Bretagne
Nord, 20 mai 2020. 16 h 00, parking du supermarché du coin.
Il est conscient, porte le masque « réglementaire » et tout ce qu’il souhaite, c’est un peu d’aide.
Un petit cercle de passants s’est formé autour de lui, mais les gestes barrières aidant, personne ne cherche ni à l’approcher ni à lui tendre la main pour le relever.
« Il est temps, maintenant, d’apprendre à nager », chantait Hugues Aufray…
Quelqu’un a téléphoné aux pompiers ; une ambulance arrive une demi-heure plus tard (normal, elle vient de loin).
L’homme est toujours au sol (par chance, il ne pleut pas).
Il précise à nouveau que tout ce qu’il souhaite, c’est de l’aide pour se relever, mais c’est un cas qui ne semble pas prévu dans la procédure d’intervention.
Il est donc mis sur brancard et embarqué dans le véhicule de secours, direction les urgences du CHU…
Il en ressortira huit heures plus tard et ira récupérer le lendemain son véhicule resté sur place.
Petite chronique de la vie quotidienne, somme toute, mais qui en dit long sur l’état de délabrement où se trouve la société dans laquelle nous vivons, le nez dans nos écrans.
Soyons lucides, en ces temps de coronavirus, qui fait une chute dans l’espace public ne doit plus compter sur personne pour obtenir de l’aide pour se relever.
Bien entendu, personne n’est coupable, et chacun ouvre bien vite le parapluie : « Ce n’est pas ma faute, je ne fais qu’appliquer les instructions du gouvernement… »
L’emploi continuel et à tout propos de cet instrument qui fit la gloire de Cherbourg est donc devenu un incontournable (qui n’a, hélas, plus rien de glorieux).
Notre Président ouvre son parapluie quand il se retranche derrière l’avis du Conseil scientifique.
Notre Premier ministre ouvre son parapluie quand il déclare que l’Europe n’a pas fait ce qu’il fallait à propos de la pandémie en cours.
Notre Conseil scientifique ouvre, lui aussi, son parapluie quand il signale qu’il faut attendre le 11 juin pour fournir une réponse vraiment positive à la mise en place des élections municipales.
Nos syndicats ne sont pas en reste et notre inspection du travail s’y met aussi, qui vient de prononcer une sanction inédite contre la RATP (l’entreprise n’a pas garanti la santé des conducteurs de bus).
Savez-vous que, comme le Covid-19, la « parapluiemania » est contagieuse ?
Aujourd’hui, à Nice, un couple qui veut louer un pédalo à deux places doit fournir un certificat de domicile pour prouver qu’ils habitent ensemble !
Même l’ami Michel Legrand n’avait pas prévu le coup : la France est en passe de gagner le championnat du monde d’ouverture de parapluies !
Patrick Macré
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