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samedi 20 juin 2020

Le Ségur de la santé : manipulation et gesticulations



Selon sa grande habitude, le gouvernement prétend s’attaquer à une problématique et la régler en camouflant son action réelle derrière un nuage de fumée fait d’annonces et de gesticulations.

Ainsi en est-il du Ségur de la santé (du nom de l’avenue où se situe l’une des entrées du ministère de la Santé) qui se tient en ce moment.
Première étape : la manipulation faite de désinformation et de tentative d’anesthésie des capacités de réflexion.
Le ministre de la Santé, pourtant lui-même médecin, se prête scandaleusement à cette tromperi
La lecture de son discours inaugural est, à ce point, édifiante.
Tout commence par quelques sirupeux propos expliquant ce que tout le monde sait déjà, à savoir que les soignants, qu’ils soient médecins ou personnels non médicaux, ont tout donné et sont allés au bout du bout de ce qu’ils pouvaient faire pour soigner la population au cours de la crise sanitaire Covid-19. Après ce rappel démagogique, le ministre explique que la gouvernance hospitalière était efficace, comme elle l’avait montré pendant la crise, et qu’il ne fallait donc surtout pas y toucher.
Ce que le ministre ne dit pas, soit par ignorance, soit par mensonge délibéré, c’est que si les choses ont bien fonctionné pendant la crise, c’est que le paradigme a été inversé : cette fois-ci, les médecins donnaient la direction et l’administration hospitalière (qui a d’ailleurs parfaitement joué son rôle et a été très aidante) donnait les moyens de remplir les missions.
Deuxième étape : la prise de contrôle.
La technique a été simple.
Elle a consisté d’une part à choisir un pilote acquis à la cause présidentielle et parfaitement rompu aux négociations en tous genres (l’ex-patronne de la CFDT Nicole Notat) et, d’autre part – en même temps, dirait l’auguste occupant du palais présidentiel -, en désorganisant délibérément les séances de travail.
Imaginez, en effet, que les responsables de chacun des piliers n’ont pas eu de feuille de route précise pendant plusieurs jours, que les innombrables participants n’ont, à chaque séance, qu’un temps moyen de parole de deux minutes pour s’exprimer, que les technocrates homozygotes chargés d’encadrer ce « chantier » rédigent eux-mêmes, sans relecture par les intéressés, une synthèse des dossiers présentés à chaque séance (synthèses censées être utilisées pour la rédaction des conclusions du Ségur).

En parallèle, les programmes sont régulièrement changés en dernière minute, typiquement comme la semaine dernière où le premier point-étape a été remplacé à la dernière minute par une séance de travail sur l’informatique hospitalière sur l’ordre de la fameuse pilote que nous évoquions plus haut. Comme par hasard, au moment où plusieurs des interlocuteurs avaient prévenu qu’ils quitteraient la table des négociations en fonction du tour pris par le chantier à ce point-étape.
Sur le terrain, rien n’a changé.
Ou plutôt si, quelque chose a changé.
Une fois le nuage de la crise Covid-19 dissipé, avec son cortège de flatteries, l’horizon qui s’ouvre devant nous est celui d’une situation encore plus critique qu’avant la pandémie.
Ainsi, l’ensemble du système de santé en général, et l’hôpital public en particulier, est-il cerné de toutes parts.
Les assiégés, soignants mais aussi usagers, sont et seront combatifs.
Nous ne pouvons pas accepter que la santé de l’ensemble de la population française soit ainsi compromise, sacrifiée sur l’autel technocratico-financier gouvernemental.
Il serait bon que la population ouvre les yeux et comprenne ce mouvement. Qu’elle comprenne qu’une fois de plus, comme pour la sécurité intérieure, comme pour l’éducation, comme pour la justice, comme pour la défense, le gouvernement poursuit sa logique financière dévastatrice.
Nous avons un idéal, celui-là même qui nous a conduits à choisir le métier que nous exerçons, nous consacrant à la santé de nos concitoyens.
D’aucuns diraient : « Vous êtes des purs. »
Que ceux qui rêveraient de confondre Ségur et Montségur ne se trompent pas….
Nous ne nous rendrons pas comme les « purs » de Montségur le firent le 16 mars 1244.

Et ce n’est pas Simon de Montfort qui siège à l’Élysée.

 Professeur Richard Nicollas

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