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mercredi 6 février 2019

Emmanuel Macron dans les cités : « Nous sommes un pays qui a toujours été fait de migrations ! »

 
 


Il y a deux Emmanuel Macron. Celui qui théorise la « verticalité du pouvoir », évoquée durant sa campagne présidentielle, à l’occasion d’un entretien accordé au 1, revue dirigée par Éric Fottorino, ancien du Monde, où il remet à l’honneur la place laissée vide par la décapitation de Louis XVI.


Et puis il y a l’autre Emmanuel Macron, celui qui se rend, le 4 février 2019, à Évry, parler aux maires de banlieue.
Et qui, devant des édiles soumis aux problèmes qu’on sait, affirme : « Nous sommes dans un monde de migrations. Je ne crois pas du tout aux gens qui font des murs, ça ne marche pas ! »
Ça, on le saura peut-être une fois qu’on aura laissé sa chance au concept.
Il faut toujours laisser du temps au temps.
Ensuite : « Aujourd’hui, ça bouscule notre société, le phénomène migratoire ! » Vraiment ? Puis : « Nous sommes un pays qui a toujours été fait de migrations. On a toujours eu entre 10 % et 12 % de personnes issues de l’immigration. Et à chaque fois, il y a eu les mêmes peurs. Les peurs qu’on a aujourd’hui avec les Subsahariens sont les mêmes qu’on avait à l’égard des Italiens ou des Polonais, il y a un demi-siècle, avec des violences absolument terribles et qu’on a progressivement réussi à intégrer. »
Pour les Polonais et les Italiens, c’est manifestement chose faite.
Pour les autres, les « Subsahariens », cela paraît être un peu moins bien parti, non ?
Sans compter sur le fait que les mangeurs de risotto ne seront pas forcément ravis d’être amalgamés aux amateurs de kebab.
En l’intervalle, d’autres prétendent que cette immigration serait un bienfait économique.
Certes. Mais si tel était le cas, pourquoi ne pas davantage ouvrir les vannes ?
Si ça rapporte, pourquoi se priver ?
Encore qu’à propos de gros sous, le grand absent de la récente tournée présidentielle puisse évidemment demeurer Jean-François Borloo.
En 2018, ce dernier présentait à Emmanuel Macron un énième grand plan pour les « banlieues ».
Le gouffre, coûtant comme toujours « un pognon de dingue », fut sèchement recalé par l’Élysée. Mais il s’agissait peut-être encore du Macron première manière, le jupitérien vertical, auquel Borloo avait répliqué : « Mon sentiment, c’est qu’on est en train de remplacer le vieux monde des solidarités par le jeune monde des abandons de ceux qui ont besoin de la solidarité. »
Ce disant, Borloo ne parlerait-il pas le Macron dans le texte, tel ces gens du « vieux monde », persistant à estimer que chaque problème de société peut se résoudre par de seules subventions ? Tout en voulant nous faire croire que l’insécurité civilisationnelle puisse tout aussi être soluble dans de simples lignes budgétaires, juste histoire d’être à la hauteur de cette « bonne gouvernance » si chère d’un Alain Minc assurant, naguère, qu’Emmanuel Macron demeurait un « pur produit du système », « système » qu’il entendait combattre par ailleurs ?
Ainsi, il y a des choses que l’argent ne saurait acheter, quoi qu’en pense un Jean-Louis Borloo, même si tombé en disgrâce.
On l’a constaté, de manière conjoncturelle, lors des émeutes des cités.
On le constate plus encore, de façon structurelle, dans cette autre France, habitée par d’autres oubliés du système.
Le premier Emmanuel Macron, qui voulait redonner le lustre nécessaire à sa fonction, a pu faire croire qu’il était apte à relever un tel défi.
Le second, qui n’en finit plus de dégringoler de son piédestal, paraît autrement moins bien armé en ces temps de crise.
Devant un « nouveau monde » à bout de souffle, « l’ancien monde » aurait-il encore de l’avenir ?
On ne saurait raisonnablement écarter une telle hypothèse, tant ce même système, connu pour bien se défendre et mal gouverner, s’agite de plus en plus et en tous sens, ces temps derniers.
Tel un canard sans tête ?

Nicolas Gauthier

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