… et tous ces vieux villages qui puent le monde traditionnel et la bouse de vache ? Rien de plus simple ! Pas de bombes, pas de chars d’assaut : l’économie d’énergie ! Fallait y penser ! C’est à la mode et ça ne tue personne !
Dystopies« Dommage que ça ne tue personne, d’ailleurs… ça aurait fait d’une pierre deux coups ! », se sont dit les frères Big Brother et Big Pharma, obséquieusement relayés par les organes de presse, et d’ajouter : « Depuis
le temps qu’on s’échine à essayer de réduire cette population de
gueux ! Nous avons pourtant employé tous les moyens. La pandémie : ça
n’a pas marché, ils ont travaillé comme des cochons, les laborantins de
Wu-Fu, résultat : pas mieux qu’une bonne grippe de derrière les fagots,
comme ils disent chez les ploucs. Le vaccin, oui, ça fonctionne, il y a
beaucoup de morts et d’éclopés, mais ça n’est pas suffisant, il nous
reste des milliards de doses à écouler. La guerre, c’est bien, ça fait
tourner les usines, mais il y en a certains qui ne sont pas d’accord et
qui n’arrêtent pas de nous mettre des bâtons dans les roues ; là, nous
nous sommes carrément fait rouler dans la farine ».
C’est alors que, au moment même où tout ce beau monde mondialiste était dans le désarroi total, le lobby des BTP
(Bâtiments et Travaux Publics), une structure économique qui existe
dans un vieux pays, la France, d’un vieux continent, l’Europe, eut
l’idée de leur proposer la bonne affaire, une lueur d’espoir pour ne pas
sombrer dans la neurasthénie : « Si on ne peut pas se débarrasser
des habitants, on pourra toujours éradiquer tous ces agglomérats hideux
et moisis de maisons délabrées ou, au moins, les cacher à notre vue en
attendant de les remplacer par des grandes tours pour y loger nos futurs
esclaves, comme l’avait si bien imaginé ce bon Le Corbusier pour
détruire Paris.«
Ce petit passage d’introduction amusant (?),
en forme de conte moderne (de Noël ?), était bien sûr une dystopie.
Qu’est-ce qu’une dystopie ? C’est un récit de fiction qui décrit un
monde où l’utopie, du genre « tout le monde, il est beau, tout le monde, il est gentil », loin de se réaliser, a accouché d’un monde catastrophique. 1984, de George Orwell, ou Le Meilleur des Mondes, d’Aldous Huxley, sont des dystopies. Tout comme la république, la démocratie… ou l’architecture de Le Corbusier
La vérité, c’est que c’est Ségolène Royal, alors ministre de l’écologie(1), qui a initié ce processus destructeur en faisant adopter un décret (du 30 mai 2016) qui obligera les propriétaires des maisons (anciennes ou pas) à isoler leurs bâtiments par l’extérieur, une absurdité que Le Canard Enchaîné du 17 août 2016 fut l’un des premiers à dénoncer :
Ce décret a été conforté par deux lois qui vont dans le droit fil des mesures contraignantes liées au possible « passe énergétique » qui viendrait remplacer, ou, pire, doubler, le « passe médical » dont rêvent tous les dictateurs de la planète. On peut lire dans un article paru dans Les dernières nouvelles d’Alsace : « Faut-il asseoir la transition énergétique sur un champ de ruines, celui de notre patrimoine ? Malgré d’inventives initiatives individuelles, la maison à colombages perd du terrain, en Alsace : chaque année, elles seraient plus de 300 à finir en petit bois. Le phénomène n’est pas près de s’inverser depuis la promulgation de deux lois aux amers effets secondaires : la loi climat et résilience (2021), qui établit le principe du zéro artificialisation nette et la loi énergie climat (2019), qui vise l’interdiction progressive à la location de passoires thermiques, pour favoriser des rénovations thermiques à mener tambour battant, puisque l’État leur assigne un caractère d’urgence climatique. Deux lois vertueuses en apparence, mais qui font peser sur le bâti ancien une pression inédite et mortifère : l’une en accélérant la densification des centres des communes, ce qui se fera parfois en ratiboisant l’ancien, et l’autre en prônant une rénovation qui ne tient pas compte des caractéristiques bioclimatiques du bâti ancien et qui aboutira à sa ruine. Les matériaux naturels ont en effet besoin de respirer, ce que ne permet pas l’utilisation de polystyrène expansé avec lequel on recouvre de plus en plus souvent les colombages… Depuis cet été, des voix s’élèvent pour dénoncer cette catastrophe qui s’annonce, à savoir que le bois « pourrisse » derrière sa nouvelle coque étanche. »
À ces deux lois vient s’ajouter une mesure plus ancienne (2016) : le « Diagnostic de Performance Énergétique » (DPE), obligatoire lui aussi lors de la vente ou de la location d’un bâtiment ; ces diagnostics ont vu éclore quantité d’entreprises qui flairaient l’affaire juteuse, toutes aussi incompétentes les unes que les autres, qui conduisent les propriétaires à effectuer des travaux inutiles et coûteux (voir les associations de défense des consommateurs, dont la revue Que Choisir d’octobre 2022, dont extrait ci-dessous).
Que Choisir a évalué une seconde fois le nouveau diagnostic de performances énergétiques (DPE), nécessaire lors d’une transaction immobilière. Ce DPE considère désormais la pire des deux sous-notes entre la consommation énergétique et l’émission de CO2. Pour l’étudier, les associations locales de l’UFC-Que Choisir ont sélectionné 7 maisons avec des bâtis, des périodes de construction et des modes de chauffage différents. Chaque propriétaire a appelé 3 réseaux et 2 diagnostiqueurs immobiliers indépendants. Le bilan est catastrophique, avec des classements très différents allant de A à G pour un même logement. Des « conseils » d’équipements en chauffage inexacts ont même été proposés. Une telle différence reflète l’incompétence de certains professionnels dont le mauvais travail a des conséquences : un classement bas peut entraîner une décote lors de la vente d’un bien et bientôt empêcher sa location (pour les logements classés F et G). Il s’agit d’un véritable scandale !
Le 2 novembre 2022, la sénatrice Sabine Drexler alertait le gouvernement sur les conséquences dramatiques de cet ensemble de mesures sur le patrimoine français qui ne pourrait y survivre.
Le 18 novembre 2022, il y a donc un mois, le G7, regroupement des principales associations de défense du patrimoine bâti, sous la conduite de Maisons paysannes de France, envoyait une lettre ouverte (comme un SOS ou une bouteille à la mer) à leurs ministres de tutelle : ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et ministre de la Transition énergétique (amusant, non, ces ministères de « transition », ce qui veut dire qu’ils ne sont là que provisoirement, en attendant le Great Reset ou les passes écologique et énergétique ? Et que veut dire « cohésion des territoires » si ce n’est : uniformisation ?)
Voici deux extraits de cette lettre ; nous sourierons malicieusement à la petite phrase : « Nous n’imaginons pas un seul instant qu’il s’agisse d’un choix volontaire », comme si les rédacteurs de la loi auraient pu « oublier » que la France existait avant 1948 :
« Étonnamment, la loi climat &
résilience ne mentionne pas le bâti ancien (d’avant 1948) qui ne peut
pourtant pas être confondu avec celui d’avant 1975 – dit des “30
glorieuses” – ni rangé dans la catégorie des “passoires thermiques”. Ce
bâti ancien, qui constitue l’un des atouts de l’esthétique et de
l’attractivité de nos villes et de nos campagnes, appelle certes des
travaux pour améliorer sa performance énergétique, mais dans le respect
de ses matériaux et de l’écosystème qu’il constitue. Si ces travaux ne
respectent pas ce qu’il est – un bâti bioclimatique par nature – et le
confondent avec ce qu’il n’est pas – une passoire thermique – loin de
l’inscrire dans la durée, ils vont le condamner irrémédiablement. Nous
n’imaginons pas un seul instant qu’il s’agisse d’un choix volontaire.
C’est donc une omission de la part des rédacteurs de la loi, qu’il est
urgent et vital de corriger. […]
« La disparition programmée
de nos menuiseries anciennes, des croisées et des portes –
illustrations des savoir-faire du menuisier, du sculpteur, du serrurier
ou du verrier – au profit de modèles standardisés, généralement en PVC,
n’est pas acceptable. L’âme centenaire de nos maisons ne doit pas être
effacée par des productions de l’industrie qui n’ont rien de durable.
L’isolation par l’extérieur qui détruit toute ornementation en saillie
des façades pour y arrimer des dalles souvent en polystyrène, ramène
l’architecture à un simple gabarit et la met en péril. Que penser d’une
isolation par l’intérieur substituant au second œuvre ancien et à ses
décors, des boîtes en placoplâtre ? Nous nous opposons à cette
extinction patrimoniale de masse, à cette négation de l’architecture
offerte à tous, annihilant les diversités régionales, les statuts, les
époques ou les styles de ces bâtiments. Ce nivellement industriel,
consistant souvent à plastifier nos logements, loin de sauver la
planète, nous déshumanise et prive les Français de leur héritage
artisanal et artistique le plus immédiat. Pour tous les acteurs, il est
urgent de mettre en œuvre une politique cohérente de formation technique
et patrimoniale qui, comme le confirment certains médias, fait
visiblement défaut aujourd’hui. Nos associations sont contactées par de
nombreux propriétaires désemparés à la lecture des résultats du nouveau DPE,
devenu opposable et qui débouche dans la plupart des cas sur une
préconisation d’isolation par l’extérieur, avec des matériaux et des
techniques qui font fi de la valeur patrimoniale des façades et des
logiques de fonctionnement de leurs matériaux, tous sensibles à
l’humidité et perspirants. Devant la catastrophe annoncée, nous attirons
votre attention sur ces carences d’une loi qui, appliquée dans
l’urgence, risque d’avoir des conséquences néfastes sur le bâti ancien… »
Et, comme en France moderne, tout finit par des chiffres (en France
traditionnelle, c’était des chansons, chaque époque a ses priorités), en
voici quelques-uns qui prouvent abondamment que ce gouvernement n’en a
rien à faire des Français, de la France, de son avenir, et encore moins
de son histoire, de son legs patrimonial ou de son rayonnement dans le
monde.
Chiffres disponibles de 2019 : la France est la première
destination touristique mondiale : 90 millions de touristes
internationaux en 2019, et la troisième destination pour les recettes
engrangées par ce tourisme. Ces touristes ont dépensé en France 170 milliards d’euros pour cette année-là.
En terme d’activité professionnelle, le tourisme emploie 2 millions de salariés directs et indirects et constitue 7 % du PIB français.
Pourquoi
les touristes viennent-ils si nombreux en France ? Parce que si la
France n’est peut-être pas le plus beau pays du monde (en tout cas, peu
s’en faut), il est à coup sûr celui qui offre la plus grande diversité, à
la fois de paysages, de monuments, d’architectures locales
admirablement et consciencieusement préservées (ces villages et ces
petites villes de culture harmonieusement dessinés au fil des siècles et
où il fait si bon flâner), de gastronomies et de cultures régionales
enracinées, de patrimoine artistique et historique (que la Révolution
n’a pas réussi à totalement éradiquer), il bénéficie d’un climat tempéré
qui fait qu’il est possible de visiter le pays à peu près tout le long
de l’année selon les régions, d’un ensoleillement maximum dans ses
régions du sud, et enfin, il dispose de structures d’accueil (hôtellerie
et restauration) qui offrent un large choix à la portée de tous les
budgets.
Croyez-vous que ces touristes seront encore là
lorsque toute cette richesse patrimoniale aura été saccagée ?
Pensez-vous qu’ils se déplaceront pour visiter des quartiers sinistres
peuplées de tours, pour traverser des zones industrielles sans fin, ou
pour croiser des villages aseptisés composés de maisons toutes aussi
semblables les unes que les autres ?
La qualité de vie n’est
pas une question de richesse matérielle, et même ces « élites »
mondialistes, avec tout l’argent dont elles disposent (qu’elles auront
volé aux Peuples), quand elles sortiront de leurs bunkers, seront alors
obligées de vivre dans un monde où toute beauté aura été effacée.
Pierre-Émile Blairon
(1) Avant de prendre un peu de plomb dans la tête depuis ses derniers revirements, ce qui nous permet de saluer ici sa « bravitude ».
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