. En envoyant des hommes au sol. Et par mer et par les airs. La situation géographique le permet. Les crimes n’ont que trop duré. Il faut non seulement « punir » les criminels mais les éradiquer. M. Hollande, la sécurité du peuple est en jeu. Faites-le ! Envoyez nos forces… à Marseille !
Si encore les voyous se contentaient de se tuer entre eux, une balle dans la tête et une dans le cœur, fournissant ainsi une alternative à la surpopulation carcérale avant que d’aller présenter leurs condoléances à la veuve en tenue de deuil…
Mais les temps ont changé. Tout d’abord, les voyous ont changé de calibre.
Avec un fusil d’assaut type AK 47 (et ses dérivés), plus connu sous le nom de son inventeur, Mikhaïl Kalachnikov, qui serait milliardaire s’il avait touché des royalties sur sa fabrication – sous Staline, c’était assez mal vu… –, une balle perdue est vite arrivée.
Le 1er septembre dernier, deux bandes rivales ont une « altercation » devant une boîte de nuit.
Une fille qui aurait regardé un gars de la bande adverse, un gramme de shit vendu en territoire ennemi, peu importe.
L’altercation n’a pas donné lieu à une bagarre, dont seuls les protagonistes risquaient de sortir vaincus. Un gus a fait feu sur un groupe depuis une voiture.
Bilan : trois blessés. Tous concernés peu ou prou par l’embrouille. Un coup de chance. Car la police a relevé 34 impacts de balles : 22 de kalachnikov et 12 de pistolet automatique 9 mm.
Ensuite, la vie d’un homme ne vaut plus rien.
Moins qu’une cartouche de cigarettes ou même qu’un simple paquet, moins qu’un téléphone portable, beaucoup moins bien sûr que le produit d’une seule journée du trafic de stupéfiants. On tire pour ne pas aller en prison – puisqu’on ne risque plus sa tête et que la perpétuité n’existe plus –, on tire parce que c’est un « rite de passage », pour devenir un vrai voyou, respecté, on tire parce qu’on tire. Et quand on ne tire pas, on surine. On plante.
Le diagnostic est correct, pas le remède
A Marseille, on retient le nombre de morts.
Quinze depuis le début de l’année, dont Jérémie Labrousse, égorgé – oui, égorgé ! –, attaqué pour son téléphone portable et déjà oublié. On parle moins de la violence quotidienne.
Elle est devenue banale. On ne parle pas de ce nœud qui serre la gorge, et le ventre, quand il faut sortir et que la nuit est déjà tombée, qu’on ne sait pas qui on va croiser, qu’on se sait pas si on reviendra, ou dans quel état.
Nous exagérons ? Hélas pas.
C’est Jean-Claude Gaudin, maire depuis trois mandats soit depuis dix-huit ans, qui a demandé au ministre de l’Intérieur de classer toute la ville en Zones de sécurité prioritaires (ZSP), suivi par Eugène Caselli, le président socialiste de Marseille Provence Métropole, tous deux envoyés aux pelotes par Manuel Valls.
Est-ce que cela aurait changé quelque chose ? Sans doute pas.
Gaudin et Caselli le savent bien. Valls aussi. Tout cela est un jeu. Morbide.
Chacun dans son rôle, à faire semblant de réclamer, à s’offusquer, à refuser… Plus de la moitié des habitants de Marseille habitent déjà dans des ZSP : 481 000 personnes sur les 860 000 que compte la ville. 184 km2 sont couverts par cette priorité sécuritaire sur une superficie totale de 240 km2.
Quand le ministère de l’Intérieur a annoncé, en novembre 2012, qu’une partie des quartiers Sud serait placée en ZSP – dans un délai d’un an… –, les quartiers Nord l’étant déjà avec les brillants résultats que l’on sait, la place Beauvau s’en était expliquée en livrant ce « diagnostic », selon le terme utilisé par le ministère de la Santé intérieure : « La délinquance des quartiers sud de Marseille est essentiellement caractérisée par le développement de l’économie souterraine, notamment des trafics de stupéfiants.
On y observe également des phénomènes de bandes, qui se traduisent par des occupations agressives de la voie publique et des parties privatives des immeubles et, parfois, des règlements de compte entre bandes rivales. »
Des « opérations coup de poing » pour rien
D’où le remède de la ZSP, un « dispositif ciblé » qui « vise à agir sur des territoires qui présentent une criminalité durablement enracinée ». Le remède donc ? Des flics en plus. Sortis d’on ne sait où.
Pris chez Paul pour être mis chez Mouloud sans doute, puisqu’on ne forme pas des policiers en quelques mois. Surtout que les ZSP reposent « sur la prise en compte des circonstances et des particularismes locaux », nous dit le ministère de l’Intérieur. Comme s’il y avait voyou et voyou. Celui qui mérite la taule et celui qui n’a besoin que d’une remontrance pour rentrer dans le bon chemin.
De temps en temps a lieu une opération « coup de poing » comme ces derniers jours à La Cayolle, une cité des quartiers Sud. Une « opération de très grande ampleur » a dit Manuel Valls.
Qui a permis d’appréhender… trois personnes ! Et de saisir « une petite quantité de cocaïne et cannabis. » Et des pneus non conformes ?
Quand flics, CRS, agents de l’Urssaf déboulent, ils ont le droit de fouiller les parties communes des immeubles. Et comme tout le monde sait qu’ils vont arriver, s’ils trouvent du haschisch, c’est vraiment parce que le mec était tellement fumé qu’il a oublié ce qu’il en avait fait.
Après quoi, ils font le ménage : ils enlèvent les voitures volées ou brûlées tandis que les offices HLM viennent voir ce que les habitants ont détruit et qu’il faut donc rénover !
Sans faire payer personne bien sûr ! Enfin vient la phase sociale : les travailleurs sociaux viennent, sous escorte policière, mettre en œuvre des dispositifs « en terme d’emploi et d’éducation » ! En clair : plus c’est le boxon, plus il y a des chances d’attirer les poulets, plus il y a des tunes à récupérer…
Et puis Jérémie Labrousse, il n’est pas mort dans une ZSP. Il n’était pas complètement fou. Il se contentait d’aller chercher une amie à la gare. Il est mort dans le Ier arrondissement. Là où a eu lieu la fusillade devant la boîte de nuit. Il n’y a pas de ZSP dans le Ier. Il y a juste des voyous qui sortent de la ZSP où ils habitent peut-être pour aller faire leurs petites affaires en ville. Gagner des sous et les dépenser. Faire le mariole avec une plus grosse voiture que celui de la cité d’en face. Ça s’appelle les vases communicants. Les flics sont cantonnés à la ZSP, les voyous vont où ils veulent, quand ils veulent.
Samia Ghali se paie les « intellos-bobos »
A plusieurs reprises, Samia Ghali (ci-contre), socialiste, maire des XIVe et XVe arrondissements (95 000 habitants) et sénatrice, a demandé l’intervention de l’armée. « La vérité, a-t-elle expliqué dans « La Provence », en aout 2012, c’est qu’aujourd’hui le premier employeur des jeunes dans certaines cités, c’est le trafic de stupéfiants.
Si rien ne bouge, on se dirige tout droit vers un système à l’américaine avec des gangs qui se font la guerre sur des territoires où la loi n’a plus court. […] Aujourd’hui, face aux engins de guerre utilisés par les réseaux, il n’y a que l’armée qui puisse intervenir. Pour désarmer les dealers d’abord. Et puis pour bloquer l’accès des quartiers aux clients comme en temps de guerre, avec des barrages. Même si cela doit durer un an ou deux. »
Et pour les branleurs, elle a réclamé la restauration d’une forme de service militaire. Coups de pompes quelque part obligatoires.
Et laïcs, et gratuits. Et à l’électorat du PS parisien, elle a lancé : « Je ne supporte pas ces pseudo-gauchos-intellos-bobos qui vous disent que fumer un chichon ce n’est pas grave. Moi, j’ai grandi dans une cité, je sais ce que c’est que les dégâts de la drogue. »
Manuel Valls lui a répondu que c’était « hors de question ».
La semaine dernière, elle a remis ça. Les gens « en ont assez de la tchatche. Il y a eu un comité interministériel il y a un an. Et rien n’a changé ». « Si on n’a pas assez de policiers, pourquoi ne pas faire appel aux militaires comme on le fait déjà pour assurer la sécurité dans les gares, les aéroports ou les grands boulevards. Il faut trouver une solution. L’armée en est une. »
Même Christophe Barbier, le directeur de « L’Express », réclame que soit menée « une guerre totale » : « Une guerre, ça commence avec l’armée. […] Oui, il faut l’armée. »
Mais il rétropédale aussitôt : « Pas pour tirer dans le tas bien sûr, pas pour canonner, non, il faut l’armée pour être dans les rues […] Il faut l’armée comme dans Vigipirate, pour rassurer d’une côté, et témoigner, regarder, surveiller de l’autre. » Et faire des photos et les envoyer à la famille ?
Au cinquantième voyou au tapis…
Faut-il faire intervenir l’armée ? La Constitution ne le permet pas, explique-t-on au ministère de la Défense, où l’on confond l’« état de siège » (article 36 de la Constitution) et l’« état d’urgence », lequel fut décrété par Jacques Chirac en 2005, lors des « émeutes du ramadan », dans vingt-cinq départements de métropole, dont tous ceux d’Ile-de-France. Il fut décrété, puis voté par les deux assemblées… mais jamais appliqué sérieusement.
Dans une poignée de quartiers, le couvre-feu fut décrété. Dans une poignée seulement, qui ne devaient pas excéder la demi-douzaine. Et surtout, les dispositions véritablement intéressantes ne furent pas utilisées : la possibilité de perquisitionner à toute heure du jour et de la nuit, et sans l’autorisation d’un juge… ; l’interdiction de séjour de toute personne – voire son assignation à résidence – « dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité ou l’ordre public » ; l’application de peines de prison à quiconque refuserait de se soumettre.
Il suffit même d’un petit décret de plus pour que la « juridiction militaire », réputée – à tort ? ce serait l’occasion de le vérifier… – moins encline à la culture de l’excuse, prenne le relais de la justice civile et ait le pouvoir de « se saisir de crimes, ainsi que des délits qui leur sont connexes ».
Pour Riposte laïque, Roger Heurtebise rappelait la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 régissant toujours l’état d’urgence : « L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, des départements d’outre-mer, des collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique. »
On peut penser que l’armée dispose des cartes d’état major de la ville de Marseille. Alors on déboule de partout, on encercle, on perquisitionne. Tout. Des caves aux greniers.
Le moindre appartement. Chez les cailleras réputées telles et chez les autres, ceux de la Corniche, ceux du Prado. On fouille tout. Ça prendra le temps que ça prendra. On fouille et on ratisse. Et on serre. Et on juge. Serré lundi, jugé mardi, envoyé casser des cailloux en Guyane mercredi.
Il y aura de la résistance ? Peut-être, et alors ? Des émeutes, ailleurs, par solidarité ? Peut-être encore, et alors ? Au premier voyou au tapis, les cités s’embraseront. Au dixième, elles auront la haine. Au cinquantième, elles iront gentiment faire dodo. Et elles respecteront la France. Pour longtemps. La schlague avec les faux caïds ça a toujours fonctionné et ça fonctionnera toujours.
Lionel Humbert
http://www.minute-hebdo.fr/tout-minute/actualites/605-oui-a-une-intervention-immediate
Mais les temps ont changé. Tout d’abord, les voyous ont changé de calibre.
Avec un fusil d’assaut type AK 47 (et ses dérivés), plus connu sous le nom de son inventeur, Mikhaïl Kalachnikov, qui serait milliardaire s’il avait touché des royalties sur sa fabrication – sous Staline, c’était assez mal vu… –, une balle perdue est vite arrivée.
Le 1er septembre dernier, deux bandes rivales ont une « altercation » devant une boîte de nuit.
Une fille qui aurait regardé un gars de la bande adverse, un gramme de shit vendu en territoire ennemi, peu importe.
L’altercation n’a pas donné lieu à une bagarre, dont seuls les protagonistes risquaient de sortir vaincus. Un gus a fait feu sur un groupe depuis une voiture.
Bilan : trois blessés. Tous concernés peu ou prou par l’embrouille. Un coup de chance. Car la police a relevé 34 impacts de balles : 22 de kalachnikov et 12 de pistolet automatique 9 mm.
Ensuite, la vie d’un homme ne vaut plus rien.
Moins qu’une cartouche de cigarettes ou même qu’un simple paquet, moins qu’un téléphone portable, beaucoup moins bien sûr que le produit d’une seule journée du trafic de stupéfiants. On tire pour ne pas aller en prison – puisqu’on ne risque plus sa tête et que la perpétuité n’existe plus –, on tire parce que c’est un « rite de passage », pour devenir un vrai voyou, respecté, on tire parce qu’on tire. Et quand on ne tire pas, on surine. On plante.
Le diagnostic est correct, pas le remède
A Marseille, on retient le nombre de morts.
Quinze depuis le début de l’année, dont Jérémie Labrousse, égorgé – oui, égorgé ! –, attaqué pour son téléphone portable et déjà oublié. On parle moins de la violence quotidienne.
Elle est devenue banale. On ne parle pas de ce nœud qui serre la gorge, et le ventre, quand il faut sortir et que la nuit est déjà tombée, qu’on ne sait pas qui on va croiser, qu’on se sait pas si on reviendra, ou dans quel état.
Nous exagérons ? Hélas pas.
C’est Jean-Claude Gaudin, maire depuis trois mandats soit depuis dix-huit ans, qui a demandé au ministre de l’Intérieur de classer toute la ville en Zones de sécurité prioritaires (ZSP), suivi par Eugène Caselli, le président socialiste de Marseille Provence Métropole, tous deux envoyés aux pelotes par Manuel Valls.
Est-ce que cela aurait changé quelque chose ? Sans doute pas.
Gaudin et Caselli le savent bien. Valls aussi. Tout cela est un jeu. Morbide.
Chacun dans son rôle, à faire semblant de réclamer, à s’offusquer, à refuser… Plus de la moitié des habitants de Marseille habitent déjà dans des ZSP : 481 000 personnes sur les 860 000 que compte la ville. 184 km2 sont couverts par cette priorité sécuritaire sur une superficie totale de 240 km2.
Quand le ministère de l’Intérieur a annoncé, en novembre 2012, qu’une partie des quartiers Sud serait placée en ZSP – dans un délai d’un an… –, les quartiers Nord l’étant déjà avec les brillants résultats que l’on sait, la place Beauvau s’en était expliquée en livrant ce « diagnostic », selon le terme utilisé par le ministère de la Santé intérieure : « La délinquance des quartiers sud de Marseille est essentiellement caractérisée par le développement de l’économie souterraine, notamment des trafics de stupéfiants.
On y observe également des phénomènes de bandes, qui se traduisent par des occupations agressives de la voie publique et des parties privatives des immeubles et, parfois, des règlements de compte entre bandes rivales. »
Des « opérations coup de poing » pour rien
D’où le remède de la ZSP, un « dispositif ciblé » qui « vise à agir sur des territoires qui présentent une criminalité durablement enracinée ». Le remède donc ? Des flics en plus. Sortis d’on ne sait où.
Pris chez Paul pour être mis chez Mouloud sans doute, puisqu’on ne forme pas des policiers en quelques mois. Surtout que les ZSP reposent « sur la prise en compte des circonstances et des particularismes locaux », nous dit le ministère de l’Intérieur. Comme s’il y avait voyou et voyou. Celui qui mérite la taule et celui qui n’a besoin que d’une remontrance pour rentrer dans le bon chemin.
De temps en temps a lieu une opération « coup de poing » comme ces derniers jours à La Cayolle, une cité des quartiers Sud. Une « opération de très grande ampleur » a dit Manuel Valls.
Qui a permis d’appréhender… trois personnes ! Et de saisir « une petite quantité de cocaïne et cannabis. » Et des pneus non conformes ?
Quand flics, CRS, agents de l’Urssaf déboulent, ils ont le droit de fouiller les parties communes des immeubles. Et comme tout le monde sait qu’ils vont arriver, s’ils trouvent du haschisch, c’est vraiment parce que le mec était tellement fumé qu’il a oublié ce qu’il en avait fait.
Après quoi, ils font le ménage : ils enlèvent les voitures volées ou brûlées tandis que les offices HLM viennent voir ce que les habitants ont détruit et qu’il faut donc rénover !
Sans faire payer personne bien sûr ! Enfin vient la phase sociale : les travailleurs sociaux viennent, sous escorte policière, mettre en œuvre des dispositifs « en terme d’emploi et d’éducation » ! En clair : plus c’est le boxon, plus il y a des chances d’attirer les poulets, plus il y a des tunes à récupérer…
Et puis Jérémie Labrousse, il n’est pas mort dans une ZSP. Il n’était pas complètement fou. Il se contentait d’aller chercher une amie à la gare. Il est mort dans le Ier arrondissement. Là où a eu lieu la fusillade devant la boîte de nuit. Il n’y a pas de ZSP dans le Ier. Il y a juste des voyous qui sortent de la ZSP où ils habitent peut-être pour aller faire leurs petites affaires en ville. Gagner des sous et les dépenser. Faire le mariole avec une plus grosse voiture que celui de la cité d’en face. Ça s’appelle les vases communicants. Les flics sont cantonnés à la ZSP, les voyous vont où ils veulent, quand ils veulent.
Samia Ghali se paie les « intellos-bobos »
A plusieurs reprises, Samia Ghali (ci-contre), socialiste, maire des XIVe et XVe arrondissements (95 000 habitants) et sénatrice, a demandé l’intervention de l’armée. « La vérité, a-t-elle expliqué dans « La Provence », en aout 2012, c’est qu’aujourd’hui le premier employeur des jeunes dans certaines cités, c’est le trafic de stupéfiants.
Si rien ne bouge, on se dirige tout droit vers un système à l’américaine avec des gangs qui se font la guerre sur des territoires où la loi n’a plus court. […] Aujourd’hui, face aux engins de guerre utilisés par les réseaux, il n’y a que l’armée qui puisse intervenir. Pour désarmer les dealers d’abord. Et puis pour bloquer l’accès des quartiers aux clients comme en temps de guerre, avec des barrages. Même si cela doit durer un an ou deux. »
Et pour les branleurs, elle a réclamé la restauration d’une forme de service militaire. Coups de pompes quelque part obligatoires.
Et laïcs, et gratuits. Et à l’électorat du PS parisien, elle a lancé : « Je ne supporte pas ces pseudo-gauchos-intellos-bobos qui vous disent que fumer un chichon ce n’est pas grave. Moi, j’ai grandi dans une cité, je sais ce que c’est que les dégâts de la drogue. »
Manuel Valls lui a répondu que c’était « hors de question ».
La semaine dernière, elle a remis ça. Les gens « en ont assez de la tchatche. Il y a eu un comité interministériel il y a un an. Et rien n’a changé ». « Si on n’a pas assez de policiers, pourquoi ne pas faire appel aux militaires comme on le fait déjà pour assurer la sécurité dans les gares, les aéroports ou les grands boulevards. Il faut trouver une solution. L’armée en est une. »
Même Christophe Barbier, le directeur de « L’Express », réclame que soit menée « une guerre totale » : « Une guerre, ça commence avec l’armée. […] Oui, il faut l’armée. »
Mais il rétropédale aussitôt : « Pas pour tirer dans le tas bien sûr, pas pour canonner, non, il faut l’armée pour être dans les rues […] Il faut l’armée comme dans Vigipirate, pour rassurer d’une côté, et témoigner, regarder, surveiller de l’autre. » Et faire des photos et les envoyer à la famille ?
Au cinquantième voyou au tapis…
Faut-il faire intervenir l’armée ? La Constitution ne le permet pas, explique-t-on au ministère de la Défense, où l’on confond l’« état de siège » (article 36 de la Constitution) et l’« état d’urgence », lequel fut décrété par Jacques Chirac en 2005, lors des « émeutes du ramadan », dans vingt-cinq départements de métropole, dont tous ceux d’Ile-de-France. Il fut décrété, puis voté par les deux assemblées… mais jamais appliqué sérieusement.
Dans une poignée de quartiers, le couvre-feu fut décrété. Dans une poignée seulement, qui ne devaient pas excéder la demi-douzaine. Et surtout, les dispositions véritablement intéressantes ne furent pas utilisées : la possibilité de perquisitionner à toute heure du jour et de la nuit, et sans l’autorisation d’un juge… ; l’interdiction de séjour de toute personne – voire son assignation à résidence – « dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité ou l’ordre public » ; l’application de peines de prison à quiconque refuserait de se soumettre.
Il suffit même d’un petit décret de plus pour que la « juridiction militaire », réputée – à tort ? ce serait l’occasion de le vérifier… – moins encline à la culture de l’excuse, prenne le relais de la justice civile et ait le pouvoir de « se saisir de crimes, ainsi que des délits qui leur sont connexes ».
Pour Riposte laïque, Roger Heurtebise rappelait la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 régissant toujours l’état d’urgence : « L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, des départements d’outre-mer, des collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique. »
On peut penser que l’armée dispose des cartes d’état major de la ville de Marseille. Alors on déboule de partout, on encercle, on perquisitionne. Tout. Des caves aux greniers.
Le moindre appartement. Chez les cailleras réputées telles et chez les autres, ceux de la Corniche, ceux du Prado. On fouille tout. Ça prendra le temps que ça prendra. On fouille et on ratisse. Et on serre. Et on juge. Serré lundi, jugé mardi, envoyé casser des cailloux en Guyane mercredi.
Il y aura de la résistance ? Peut-être, et alors ? Des émeutes, ailleurs, par solidarité ? Peut-être encore, et alors ? Au premier voyou au tapis, les cités s’embraseront. Au dixième, elles auront la haine. Au cinquantième, elles iront gentiment faire dodo. Et elles respecteront la France. Pour longtemps. La schlague avec les faux caïds ça a toujours fonctionné et ça fonctionnera toujours.
Lionel Humbert
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