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samedi 28 septembre 2019

La mort n'excuse pas tout: Jacques Chirac en 10 trahisons politiques de légende

 
 
 
Victime ou bourreau ? Jacques Chirac en 10 trahisons politiques de légende

Source: AFP
Le président de la République, Valéry Giscard d'Estaing, accompagné de son Premier ministre, Jacques Chirac, le 25 août 1976, à l'Elysée, à Paris (image d'illustration).

27 sept. 2019, 22:05
 
L’ancien président de la République, Jacques Chirac, s’est éteint à l’âge de 86 ans.

Si beaucoup se souviennent de lui parce qu'il a occupé le poste suprême, le chemin aura été périlleux afin de conquérir l’Elysée.
Et perclus de trahisons politiques.
                                   
Elu en 1965 conseiller municipal de Sainte-Féréole, en Corrèze, d’où est originaire une partie de sa famille maternelle, il faudra à Jacques Chirac 30 ans d’une carrière qui révélera un tacticien politique hors pair pour atteindre son objectif lors de l’élection présidentielle en 1995.
Mais s'il a souvent été le fossoyeur de ses opposants, certains le lui ont bien rendu.
Retour sur les dix trahisons politiques qui ont émaillé la vie de l’homme d’Etat.
 
Chaban-Delmas : la première victime
 
Si Jacques Chirac a appris l’art de la manipulation politique, l’on doit son premier coup d’éclat à l’annihilation méthodique du Premier ministre de Georges Pompidou à partir de 1969 : Jacques Chaban-Delmas, prédécesseur d’Alain Juppé à la mairie de Bordeaux.
Au début des années 1970, alors qu’il est un fidèle du président de la République, Jacques Chirac est soupçonné – avec le concours des deux éminences grises du palais, Pierre Juillet et Marie-France Garaud – d’avoir organisé, à partir de 1971, alors qu’il est député de Corrèze, la fuite d’informations sur les avantages fiscaux dont aurait bénéficié le héros de la Résistance.
Jacques Chirac est choisi pour jouer les mercenaires de Pompidou.
Marqué par ces soupçons, Chaban-Delmas perd une partie du soutien gaulliste.
En 1974, celui-ci est une seconde fois trahi par Jacques Chirac, qui avec 43 autres députés gaullistes lui préfèrent Valéry Giscard d’Estaing comme candidat à la présidentielle.
 
Il se présente contre Giscard d’Estaing en 1981...
 
Si Valéry Giscard d’Estaing est bien élu président de la République en 1974 – grâce au soutien de Jacques Chirac, qui s’est débarrassé de Chaban-Delmas – la lune de miel durera peu de temps. Convaincu de sa supériorité intellectuelle sur celui qu’il choisit comme Premier ministre, le président de la République ne comprend pas la portée de ce qui se joue à la fin du mois d’août 1976.
Chirac démissionne en effet du gouvernement et créé quelques mois plus tard, en décembre, le Rassemblement pour la République (RPR).
Il se présentera ensuite en 1981, lors de la présidentielle, contre Valéry Giscard d’Estaing, celui-là même qu'il l'a nommé à Matignon cinq ans plus tôt.
 
... et refuse de le soutenir au second tour

Lors de l'élection présidentielle de 1981, la machine à produire de l’anti-Giscard jouera donc parfaitement son rôle, Jacques Chirac se présentant lui-même contre le président sortant.
Certains racontent surtout que consignes de vote auraient été données aux militants gaullistes, au second tour, afin de favoriser François Mitterrand.
En tout cas, publiquement, après son échec au premier tour, il refusera de donner une consigne de vote en faveur de Valéry Giscard d’Estaing, celui-ci représentant pourtant la droite face à la gauche, incarnée par François Mitterrand.
En mai 2007, les deux hommes se retrouvent au Conseil constitutionnel autour de Jean-Louis Debré, et montrent, par leurs nombreuses passes d’armes, que la haine viscérale entre les deux hommes est encore vivace.

Marie-France Garaud et Pierre Juillet : les faiseurs de roi roulés dans la farine
Le couple formé par Marie-France Garaud et Pierre Juillet – anciennement au service de Georges Pompidou à l’Elysée – va transformer la carrière de Jacques Chirac.
Après avoir aidé celui-ci à faire tomber Chaban-Delmas, les deux conseillers le poussent à démissionner de Matignon pour former le RPR.
Ils sont ceux qui murmurent à l’oreille du futur maire de Paris.
Mais alors que Jacques Chirac les remercie pour sa victoire aux municipales de 1977, Pierre Juillet rétorque : «C'est bien la première fois qu'on entend un cheval remercier son jockey.»
Sans doute sous-estiment-ils l’animal politique auquel ils ont affaire.
Marie-France Garaud et Pierre Juillet lui inspirent par la suite l’Appel de Cochin du 6 décembre 1978, qui marque la rupture avec Valéry Giscard d'Estaing.
Mais après les élections européennes de 1979, où le parti gaulliste est dépassé par l’UDF de son ennemi, Jacques Chirac décide de rompre avec le tandem.
En restera une amertume non dissimulée de la part des deux conseillers.
«Je pensais que Jacques Chirac était du marbre dont on fait les statues, il est en fait de la faïence dont on fait les bidets», lâchera alors Marie-France Garaud, qui se présentera même à l’élection présidentielle de 1981.
Elle finira avant-dernière avec 1,33% des voix.

Edouard Balladur : l’ami de 30 ans devenu ennemi
Après les départs de Marie-France Garaud et de Pierre Juillet, Jacques Chirac prend un nouveau conseiller en la personne d’Edouard Balladur.
En 1993, alors que la droite recueille une très large majorité à l’Assemblée nationale lors des législatives, le président François Mitterrand est forcé à la cohabitation.
Or Jacques Chirac, déjà Premier ministre du socialiste entre 1986 et 1988, ne souhaite pas revivre l’amère expérience du pouvoir avec celui que ses partisans surnomment «Tonton» et contre qui il a perdu en 1988 au second tour.
«Monsieur le Premier ministre» décide alors d’envoyer Edouard Balladur, son ami de 30 ans, à Matignon, afin de se consacrer pleinement à la présidentielle de 1995.
Il ne voit néanmoins pas venir les ambitions de Balladur, porté par des sondages positifs, qui se présente également à l’élection.
L'arroseur est arrosé, mais Edouard Balladur, croqué en une du Monde par Plantu en marquis, n’arrivera jamais à faire décoller sa campagne.
Jacques Chirac, lui, chasse sur sa gauche avec le thème de la «fracture sociale» et joue la proximité avec le peuple.
Edouard Balladur terminera à la troisième place du premier tour de la présidentielle, derrière Lionel Jospin et Jacques Chirac, avec 18,58% des suffrages.
Les deux anciens amis ne se reparleront plus jamais.

Charles Pasqua : la trahison du frère
Dans son entreprise de 1995, Edouard Balladur a fait des émules.
Parmi eux un proche de Jacques Chirac, qui a été son ministre de l’Intérieur entre 1986 et 1988 : Charles Pasqua.
L’ancien député des Hauts-de-Seine est alors un des fondateurs du RPR en 1976 et un artisan important de la victoire de 1977 aux municipales à Paris.
Le petit-fils de berger corse, homme des réseaux gaullistes, était également présent en 1981 pour faire battre Valéry Giscard d’Estaing tout comme lors de la défaite de Jacques Chirac en 1988.
Mais en 1995, celui qui est ministre de l’Intérieur du gouvernement Balladur choisit finalement de soutenir le Premier ministre sortant dans la course à l’Elysée.
Cet événement, que Jacques Chirac vit comme une trahison, marquera le début du déclin de la carrière politique du souverainiste, qui échouera à réunir les 500 signatures en vue de se présenter à l’élection présidentielle de 2002.
Il accusera l’entourage de Jacques Chirac d’avoir voulu l’«éliminer».

Nicolas Sarkozy : la trahison du fils (Acte I)
 
La campagne de 1995 aura décidément été une période difficile pour Jacques Chirac.
En plus des défections d’Edouard Balladur et de Charles Pasqua, le maire de Paris doit faire face à un nouveau départ : celui de Nicolas Sarkozy.
La première rencontre entre les deux hommes intervient en 1975, lors du congrès de l’UDR, à Nice. Celui qui est alors Premier ministre voit monter à la tribune le délégué des jeunes du parti dans le département des Hauts-de-Seine.
Censé n’avoir que deux minutes de temps de parole, Nicolas Sarkozy fait durer le plaisir en tressant des lauriers à son nouveau mentor.
La foule, mais aussi Jacques Chirac, sont conquis.
C’est alors que décolle la carrière de son nouveau fils politique.
Elu maire de Neuilly en 1983, nommé ministre du Budget et de la Communication en 1993 dans le gouvernement Balladur, sa prise de position en faveur du Premier ministre sortant restera longtemps en travers de la gorge de Jacques Chirac… qui ne manquera pas de se rappeler à son souvenir presque 20 ans plus tard.
 
Alain Juppé : le bouclier humain
 
Fidèle parmi les fidèles, Alain Juppé est l’adjoint de Jacques Chirac pendant douze ans à la mairie de Paris avant d’être élu maire de Bordeaux en 1995.
Il succède – ironie de l’histoire – à un certain Jacques Chaban-Delmas.
Après l’élection victorieuse de 1995, il est même choisi par Jacques Chirac pour devenir Premier ministre.
Ce lieutenant de la première heure aura accompagné de près l’ascension du nouveau président. Numéro deux du RPR pendant six ans, entre 1988 et 1994, il fera face avec brio à la montée d’une part des jeunes du parti, baptisés «les rénovateurs», et d’autre part à celle des souverainistes emmenés, entre-autres, par Charles Pasqua et Philippe Séguin.
Mais lorsqu’est rendue publique l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, entre 1988 et 1995, c’est Alain Juppé qui apparaît en première ligne, le président en exercice ne pouvant être inculpé.
Il sera finalement condamné en 2004 par la cour d’appel de Versailles à 14 mois de prison avec sursis et à un an d’inéligibilité.
 
Les Français : un référendum pour rien
 
En 2005, afin de faire valider l’idée d’une Constitution européenne, Jacques Chirac décide de l’organisation d’un référendum qui doit se tenir le 29 mai 2005.
Partisan du «oui», le président tient une allocution télévisée trois jours avant le scrutin pour mettre en garde contre la possibilité d’un vote «non».
«Le 29 mai, chacune et chacun de nous devra faire un choix en responsabilité et en conscience […] La décision qui est devant nous dépasse de très loin les clivages politiques traditionnels […]
Il ne s'agit pas de dire oui ou non au gouvernement.
Il s'agit de votre avenir et de celui de vos enfants, de l'avenir de la France et de l'Europe», assure alors le chef de l’Etat.
Les craintes de Jacques Chirac se confirment puisque le «non» l’emporte assez largement (54%). Juste après les premières estimations, le résultat ne faisant aucun doute, Jacques Chirac s’exprime à la télévision, réaffirmant néanmoins la place de la France dans l’Union européenne.
Il laissera le soin à son successeur, Nicolas Sarkozy, de ratifier le traité de Lisbonne en 2008.
 
Nicolas Sarkozy : la vengeance du père (Acte II)
 
Le dernier coup de Trafalgar joué par Jacques Chirac sera à destination de son fils déchu Nicolas Sarkozy.
Celui-ci s’appliquera à saper les campagnes présidentielles suivantes de son ancien ministre.
En juin 2011, à moins d’un an de l’élection présidentielle, Jacques Chirac annonce vouloir donner sa voix à François Hollande alors que Nicolas Sarkozy doit se présenter à sa réélection.
Si l’entourage de l’ancien président invoque «l’humour corrézien», personne, et certainement pas Jacques Chirac, n’a oublié la défection de Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle 1995 au profit d’Edouard Balladur.
En 2017, alors que fait rage la primaire de la droite, Jacques Chirac soutient Alain Juppé, qui lui est toujours resté fidèle… contre un certain Nicolas Sarkozy.
 
RT France

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