En s’attaquant bille en tête dans son émission de C8 au sacro-saint audiovisuel public français, une vache sacrée qu’on n’a longtemps critiqué qu’à voix basse tant il nourrit de monde, Hanouna a posé le doigt là où ça fait mal.
Ce 17 janvier, Libération sous la plume de Jonathan Bouchet-Petersen enfile la robe d’avocat et vole au secours de notre cher monstre audiovisuel étatique.
Il faut dire que l’alerte est au rouge vif. Jamais, de mémoire médiatique, personne dans l’univers des médias n’avait attaqué aussi frontalement l’audiovisuel public dont les Français sont sommés depuis des décennies d’admettre qu’il est « indispensable », « précieux », « de qualité », forcément « de référence » et « neutre » bien-sûr. « Surtout neutre » ! Cet attribut de service public qui serait à la démocratie ce que le gland est au mocassin, un accessoire devenu essentiel, égraine comme un chapelet d’années en années ses atouts, le nombre de personne qu’il fait vivre hors de ses murs (producteurs, fournisseurs...), ses audiences et ses succès. Mais quand on parle de l’audience du service public, pas si brillante que cela dans le détail, il faut parler du coût de l’audience sans quoi l'argument n'a pas de sens. Or ce coût est démentiel. Il faut rappeler les 3,7 milliards d’euros de dotation de l’Etat, les quelque 15.000 salariés de France Télévisions, Radio France, RFI, Arte et autres chaines publiques. Des chiffres hors de comparaison avec les concurrents privés TF1 ou M6.
Hanouna, comme Marine Le Pen du reste, vous enverrait « privatiser tout ça », a-t-il lancé en "prime time".
Sacrilège. « On notera simplement, nuance avec raison Bouchet-Petersen, que le service public de l’audiovisuel, financé par un budget pluriannuel depuis la suppression de la redevance, coûte en France moins cher à chaque habitant que dans la plupart des pays d’Europe, notamment l’Allemagne, le Royaume-Uni et surtout la Suisse ». Indéniable. Mais ce budget représente tout de même à peu près celui des prisons en France. Par ailleurs, quitte à comparer, rappelons que la démocratie aux Etats-Unis de Biden se passe fort bien d’audiovisuel public : cela n'existe pas au pays de l'Oncle Sam quand la Corée du nord ou la Chine populaire en font un usage immodéré.Sur le fond, Bouchet-Pertersen a (encore !) raison : le groupe Bolloré est bel et bien dans le collimateur. Sa chaîne CNews donne des cauchemars à la gauche qui s’était habituée au confort d’un service public très très proche de ses idées et d’un privé qui ne mouftait pas. Une chaîne d’opposition ? Horreur ! CNews, en faisant entendre, parmi d'autres, des voix de droite, ulcère le petit monde heureux de gauchiser en rond. Comme par hasard, l’Arcom se mobilise, officiellement pour des raisons techniques, comme le respect des temps de parole politique. Mais CNews n’est pas seule à subir l’orage. C8, la chaîne d’Hanouna elle aussi propriété de Bolloré, a aussi subi les foudres du gendarme de l’audiovisuel comme jamais aucune chaîne jusqu’ici, jusqu’à l’interdiction de diffuser de la publicité dans l’émission d’Hanouna en 2017. Bolloré déplait, c'est peu de le dire. Libération fait entendre la petite musique selon laquelle les fréquences des chaînes du milliardaire breton, « prêtées » sous condition par l’Etat, pourraient être retirées ! Ce n’est jamais arrivé, même au temps où TF1 et M6 prenaient des largesses substantielles avec leur convention.
Tout cela risque de paraitre cousu de fil blanc aux électeurs de droite et aux téléspectateurs des chaînes Bolloré qui auront du mal à comprendre comment France Inter peut camper très à gauche avec l’argent du contribuable quand CNews et C8 développent leur politique éditoriale avec l’argent de la publicité… Ils se souviendront que le président de l’Arcom, successeur du CSA, est désormais nommé directement par… le président de la République Emmanuel Macron. Sur décision d'un certain... Emmanuel Macron, en 2019.
Un verrouillage à faire rêver la Corée du nord et la Chine populaire.
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