L’hiver arrivant au galop, on sent comme une sorte de petit vent frais dans la nuque de nos ministres.
Rien à voir avec le souffle chaud des lendemains de victoire électorale.
Un vent de panique, peut-être, face à la peur de manquer d’électricité lorsque la bise va venir ? La peur, aussi, de se retrouver comptable du désastre énergétique qui point à l’horizon ? Allez savoir. Quoi qu’il en soit, les ministres se relaient sur les plateaux télé et radio pour souffler le chaud et le froid et décliner (c’est le mot !) le slogan magnifique qu’ils nous ont trouvé dans la série « On vous prend pour ce que vous êtes, c’est-à-dire des… » : « Je baisse, j’éteins, je décale. »
Ce lundi 5 décembre matin, c’est Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, qui était de corvée de charbon chez CNews. Interrogée par Laurence Ferrari sur la question de notre indépendance énergétique, le ministre nous a donné une magnifique leçon d’histoire contemporaine. « Ce mythe de l’indépendance énergétique relève du mythe », nous a expliqué le ministre. Bon, un mythe qui relève du mythe, jusque-là, ça paraît normal. Disons que sa fourche a langué. C’est des choses qui arrivent. Je voudrais vous y voir, face à Ferrari… Mais derrière ce petit lapsus qui n’a pas de quoi faire tourner la turbine à bêtisier bien longtemps, que devine-t-on ? Un contre-feu (de cheminée ?) face au procès en impéritie auquel le gouvernement doit faire face désormais.
Pratiquement à la même heure, ce même lundi matin, sur RTL, un député Renaissance, tout propre sur lui et dont j’ai déjà oublié le nom, faisait, lui, face au communiste Ian Brossat, par ailleurs adjoint d’Anne Hidalgo à la mairie de Paris.
Brossat, comme tout bon communiste, est favorable au nucléaire. Et ce pauvre député de la majorité, qui devait contrer les attaques de Brossat au sujet de l’abandon de la filière nucléaire durant les premières années du premier mandat Macron, dans la foulée du mandat Hollande, essayait d'esquiver le débat en contre-attaquant, assez lourdement, il faut bien l'avouer, sur le terrain de l’impéritie financière d’Hidalgo à Paris. C’est pas faux, mais ce n’était pas le sujet !Un contre-feu, donc, pour tenter d’expliquer que si les Français devaient être amenés à se chauffer et à s'éclairer à la bougie cet hiver, ce n’est en tout cas pas la faute à ce gouvernement et à ceux qui le composent. Surtout pas Borne qui déclarait, en juin 2020 : « Ça fait des années qu'on disait : "Il faut fermer des centrales nucléaires". Il y a ceux qui en parlent, et puis il y a ceux qui le font. Nous, on le fait. » Mais ça, c'était avant. Et puis, arrêtez avec ce mythe de l’indépendance énergétique ! Mais on le sait, ça, Agnès ! Les Français ne sont pas complètement nunuches : ils savent bien que la France de ce dernier demi-siècle n’a jamais été indépendante au plan énergétique. Les boomers, gros bataillons électoraux de Macron, n’ont-ils pas fait les quatre cents coups à l’époque où on serinait à leurs parents qu’en France, on n’avait pas de pétrole mais qu'on avait des idées ? Mais tout de même ! Chiffres officiels à l’appui : en 1973, le taux d’indépendance énergétique de la France n'était que de 23,9 %. Qu’est-ce que le taux d’indépendance énergétique ? C'est le rapport entre la production nationale d’énergies primaires (charbon, pétrole, gaz naturel, nucléaire, hydraulique, énergies renouvelables) et la consommation en énergie primaire. Et ce taux est passé à 49,50 % en 1990, 51,2 % en 2010, 55,5 % en 2020. Ce qui n'était tout de même pas mal. Qu’en sera-t-il en 2022, 2023, 2024, avec la fermeture de Fessenheim et nos réacteurs à l’arrêt pour x et y raisons ?
Le 1er décembre, sur franceinfo, le président du directoire de RTE déclarait : « Historiquement, la France était très exportatrice parce qu'elle avait un parc nucléaire très gros ; là, il s'avère qu'il a des difficultés passagères [...] [qui] vont se résoudre, mais ça va prendre quelques années. Pendant ce temps, on importe de l'électricité. » Et ça, ce n’est pas un mythe. C’est même historique, tristement historique.
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