Le 18/01/2015
N’y a-t-il pas une haine de bon aloi, en certaines circonstances ? N’y a-t-il pas une juste haine, comme il y a de « saintes colères » ?
J’appelle aujourd’hui à la barre le journaliste Philippe Tesson. Monsieur Tesson est accusé d’avoir enfreint l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 en proférant ces mots sur l’antenne d’Europe 1 mardi dernier :
« D’où vient le problème de l’atteinte à la laïcité, sinon des musulmans ? On le dit, ça ? Eh bien moi, je le dis ! Je rêve ou quoi ? C’est ça, notre problème actuellement, c’est les musulmans qui mettent en cause la laïcité ! C’est les musulmans qui amènent la merde en France aujourd’hui ! »
Au moment où j’écris ces lignes, il aurait été congédié par Le Point.
Certes, on ne peut pas dire que monsieur Tesson soit un expert de la « langue de coton » ; on ne peut lui ôter un certain panache viril dans l’expression de ses idées – panache d’autant plus frappant que l’homme se dirige vers sa quatre-vingt-septième année.
Sans doute aussi est-ce un âge où l’on ne craint plus guère de brûler ses vaisseaux – et de dire ce que l’on pense haut et fort quoi qu’il en coûte.
Entendant ces mots, un auditeur – Charlie anonyme – a déposé plainte contre le journaliste pour incitation à la haine raciale. Charlie Duflot, quant à elle, demande « une réaction plus forte » contre « les propos abjects et l’islamophobie puante de Philippe Tesson ».
Les Charlie de la presse – ceux-là mêmes qui pleuraient à chaudes larmes, il y a quelques jours, sur le cadavre de la liberté d’expression – ne savent plus quels mots ils doivent sortir de leur petit glossaire indigné pour couper le sifflet du malfaiteur.
Stigmatisation ?
Dérapage ?
Propos pitoyables ?
Consternants ?
Ignobles ?
Délire ?
Appel au meurtre ?
Tesson essaiera vainement d’expliquer qu’il ne visait pas tous les « musulmans de France », qu’il parlait de leur frange la plus revendicative – c’est-à-dire la plus « éveillée », pour reprendre l’idée de Sami Aldeeb.
On ne s’embarrasse plus de nuances quand il s’agit de mettre un islamophobe au pilori.
Quant à la haine, qu’on voit et qu’on dénonce partout – et qui déborde évidemment de tous ces appels à virer, à boycotter, à pénaliser –, on s’abstient très soigneusement de la distinguer de la simple méfiance, de la répugnance ou de la discrimination (au sens de distinction).
Et puis, n’y a-t-il pas une haine de bon aloi, en certaines circonstances ?
N’y a-t-il pas une juste haine, comme il y a de « saintes colères » ?
Que serait aujourd’hui notre liberté si, tout au long de notre histoire, des hommes n’avaient pas haï les tyrans, les barbares et les oppresseurs de toutes leurs forces ?
Quand un jeune, de son territoire perdu, déclare ou chante qu’il « a la haine » – contre les flics, Pôle emploi et la société –, quelqu’un lui met-il un Code pénal sous le nez ?
Eh bien, si monsieur Tesson exprime sa « haine » de tout ce qui, dans le comportement de certains musulmans, lui semble menacer la paix civile, n’est-il pas dans le droit de sa conscience ?
De quelle espèce de soumission et d’avachissement intellectuel relève cet amour vague et sans consistance qu’on lui oppose ?
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