Les opérations coup de poing montées à Grenoble par une association qui se pare du nom d’Alliance citoyenne ont atteint leur objectif : faire parler d’elles et montrer la force de la communauté et la faiblesse de l’État-nation décadent que quelques « burkinis » dans une piscine grenobloise parviennent à inquiéter.
Ce non-événement ne mérite guère de discours : il s’agit d’un acte provocateur, qui crée du désordre et le fait d’une façon perverse, puisque le but poursuivi par un groupe qui se prétend « citoyen » est, justement, de casser l’unité de la Cité, de séparer ses membres et peut-être de préparer son remplacement.
Il ne faut donc pas s’interroger longuement sur les valeurs qui empêchent d’accepter la présence, dans les piscines, de maillots couvrant des pieds à la tête qui ont moins pour but de voiler les appas féminins que d’afficher une différence communautaire.
Il faut d’abord faire respecter l’ordre public, réfléchir sur les causes du phénomène et les supprimer si l’on veut éviter leurs effets.
Le Premier ministre, celui de la Justice et celui chargé de l’Égalité entre les sexes ont cru devoir évoquer ce clapotis dans un bassin.
C’est abaisser l’État, c’est montrer combien la République est devenue fragile.
Les règlements intérieurs des piscines interdisent les vêtements inappropriés pour des raisons d’hygiène, comme les bermudas pour les garçons, ou par pudeur comme les monokinis pour les filles. L’argument brandi de l’égalité homme-femme est particulièrement stupide.
D’abord, parce que les corps affichent des différences qui justifient des vêtements inégaux, le slip masculin ou le maillot une pièce féminin.
Ensuite, parce que, face à l’égalité, l’on pourra afficher la liberté de se vêtir comme on le souhaite. De même, la laïcité prouve une fois de plus sa nocivité : en prétendant lutter contre les débordements d’une religion conquérante, elle en vient à s’en prendre aux symboles de la religion qui, depuis bien plus d’un millénaire, a contribué à façonner notre culture.
C’est ainsi qu’un philosophe, Raphaël Enthoven, reprochait à la députée Valérie Boyer de regretter l’abandon, par les parlementaires, de l’amendement interdisant le port du voile par les mères accompagnatrices d’élèves tout en portant elle-même une croix en pendentif.
La laïcité, en imposant la neutralité, conduit au renoncement à son identité.
Or, une nation qui gomme son identité culturelle, qui offre une page blanche à des identités envahissantes, devient une proie trop facile pour celles-ci.
Les Suisses, en refusant l’érection de minarets, ont préservé l’identité de leurs paysages.
Ils n’ont pas brandi les notions faciles à retourner d’égalité ou de liberté.
Ils n’ont pas prétendu qu’il fallait raser les clochers puisqu’on ne voulait pas de minarets.
La croix s’inscrit dans notre culture, comme nos clochers, comme nos vêtements, comme notre alimentation, etc.
L’évolution des modes et des goûts ne doit pas conduire à la confusion entre liberté et laisser-aller. Chacun devrait se convaincre qu’un effort pour être plus rigoureux et digne dans une tenue et un comportement qui correspondent à notre culture sera une barrière plus solide face aux provocations communautaires qu’un relâchement généralisé.
C’est ainsi que le retour à l’uniforme à l’école est la meilleure parade aux vêtements confessionnels. Comment faire accepter à des parents musulmans un peu rigoureux que l’on puisse aller en classe avec des jeans troués de partout, mais que les fichus sur la tête y soient interdits ?
Le problème posé à Grenoble, et ailleurs depuis bien longtemps, n’est donc ni celui de l’égalité entre les sexes, ni celui de la liberté, ni celui de la laïcité, mais celui de l’identité.
Il n’y a pas de société stable sans une conscience collective, sans une pensée commune.
Plus on préservera celle-ci, plus on s’attachera à la restaurer et à la transmettre, plus la résistance aux empiétements communautaires sera forte, plus les désagréments de ne pas s’y soumettre seront insupportables, et plus l’assimilation des immigrés qui voudront devenir français sera facilitée.
À condition, bien sûr, que le flot n’en soit pas trop considérable, ce qui est le vrai fond de la question.
Christian Vanneste
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