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vendredi 4 août 2023

Ces femmes subissent le harcèlement de rue à Lyon : "J'ai toujours ma lacrymogène"


Des Lyonnaises témoignent du harcèlement de rue quotidien. Insultes, remarques sexuelles, menaces...

Des Lyonnaises témoignent du harcèlement de rue quotidien. Insultes, remarques sexuelles, menaces… (©Martin Leduc/ actu.fr)

Des Lyonnaises qui vivent le harcèlement sexuel et sexiste au quotidien témoignent. Elles confient changer de tenue, ne plus se maquiller et éviter des quartiers à Lyon. 

Leur quotidien est rythmé par les insultes, les remarques, les comportements déplacés, voire des agressions physiques et des attouchements sexuels.

Plusieurs Lyonnaises confrontées au harcèlement sexiste dans la rue ou dans les transports en commun de la métropole de Lyon témoignent.

actu Lyon donne la parole à des femmes qui ont préféré, de force et malgré elles, changer leurs habitudes, leur comportement et leurs tenues vestimentaires pour tenter d’échapper au fléau du harcèlement. Afin de protéger l’anonymat des témoins, les prénoms ont été modifiés. 

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« J’ai changé mes tenues, maintenant, je m’habille comme un sac »

Emilie, 23 ans, est étudiante à Lyon depuis quatre ans. En arrivant dans la ville depuis le Var d’où elle est originaire, elle s’installe dans le quartier populaire de Grand Trou dans le 8ᵉ arrondissement. « Je n’ai pas vraiment les moyens financiers de changer de quartier de toute façon », confie la jeune femme.

« Tout de suite » en arrivant dans la troisième ville de France, elle voit son quotidien changer. Insultes, remarques déplacées et crasseuses… « Ce n’était pas comme ça dans ma ville natale », affirme l’étudiante.

J’ai vécu ça tout de suite, j’avais l’habitude de mettre de jolies jupes, pas forcément très courtes. Mon école était près de Saxe, je me faisais suivre, insultée, embêtée. Très vite, j’ai changé mes tenues, maintenant, je m’habille comme un sac. On m'a déjà insulté de mécréante, de sale pute, on m'a fait de la drague lourde en me disant que « j’étais fraiche, bonne »...

Emilie, une Lyonnaise de 23 ans

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« Je mets des joggings très larges »

Certaines femmes comme Emilie adoptent une stratégie pour « devenir moche » et éviter d’attirer l’attention sur leur physique. Le « subway shirt » consiste à se vêtir d’une tenue longue pour cacher ses formes.

« Je mets des joggings très larges, des gros pulls, des pantalons très larges. Et l’été, quand j’ai l’occasion d’aller en vacances, je quitte Lyon (…) J’arrive à braver parfois la chose et m’habiller comme je veux mais je me fais insulter à chaque fois ».

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Plus de maquillage, quartiers à éviter, rentrer en Uber…

La Lyonnaise, qui confie qu’elle quittera la ville à la fin de ses études, assure « qu’elle ne se maquille plus ». « C’était un facteur aggravant… », confie-t-elle.

D’autres stratagèmes sont utilisés par les femmes qui témoignent : éviter certains quartiers comme la Guillotière, la place Bellecour, Vaise, Terreaux, rentrer en Uber, partager sa géolocalisation avec des proches, moins sortir le soir, rentrer chez soi avec un homme, être au téléphone dans la rue…

Chaque déplacement, même faire des courses, demande des sacrifices et des adaptations. « Quand je fais des courses à Grand Trou, j’évite certaines zones, je dois faire un grand détour », confie la Lyonnaise.

Peu importe l'endroit, il y aura toujours un homme pour vous emmerder. J'ai été harcelée ou agressée, pêle-mêle, à Grange Blanche en allant au travail à 7h, à Bellecour par un contrôleur TCL en début de soirée, à la Poste de Valmy, devant la bibliothèque Part-Dieu, en plein cœur du 3ᵉ, etc.

Aline, une Lyonnaise de 25 ans

« Les hommes sont des menaces, on a peur »

Aline, 25 ans et installée à Lyon depuis sept ans, assure aussi se faire harceler un peu partout dans la ville. « J’ai perdu espoir de faire comprendre aux hommes qu’ils sont des menaces et qu’on a peur quand on sort. Des années qu’on en parle et rien ne bouge », affirme, dépitée, la jeune femme.

« Il y a de tout, mais toujours des hommes. Aussi bien des jeunes que des vieux papys, des marginaux ou des représentants de l’autorité », assure Aline.

Plus catégorique, Emilie soutient que « ce sont toujours les mêmes profils de harceleur ». Des « hommes de 17 à 25 ans, jeunes, et issus de l’immigration, seuls ou dans des grands groupes ».

Elle assure ne pas être engagée politiquement mais que « l’immigration est en cause » et « que certaines cultures traitent très différemment les femmes ». « Je n’étendrai pas forcément mon raisonnement à tous les hommes », dit-elle.

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« Peu de gens aident », « les femmes réagissent »

Les femmes sont aussi souvent confrontées à la passivité des témoins.

« Soyez aux aguets, soyez vigilants. Les victimes n’osent pas toujours réagir et demander de l’aide. Si vous avez l’impression qu’une femme est dans une situation inconfortable, faites quelque chose. Peu de gens aident dans ces cas, pas même les flics, et c’est très pesant », déplore Aline.

Emilie constate que ce sont « souvent des femmes qui interviennent » et que « certains hommes ont maintenant peur d’intervenir pour éviter un coup de couteau ».


De la drague « lourde » aux attouchements

Emilie explique que son quotidien varie de la drague lourde, avec des hommes qui insistent pour avoir son numéro de téléphone à des attouchements sexuels – ou des tentatives. 

Pour Marie, 21 ans, nouvellement arrivée à Lyon depuis quatre mois pour ses études d’ingénieure, le comportement des hommes est bien différent si elle est seule ou accompagnée de son petit ami. « Quand je suis seule, je me fais insulter de sale pute, on me dit ‘t’es bonne’… ».


« J’ai vite déchanté »

En s’installant à Lyon après un passage par Paris, Bordeaux ou Douai (Nord), la jeune femme est contente de trouver un appartement à Saxe-Gambetta, à deux pas du métro.

« J’étais enchantée par la localisation, au croisement des deux lignes de métro, à proximité de mon travail. Mais j’ai surtout vite déchanté, quand j’ai commencé à devoir passer quotidiennement par la Guillotière. Le matin, je n’avais aucun souci généralement. Mais le soir, systématiquement, je suis insultée ».


« Jamais sans ma lacrymogène »

Marie a, elle, opté pour une bombe lacrymogène, sans laquelle elle ne se déplace jamais.

Je ne lâche pas ma bombe lacrymogène, je l’ai toujours avec moi même au travail. C’est une habitude que je systématise à Lyon. Je sais que c’est illégal mais je ne la lâche jamais. Pour une fille, les policiers ne sont pas stupides et tolèrent ça.

Marie, 21 ans

Le sujet des tenues, elle y est aussi confrontée même si elle continue de mettre des jupes. « Je sais que c’est un risque supplémentaire… Une fois dans le métro, j’avais une jupe arrivant mi-cuisse, des bottines en cuir et un haut imitation fourrure, un homme a lourdement insisté, je ne la mettrai plus dans le secteur de Saxe… », confie-t-elle.

Ces trois Lyonnaises doivent désormais vivre au quotidien avec le harcèlement de rue, qu’elles estiment profondément implanté à Lyon.

Comme elles, huit femmes sur dix affirment connaître cette situation en France. Selon un sondage réalisé par la Fédération nationale des usagers des transports en commun, ce chiffre grimpe à 87% dans les transports.

actu.fr/auvergne-rhone-alpes/lyon 

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