Osons le dire : quel enfant, quel adulte n’a-t-il pas rêvé, un jour, à des grandes vacances d’automne, d’hiver ou de printemps ?
Car ces trois saisons discriminées ont des charmes et des mystères que de vraies grandes vacances permettraient d’éprouver intensément.
Avec ce troisième confinement, de trois semaines pour les écoles et quatre pour les collèges et lycées, ce rêve inavouable est devenu réalité. Merci, Jean Castex. Mieux : l’événement exceptionnel que fut le premier confinement printanier, l’an dernier, se répète, enlevant à celui-ci ce qu’il y avait pu avoir de déstabilisant, voire de traumatisant pour certains. Merci, Emmanuel Macron.
Et puis, nous sommes rodés, les élèves aussi : les plates-formes numériques, les ENT, les Pronote, Pearltrees, Zoom et autres Moodle n’ont plus aucun secret pour nous. Vendredi soir, c’était donc de joyeux « Bonnes vacances, Monsieur » et, après un franc éclat de rire : « Euh, non, bon confinement ! » La plupart de nos élèves sont bien contents : ceux qui n’aiment pas l’école, bien sûr ; ceux qui l’aiment, mais pas comme elle est, avec son lot de harcèlement, de bousculades, de bruit, de pertes de temps, et qui seront heureux de travailler loin de tout ça. Certes, nous savons bien qu’elle manquera à certains et que cette année à trous ne sera pas bonne pour le niveau général, quoi qu’en disent, en juillet, les nouveaux résultats historiques des examens… Voilà pour le versant « école buissonnière ». Ou numérique.
Mais il y a aussi une vision poétique et spirituelle des choses : vivre au rythme de la nature printanière de son jardin, vivre le temps de Pâques sans la pression des impératifs ordinaires. Après tout, Pâques, n’est-ce pas aussi l’inhabituel, l’inouï de la Résurrection devenant réalité, le Christ apparaissant, se montrant, là, et là, et encore là ?
Et puis, on peut aussi, au bout d’un an de cette expérience inédite, en tirer un bilan plus politique. Nous avons donc assisté – et consenti – à des restrictions de nos libertés jamais vues depuis l’Occupation. Au nom d’une pandémie certes mondiale – c’est sa définition – mais, pour l’instant, sans commune mesure avec les épidémies tragiques du passé, de la peste d’Athènes à la grippe espagnole. Nous y avons unanimement consenti, par obligation ou responsabilité, essentiellement contraints ou convaincus par l’argument humanitaire et altruiste : ralentir la contagion, sauver des vies, aider un système de santé sous-dimensionné pour gérer l’afflux de malades.
Il n’y a rien de complotiste à penser que cette expérience doit être d’ores et déjà analysée de près par les stratèges de tous ordres et les experts en gestion de crise. Par tous ceux, aussi, qui aspirent à gouverner et sont donc censés anticiper les crises du monde d’après. Ils doivent en apprendre beaucoup sur le seuil d’acceptabilité – comme on dit – des mesures imposées, sur les motifs avancés par l’exécutif pour convaincre.
Allons droit au but : sur les questions d’insécurité, de terrorisme, d’émeutes dans les banlieues, il faudra donc réunir deux conditions pour imposer des mesures d’exception acceptables : primo, que les gens aient peur pour leur vie ou celle de leurs proches (car cette épidémie a bien révélé que nous étions très nombreux à avoir très peur d’attraper ce virus, somme toute, peu létal) ; deuzio que les contraintes soient justifiées aux motifs de sauver des vies et de faciliter le travail de ceux qui se dévoueront pour juguler la crise – policiers, gendarmes, militaires.
Tout ça pour dire que l’exceptionnel devenu habituel risque de survivre au Covid-19. Et ce sera indispensable. Alors, oui, merci Emmanuel Macron pour ces répétitions générales.
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