On peut comprendre l’angoisse de ceux qui entendent en boucle, sur certains réseaux, parler de l’effondrement économique qui nous guette. Cette perspective nourrit l’intranquillité générale (et donc favorise les transferts d’autorité vers le sommet de la société), surtout chez ceux qui se vivent comme les plus précaires ou les plus exposés aux coups de tabac économiques.
Je voulais tenter aujourd’hui de remettre un peu de lucidité et de clairvoyance dans les événements, à un moment où le gouvernement entame une discussion folklorique sur le budget 2023. Peu de Français ont compris que ce budget s’apprêtait à nourrir l’instabilité financière du moment. J’y reviendrai ce soir, dans un papier spécifique.
Les causes générales de l’effondrementCommençons par les causes générales de cet effondrement possible. Elles sont essentiellement liées à la sur-financiarisation de l’économie, et tout particulièrement de l’économie occidentale.
Pour aller vite, depuis les années 80 en Europe, les années 90 aux Etats-Unis, les banques peuvent utiliser l’argent des dépôts comme levier pour accorder des crédits et réaliser des opérations financières de plus en plus risquées et hors sol. Ce ver dans le fruit explique la crise de 2008.
Il se trouve que, depuis cette crise, la financiarisation n’a pas suivi la cure de désintoxication qu’elle aurait dû.
Les banques centrales ont déversé des sommes astronomiques sur les banques privées pour qu’elles fassent repartir l’économie, et des “actifs toxiques” continuent à circuler. Plus grave, la Banque Centrale Européenne est devenue prêteuse en dernier ressort dans un certain nombre de cas.
Bref, il y a beaucoup trop d’argent en circulation, dont la valeur est illusoire : la bulle peut éclater à tout moment, et cet éclatement va faire très mal.
Les causes actuelles de l’effondrementTrois éléments pourraient expliquer que l’effondrement arrive maintenant.
Premier élément : la guerre bien entendu, et tout particulièrement la perspective d’une extension du conflit ukrainien à l’ensemble de la planète. Il s’agit là d’un risque majeur, exceptionnel, d’instabilité, qui peut pousser les marchés à jouer “la baisse” et à entraîner toute l’économie dans une dégringolade rapide.
Deuxième élément : la stratégie de Great Reset, consistant à accélérer la “transition écologique”, donc à mettre en sourdine les anciennes filières de production comme l’automobile thermique, pour faire émerger de nouveaux marchés, comme l’automobile électrique. Cette stratégie, que j’appelle l’agenda du chaos, suppose que de nombreux chocs soient administrés aux sociétés occidentales pour changer leur mode de vie en accéléré, avec les conséquences économiques lourdes qu’on connaîtra.
Troisième élément : l’excès de dettes publiques, financées grâce à la planche à billets, qui produit une inflation massive. Ce Ponzi des budgets étatiques conduit inexorablement à un “jubilé des dettes”, qui sera probablement pratiqué grâce à la mise en service des monnaies numériques. La date de 2024 paraît plausible pour cette échéance.
La question est de savoir si, pour justifier cette échéance, les partisans du Great Reset vont faciliter l’éclatement de la bulle, ou s’ils n’oseront pas aller jusque-là. Il est plausible qu’un intense débat sévisse aujourd’hui.
Comment l’étincelle peut enflammer la poudreLe problème de l’histoire est qu’elle échappe toujours à ceux qui croient la manipuler, et nous connaissons depuis 2008 le mode de transmission rapide de l’incendie.
Le cataclysme commence par une étincelle locale : la mise en difficulté d’un établissement bancaire qui occupe une place significative sur les marchés financiers. Ce pourrait par exemple être le Crédit Suisse, qui a dévissé de 12% vendredi dernier après des rumeurs sur une augmentation imminente de capital. Par son poids, le Crédit Suisse est une banque systémique : sa chute entraînerait rapidement toute la finance mondiale avec lui.
Deuxième étape : les marchés, ébranlés par la chute d’une banque comme le Crédit Suisse, anticipe des défauts de paiement étatiques. Pour un pays comme la France, cela signifie d’abord une hausse immédiate des taux auxquels le pays emprunte, étouffant chaque jour un peu plus la capacité à financer les dépenses publiques.
Troisième étape : des dépenses courantes de l’Etat ne peuvent plus être couvertes, faute de prêts de trésorerie par les banques. Ce phénomène avait failli se produire en 2009 avec la CNAV : faute de couverture dite “intraday”, la Caisse de Sécurité Sociale s’était vu refuser le prêt de trésorerie nécessaire pour couvrir les versements mensuels pendant quelques heures, avant que l’Etat n’apporte sa garantie au paiement… ce qu’il ne pourra faire éternellement.
Comment l’explosion vientCommence alors la dégringolade en flèche, car l’Etat (et la sécurité sociale) ne peuvent plus se financer sur les marchés pour payer leurs engagements. C’est la banqueroute, et l’effondrement total qui apparaît aux yeux du grand public : les allocations diverses que l’Etat a inventées pour acheter les votes citoyens (au nom de la “protection” et de la “solidarité”) ne sont plus versées. Des millions de foyers sont soudain privés de ressources, à commencer par nos retraités…
Dans cette hypothèse, le choc social serait terrible.
Bien entendu, des mesures d’urgence seraient mises en oeuvre, reposant sur deux principes fondamentaux. D’une part, la BCE imprimerait, d’une façon ou d’une autre, les billets nécessaires pour sauver la face, ce qui produirait une hyper-inflation socialement difficile à accepter dans la durée. D’autre part, la BCE imposerait des purges drastiques dans nos dépenses publiques, qui ne feront qu’accroître la révolte d’un pays dépendant des allocations.
Le sens général de l’histoireSur le fond, pour bien comprendre le phénomène qui pourrait se produire, une chose est à retenir : on ne peut vivre éternellement au-dessus de ses moyens.
Depuis une cinquantaine d’années, la France laisse filer ses déficits, et ne met à profit aucune période d’accalmie pour assainir ses comptes. La dérive est devenue telle que l’emprunt permanent est indispensable pour financer les dépenses publiques, alors même que la pression fiscale est extrêmement élevée.
Une remise à plat, telle que celle qui fut pratiquée par le général De Gaulle en 1959 avec le plan Rueff est inévitable.
Le pire n’est jamais sûrCe scénario est plausible, mais il n’est pas certain. Depuis 2008, l’Union Européenne a multiplié les subterfuges pour protéger les institutions financières les plus fragiles, et les Etats les plus déficitaires. Rien n’exclut qu’un nouveau cautère ne permette d’apaiser provisoirement la jambe de bois.
Je produirai cet après-midi un article pour vous expliquer comment limiter les dégâts en cas de survenue de ce scénario. D’ici là, rappelez-vous les excellents papiers de Dimitri de Vismes et les dossiers de Florent Machabert pour prendre les premières mesures d’urgence.
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