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Avant, Nanterre, c’était la ville de sainte Geneviève. La bergère qui repoussa Attila et ses hordes barbares.
La sainte patronne « des gendarmes français, gardiens de l'ordre public », dépositaires de la violence légitime, cet autre nom de la légitime défense de la majorité silencieuse. Parce qu’un État n’en est plus un quand il est faible avec les forts, et intraitables avec les innocents. Parce qu’un État n’est plus un État quand il laisse hors de contrôle des enclaves hors la loi. Parce qu’un État n’est plus un État quand il laisse se creuser un fossé entre la police et la justice, au nom d’une impunité endémique. C’était cela l’État régalien au temps de sainte Geneviève et de saint Louis son voisin des Yvelines.
Mais ce n’est plus cela Nanterre.
Nanterre, c’est un « jeune » de 17 ans, au volant d’une Mercedes,
engagée sur une voie de bus et refusant d’obtempérer au contrôle de la
police.
C’est la mort par balle du jeune homme dans un geste du policier que seule l’enquête permettra de qualifier.
C’est la vidéo qui embrase les réseaux sociaux puis les banlieues, sans
discernement, relayés par cette gauche morale d’habitude si attentive au
temps du deuil et à la présomption d’innocence.
C’est le concert de réactions, comme autant de verdicts déjà prononcés :
l’émotion du président de la République (n’est pas Saint Louis qui
veut) ; « l’appel au calme » de M. Véran (n’est pas sainte
Geneviève qui veut). La machine militante étonnement réactive et
parfaitement huilée : un avocat de la famille déjà sur les plateaux TV,
la réaction de la mère relayée par Assa Traoré,
et l’inénarrable Mélenchon pointant les violences policières au côté de
son utile électorat qu’il a substitué aux ouvriers depuis longtemps
abandonnés. Ajoutons la marche blanche et les mots sirupeux des
personnalités préférées des Français, intouchables depuis leurs palais
dorés : Omar Sy, Mbappé, pleurant leur « mal à la France » et « le petit ange parti trop tôt ».
C’est aujourd’hui cela Nanterre. Comme un pays qui a basculé, un État de droit dépassé, des forces de l’ordre épuisées.
Il y aura peut-être ce soir de nouvelles échauffourées au Val Fourré. De nouvelles nuits de violences. De nouvelles voitures brûlées. La consigne sera donnée : laisser s’exprimer la colère, si légitime et éviter de nouveaux drames. Nettoyer demain et après demain les dégâts occasionnés. Refaire à grands frais les abris bus, mairies annexes et stades urbains des habitants des banlieues si mal traités. Et si d’aventure un policier ou un pompier devait souffrir ou même mourir, si par mégarde le nom, l’adresse, la famille du policier, largement diffusés sur les réseaux organisés, devaient conduire à une expédition punitive de la part des « groupes de jeunes » déterminés, il n’y aura pas de marche blanche, pas de tweets émus, et seulement nos yeux pour pleurer.
Comme au temps de sainte Geneviève, il faudrait que la peur change de camp. Mais en fermant leurs volets, en alternant les tours de garde auprès de leur voiture garée au bas de l’immeuble, en tâchant de garder hors des mouvements de foule leurs adolescents surmotivés, les habitants sans histoire de Nanterre sauront bien que ce soir, la peur est encore loin d’avoir changé de camp.
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