14 avril 2020
Christian Prud’homme est infirmier
anesthésiste et secrétaire général FO à l’hôpital de Hautepierre à
Strasbourg – un soignant engagé à améliorer les conditions de travail de
ses collègues.
Interrogé par France3-région, il témoigne : « Je suis devenu militant quand j’ai vu les conditions de travail de mes collègues. Les inégalités criantes, les problèmes de sécurité. Moi, j’ai toujours été révolté par l’injustice. Je voulais protéger mes collègues et l’hôpital public. Ne serait-ce que pour conserver nos acquis. Une lutte de tous les jours. »
" On ne veut pas des mercis on veut des pardons". Infirmier à Strasbourg et délégué FO, Christian Prud'homme raconte.https://t.co/CPMKP4nh3e#CORONAVIRUSENFRANCE #Societe #colère pic.twitter.com/oJ0qsz93Pm— France 3 Alsace (@F3Alsace) April 12, 2020
Avec son engagement dans cette lutte, il avait dû quitter ses fonctions d’infirmier anesthésiste, il y a trois ans, « Je ne pouvais plus tout faire ».
Mais depuis le 15 mars, il a repris ses fonctions d’infirmiers pour aider ses collègues à faire face au coronavirus de Wuhan.
Il explique : « Je me suis porté volontaire quand j’ai
vu qu’à partir du 11 mars, le nombre de malades à Strasbourg doublait
tous les quatre jours. Je me suis dit que ça allait être très compliqué.
Déjà en janvier j’avais tiré la sonnette d’alarme, j’étais inquiet sur
les capacités de l’hôpital. J’étais juste réaliste. Je ne pouvais pas ne
pas y aller. »
« Il y a énormément de boulot. On doit aller au front, c’est
évident, mais pas à n’importe quelles conditions (…) Tout le monde est
sur le pont, tous les jours, toutes les semaines. C’est inimaginable le
travail fourni en ce moment », explique-t-il.
Pour lui, si l’épidémie cause autant de difficultés et de dégâts,
c’est avant tout car le système est malade.
En effet, pour rattraper des
déficits de plusieurs millions d’euros, les hôpitaux ont sans cesse
réduit le nombre de lits et de salariés : « Maintenant, on le paie. »
Il poursuit : « L’ennemi ici, c’est l’État. Exécuteur d’une
logique marchande implacable (…) qui vise à réduire ou à éliminer toutes
les activités non rentables d’une entreprise. Depuis la T2A, la
tarification à l’activité, à l’acte, on a vu nos services décliner. Tout
est compté: en terme de matériel, de jours. Pour une appendicite, c’est
deux jours. Pas un de plus. C’est du calibrage. D’autant que
l’enveloppe allouée aux hôpitaux est insuffisante. Même avec une
augmentation de 2,3% l’année dernière, on a commencé en janvier en étant
dans le rouge. »
[🧐 #LeSaviezVous ?] 28e/32 : c'est la place de la 🇫🇷 dans le classement de l'OCDE au regard de la rémunération des infirmier-e-s. Leur salaire moyen est inférieur au salaire médian 🇫🇷.— Oxfam France (@oxfamfrance) March 24, 2020
Les remercier commence par bien les rémunérer. #Covid_19fr
➡ https://t.co/4n6l29hYsa pic.twitter.com/uWNF6ykOAB
Pour l’heure, il faut s’occuper du virus, mais l’infirmier anesthésiste reste lucide pour la suite : « Ce
qui m’agace le plus c’est l’attitude du gouvernement. Leurs mercis à
tout-va. Ils doivent nous dire pardon, pas merci. Pardon pour avoir fait
la sourde oreille ou quasi. Trop longtemps. (…) Ils nous ont snobés,
dénigrés malgré les démissions, les droits d’alerte, la détresse.
Pendant des années. Ils ne peuvent pas dire qu’ils ne savaient pas. »
Il poursuit : « A chaque fois, quand il y a des événements
exceptionnels comme l’accident du TGV, ils débarquent, nous félicitent
pour notre travail et… rien. Ça fait depuis novembre 2018 que les
urgences sont en grève. Y’en a marre, on veut être écoutés. Si on fait
des grèves, si on s’agite c’est pas pour rien merde. »
« Il faudra trancher: soit un vrai service public de qualité,
soit un modèle à l’américaine, facturé. Pas les deux. C’est un choix de
société. Tout est question de budget, c’est simple. Il faut le calculer
en fonction des maladies, non l’inverse. Il faut davantage de personnel,
revaloriser les salaires », explique-t-il.
En plus de la détresse dû aux difficultés de travail, Christian indique que « les
salariés des hôpitaux publics ont perdu 18% de leur pouvoir d’achat. Le
point d’indice est gelé. Nous, on demande une revalorisation de 20% de
tous les salaires, moi perso, j’irais jusqu’à 25%. On y réfléchit »,
conclut-il.
Il faudra alors revoir toutes les dépenses inutiles dans la
politique de dépenses de l’État pour rendre ça possible.
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