La plupart des médias qui ont relaté le rapport du Sénat sur l’affaire qui a impliqué le conseiller de l’Élysée ont laissé de côté le passage lié à l’ascension fulgurante de ce dernier dans la gendarmerie.
Pourtant, en y regardant de près, cet extrait est emblématique des accointances qu’entretenait Benalla avec Emmanuel Macron.
Le but de la réserve gendarmerie est de renforcer l’action quotidienne de ses unités.
Elle se subdivise entre réservistes de « sécurité publique » (environ 30.000) et un nombre infime de réservistes « spécialistes » recrutés pour exercer des fonctions déterminées correspondant à une expérience civile de haut niveau.
Le grade qui leur est affecté demeure, alors, temporaire et ne leur donne droit à aucune prérogative ni de commandement ni de port d’insignes ou de tenue.
Alexandre Benalla a intégré la réserve opérationnelle « de sécurité publique » à l’issue de sa préparation militaire gendarmerie, dans le département de l’Eure.
Il y a servi six ans comme gendarme adjoint pendant 194 jours, puis a été finalement promu brigadier.
Hasard heureux, son chef de peloton était le sous-lieutenant puis lieutenant Sébastien Lecornu, actuel ministre chargé des Collectivités territoriales et animateur du grand débat national.
L’ex-chargé de mission a été radié sur sa demande pour intégrer, sous le statut de spécialiste, la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale.
Son intégration s’est faite le 20 octobre 2017 au grade de lieutenant-colonel à l’initiative du directeur général de la gendarmerie nationale, alors que les services instructeurs avaient envisagé le grade de commandant.
Si son changement de grade ne constitue pas, juridiquement, un « avancement », il est ahurissant de constater qu’il est passé directement de brigadier (caporal) à officier supérieur, lieutenant-colonel. Par le plus grand des hasards, bénéficiant du même statut, le lieutenant Lecornu, en devenant ministre, est devenu colonel dans la réserve au titre, aussi, de spécialiste.
Pourquoi l’ancien chargé de mission de l’Élysée a-t-il fait l’objet d’un tel avancement ?
Pour le général Lizurey, directeur de la gendarmerie, Alexandre Benalla a été recruté pour « son expertise dans la sécurité des installations et des personnes ».
Mais devant la commission, il a dû admettre qu’un tel recrutement se justifiait avant tout pour des raisons d’« affichage ».
Il était ainsi plus facile de faire accepter un jeune chargé de mission de l’Élysée de 27 ans à la même table que des haut gradés qu’il allait être amené à fréquenter.
Naturellement, les rapporteurs n’ont pas été convaincus de la pertinence de cette nomination au regard de sa jeunesse, de la nature et du niveau de ses titres universitaires et, surtout, de sa très courte expérience professionnelle.
Surtout que les informations transmises par la gendarmerie montraient que les 87 personnes actuellement sous contrat avaient toutes des diplômes universitaires de haut niveau (juristes, psychologues, experts en sécurité, en intelligence économique, en hautes technologies…).
D’ailleurs, le conseiller jupitérien a concédé lui-même n’avoir « quasiment jamais participé aux travaux du groupe de réflexion pour lesquels il était si important de le doter du grade de lieutenant-colonel ».
On comprend aisément pourquoi cette promotion express a pu irriter l’ensemble des personnels de la gendarmerie.
En conclusion, il paraît vraisemblable que ce grade faramineux voulu par l’intéressé ait pu être exigé par la « présidence », ce qui entraîne toujours la même question : pourquoi notre Président a-t-il plié aux exigences de celui qui n’était qu’un simple conseiller de l’Élysée ?
J.-P. Fabre Bernadac
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