C’est
donc le ministre de la Santé qui a annoncé, samedi, que le gouvernement
allait soumettre au Parlement la prorogation de l’état d’urgence
sanitaire jusqu’au 24 juillet.
Certes, mardi dernier, Édouard Philippe,
dans sa présentation de la stratégie de
déconfinement à l’Assemblée nationale, a bien évoqué – très rapidement – cette éventualité :
« peut-être jusqu’au 23 juillet »…
Mais le fait que cette annonce de prolongation d’un régime d’exception
mettant les Français sous liberté surveillée soit faite, non par le
Premier ministre, mais par le ministre de la Santé n’est pas anodin.
C’est même très révélateur.
Il est vrai que le ministre de la Santé est
devenu le nouveau ministre de la Guerre.
Ainsi, jamais, depuis 1961,
lorsque le général de Gaulle mit en application l’article 16 de la
Constitution, après le putsch des généraux, notre pays n’a connu de
telles restrictions de libertés : de circuler, de culte, d’entreprendre,
etc.
Toujours dans son discours de mardi dernier, à l’Assemblée, Édouard Philippe déclarait :
« Au
fond, ce que je vous propose de rétablir, c’est un régime de liberté et
qu’il nous faut donc ensemble en définir les exceptions. »
On
serait plutôt tenté de penser que c’est un régime de restriction de
liberté qui s’installe dans un provisoire qui dure et que le
gouvernement nous en a d’ores et déjà défini les exceptions.
Par
exemple, nous n’aurons pas le droit de nous déplacer où nous voulons.
Exception faite
dans un rayon de 100 kilomètres de chez soi
et de quelques cas bien précis.
Certes, c’est pour la bonne cause mais
c’est un fait.
Du reste, c’est toujours pour la bonne cause.
Libertés de circuler, de culte, d’entreprendre (pensons aux
restaurateurs, cafetiers, hôteliers, etc.) restreintes mais on pourrait
évoquer, plus simplement, la suspension de certains droits civils,
notamment celui de contracter mariage.
Du reste, sur quels fondements
juridiques solides reporte-t-on
sine die la célébration des
mariages civils depuis le mois de mars ?
En effet, Jacqueline Gourault,
ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les
Collectivités locales, donnait, le 21 mars dernier, aux maires ses
« recommandations » écrites dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.
Concernant les mariages et PACS, on lit ceci :
« Au
regard des mesures limitant les déplacements et le regroupement des
personnes afin de lutter contre la crise sanitaire, la célébration des
mariages et l’enregistrement des PACS doivent en principe être
reportés. »
Mais pour célébrer un mariage civil, il ne faut que cinq personnes : un officier d’état civil, deux témoins… et les mariés !
« En principe » : et en droit ?
Certes, on découvre, sur le site du Sénat, que cette décision est l’
« application d’une dépêche du 18 mars 2020 du ministère de la Justice relative à la continuité des services de l’état civil », précisant que
« la célébration d’un mariage doit actuellement être reportée, afin de lutter contre la crise sanitaire », sauf
« urgence à établir le lien matrimonial »
et après sollicitation du procureur de la République.
En fait, on a
interdit les mariages parce qu’en général – j’ai failli écrire
« en principe »
! -, on fait la fête après la cérémonie.
C’est un peu court. Sous cet
angle, l’état de siège ou de guerre est moins liberticide !
Et jusqu’à
quand ?
Évoquons rapidement la liberté surveillée du culte.
Par le petit bout
de la lorgnette.
Ainsi, on découvre cette consigne officielle, en date
du 23 avril, d’un préfet aux maires de son département pour les aider
dans le flicage de leurs administrés :
« Les fidèles sont autorisés
individuellement à se rendre dans les lieux de culte qui sont restés
ouverts, munis d’une attestation de déplacement dérogatoire. À
l’intérieur du lieu de culte, tout rassemblement étant interdit, le
fidèle doit prier ou se recueillir isolément… »
On fait comment,
pour juger que le fidèle prie, se recueille ou, plus laïquement, admire
la voûte gothique de l’église du village ?
Maintenant, une remarque : les Français, soi-disant épris de liberté,
se satisfont peut-être de cette situation de liberté surveillée.
Et
conditionnelle, sans doute un peu aussi…
Georges Michel
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