Une
bonne partie du gouvernement est mise en cause devant la Cour de
Justice de la République.
Ces plaintes, qui visent Edouard Philippe, Olivier Véran (et Agnès Buzyn, auparavant en charge de la Santé) ou encore Christophe Castaner, Nicole Belloubet ou Muriel Pénicaud, vont d’abord passer par le filtre de la Commission des requêtes.
Les avocats à l’origine de ces actions sont décidés à faire feu de tout bois.
Le scandale du sang contaminé commence à hanter les esprits.
Ces plaintes, qui visent Edouard Philippe, Olivier Véran (et Agnès Buzyn, auparavant en charge de la Santé) ou encore Christophe Castaner, Nicole Belloubet ou Muriel Pénicaud, vont d’abord passer par le filtre de la Commission des requêtes.
Les avocats à l’origine de ces actions sont décidés à faire feu de tout bois.
Le scandale du sang contaminé commence à hanter les esprits.
« La haute administration et, à sa tête,
les ministres sont tétanisés. Il y a les erreurs commises avant la
crise, l’impréparation, la mauvaise appréciation du “tsunami”, les
décisions bancales aujourd’hui et, bientôt, des choix à haut risque pour
le déconfinement.
Rares sont ceux qui osent prendre une décision et l’assumer ».
Le jugement, émanant d’un haut fonctionnaire ayant servi l’exécutif sous une autre majorité, force le trait mais repose sur un fond de vérité.
Le jugement, émanant d’un haut fonctionnaire ayant servi l’exécutif sous une autre majorité, force le trait mais repose sur un fond de vérité.
Au fil des jours, même si l’urgence absorbe encore toutes les énergies, le spectre du scandale du sang contaminé commence à hanter les esprits.
« L’histoire n’est pas finie d’être écrite. Ce n’est vraiment pas le moment des plaintes. L’autorité judiciaire ne doit pas se substituer à la décision politique », veut pourtant croire la présidente de la commission des lois à l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet.
Au Sénat mercredi, Stéphane Ravier (RN) a attaqué d’emblée : « Pensez-vous, Monsieur le Premier ministre, que vos mensonges successifs relèvent de la Cour de Justice de la République ? »
S’attirant cette réplique foudroyante du ministre de la Santé, Olivier Véran : « Pensez-vous demander ma démission [...] comme Mme Marine Le Pen avait demandé la démission de Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé, parce qu’elle avait commandé, je cite “trop de masques”? »
Vingt-huit plaintes attendent déjà des membres du gouvernement devant la Cour de Justice de la République (CJR). Edouard Philippe, Olivier Véran (et Agnès Buzyn qui l’a précédé), Nicole Belloubet, Christophe Castaner, Laurent Nunez, Muriel Pénicaud, Jean-Yves Le Drian, Florence Parly… : la magistrate chargée de tenir la liste à jour l’allonge quotidiennement avant de la transmettre à la commission des requêtes de la CJR qui joue le rôle de filtre.
Une étape qui n’effraie pas des avocats aux motivations variées et à l’imagination fertile.
L’un d’eux, Me Fabrice Di Vizio, énumère : « Je vais d’abord saisir le Conseil d’Etat sur la chloroquine en m’appuyant sur les données médicales internationales. Et, en cas de rejet, j’irai devant la CJR contre Olivier Véran, aujourd’hui le plus épargné. Pour “mise en danger de la vie d’autrui” ».
Entre-temps, l’avocat, mandaté par un collectif de 600 médecins et soignants constitué au gré de « discussions sur les forums et sur Facebook », aura, assure-t-il, « saisi le Comité des droits de l’homme de l’ONU » après avoir mandaté un huissier pour constater « l’absence de bons de commande de masques » au ministère de la Santé. De 2006 à 2007, Fabrice Di Vizio fut secrétaire national du Parti chrétien démocrate.
Homicide involontaire. Son confrère Arié Alimi, qui au printemps dernier portait la cause de Gilets jaunes devant les tribunaux, a cette fois, au nom du Collectif Inter Urgences, déposé plainte contre X devant le parquet de Paris pour « homicides involontaires », « violences involontaires », « mise en danger de la vie d’autrui » et « abstention de prendre des mesures de nature à éviter un sinistre ». Toute la panoplie des infractions dites « non intentionnelles » susceptibles, reconnaît l’avocat, de « faire pression sur le gouvernement pour obtenir des masques ».
Lui non plus ne compte pas s’arrêter aux frontières hexagonales et promet de se tourner, « au sein d’un réseau européen formé notamment avec les Italiens » vers « le rapporteur spécial de l’ONU et le haut-commissaire du Conseil de l’Europe pour “traitement inhumain et dégradant et droit à la vie” ».
Devant la Cour de Justice de la République attendent encore les plaintes de détenus et de la CGT Pénitentiaire contre le Premier ministre et la garde des Sceaux Nicole Belloubet.
Ou celles émanant d’un syndicat de policiers minoritaires, « Vigi », qui entend mettre en cause la responsabilité d’Edouard Philippe, de Christophe Castaner et de Laurent Nunez.
Tout comme les réclamations de citoyens convaincus que les municipales n’auraient jamais dû avoir lieu.
Ou celle, récente de la Fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services s’en prenant à Muriel Pénicaud.
Sans compter les griefs de simples particuliers, malades, tel ce Francilien de 46 ans, qui a confié à Me Nabil Boudi, connu des médias pour sa défense de djihadistes français emprisonnés en Irak, le soin de pointer le rôle d’Agnès Buzyn parce qu’elle « avait conscience de la gravité de la situation ».
Les propos de l’ancien ministre de la Santé, rapportés par Le Monde, ont donné du grain à moudre aux avocats décidés à épingler l’exécutif.
« On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade [la campagne des municipales]. La dernière semaine a été un cauchemar. J’avais peur à chaque meeting », lâche la candidate LREM à Paris.
Qui enfonce le clou : « J’ai alerté le directeur général de la santé. Le 11 janvier, j’ai envoyé un message au Président sur la situation. Le 30 janvier, j’ai averti Edouard Philippe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir. »
Autant de précisions et, donc, de munitions pour ceux qui voudront soutenir la thèse d’un « silence d’Etat », voire d’un complot.
« Le halo de ces déclarations entourera désormais cette crise. Elles alimenteront trois quarts des procédures… », anticipe Me Jean-Pierre Mignard, proche de François Hollande, mais écouté de la macronie.
« En se tirant une balle dans le pied, Agnès Buzyn a aussi visé son propre camp », renchérit son confrère Patrick Maisonneuve qui défendit Edmond Hervé, secrétaire d’Etat à la Santé, lors du procès du sang contaminé.
Pour autant, les deux pénalistes, comme nombre de leurs confrères expérimentés, restent sceptiques sur ces plaintes devant la CJR.
« Les investigations seront longues. Elles remonteront aux sources de l’épidémie, pronostique Jean-Pierre Mignard. La défense arguera que les informations transmises par la Chine étaient insuffisantes, voire faussées. Elle rappellera que l’OMS a, elle aussi, divergé, que l’opinion scientifique et médicale était divisée. Un tribunal pourra-t-il arbitrer une dispute scientifique, j’en doute. On s’interrogera encore, les autorités auraient-elles dû battre le tocsin plus tôt ? Cela aurait-il permis de gagner un mois et demi ? De reconstituer une partie du stock de masques ? Dans ces affaires, beaucoup se joue sur la perte de chances et la question de savoir si une plus grande réactivité de l’Etat aurait permis de l’éviter ».
C’est ainsi que, dans le dossier du sang contaminé, Laurent Fabius plaida qu’« en fonction des données à sa disposition, il avait agi dans les meilleurs délais », rappelle Patrick Maisonneuve.
Municipales.
Le maintien du premier tour des élections municipales sera aussi décortiqué.
Et son corollaire : les pouvoirs publics ont-ils bien apprécié le principe de précaution et tout entrepris pour le mettre en œuvre ?
« Je vois bien toutes ces questions émerger dans le débat judiciaire mais de là à fonder une responsabilité pénale... », s’interroge Me Mignard, qui conclut : « L’exécutif a l’obligation de protéger la population. Pas de chasser tous les virus du monde ! »
Dans quelques années, la montagne accouchera peut-être d’une souris.
D’ici là, des cabinets d’avocats auront surfé sur l’angoisse et le mécontentement. Me Arié Alimi parle, lui, de « sentiment de défaite démocratique et [de] l’apparition de la violence dans les rapports sociaux et politiques », dans un article pour Dalloz Actualités.
Spécialiste des préjudices corporels, Me Xavier Autain rencontre souvent des clients qui rêvent du jackpot judiciaire.
« Ils s’imaginent être aux Etats-Unis.
Quand vous leur expliquez qu’ils vont commencer par dépenser 10 000 à 15 000 euros dans une procédure qui a peu de chances d’aboutir, ils finissent par hésiter », sourit-il.
Promettant « un dépôt de plainte facilité », la plateforme « plaintecovid », initiée par l’ex-auteur des Guignols Bruno Gaccio, affiche 140 000 téléchargements.
D’autres cabinets verront frapper à leurs portes des « chevaliers blancs » et conspirationnistes de tous bords, persuadés que le gouvernement a menti sur toute la ligne.
« Mais les politiques qui voudront mettre en cause le gouvernement préféreront le faire au sein de commissions d’enquête. C’est davantage leur terrain que le judiciaire. Et ce débat démocratique, indispensable, se nourrira aussi des investigations journalistiques », anticipe Jean-Pierre Mignard.
Si la Cour de Justice de la République était un jour appelée à statuer, l’histoire prendrait un tour ironique.
Emmanuel Macron avait, dès 2017, assuré vouloir en finir avec cette juridiction d’exception.
Une promesse réitérée en 2018 avec force : « Notre pays a besoin d’un exécutif audacieux et non d’une génération de prudents ou d’empêchés qui, dans l’exercice de leurs fonctions, seraient freinés sans cesse par la perspective de procédures pénales ».
lopinion
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