La presse vient de confirmer ce que l'on pressentait. Pap Ndiaye ne scolarise pas ses enfants, Rose et Lucien, dans un établissement lambda, mais dans la très prestigieuse École alsacienne.
Peut-on lui faire grief de vouloir que ses enfants soient bien instruits ?
On lui pardonnerait bien des choses s'il pensait aussi aux autres enfants et mettait tout en œuvre pour qu'ils puissent recevoir dans leur école, quelle qu'elle soit, un enseignement digne de ce nom.
Il faut montrer patte blanche pour entrer à l'École alsacienne. Dans sa foire aux questions, elle reconnaît être « un établissement sélectif », puisqu'elle n'a, chaque année, que « 210 places à proposer aux 1.400 élèves qui veulent [y] entrer ». Les frais de scolarité ne sont pas donnés – une année revient à 3.288 €, sans compter les frais annexes – mais, après tout, c'est peu par rapport à d'autres écoles privées. Du reste, il existe un système de bourses conséquent et l'établissement s'est donné pour objectif prioritaire d'accroître la diversité sociale. Bref, bien loin d'être une école pour fils ou filles à papa, l'École alsacienne est un établissement protégé et performant pour élèves doués.
Laissons aux esprits curieux le soin de rechercher les noms de personnalités qui y ont fait leurs études ou y ont inscrit leurs héritiers : encore une fois, tant mieux pour elles et pour leurs rejetons ! Mais on ne peut ignorer les milliers, que dis-je, les centaines de milliers de familles qui n'ont pas cette possibilité et doivent se satisfaire de l'établissement fixé par la carte scolaire. Les Français les plus avertis ont généralement les moyens, par leurs relations, leur connaissance du système ou le recours à des établissements privés, de trouver chaussure au pied de leurs enfants : c'est aux autres, les plus nombreux, qu'il faut penser.
L'idéal de l'école républicaine devrait être de permettre à l'ensemble des élèves de s'instruire et de progresser, tout en donnant à chacun la possibilité de se dépasser, en fonction de ses efforts et de ses talents.
En acquérant des savoirs et des méthodes, l'élève apprend à penser par lui-même, à construire sa liberté et son avenir. Force est de constater que pour des raisons géographiques, sociologiques ou autres, c'est loin d'être le cas partout et que beaucoup d'enfants sont laissés pour compte. Au XXIe siècle, en France, il y a encore des Mozart qu'on assassine ! Si Pap Ndiaye voulait donner à tous les enfants, comme aux siens, un environnement scolaire favorable, c'est à ce chantier qu'il devrait se consacrer prioritairement.Certes, il serait naïf de croire qu'une « école de la réussite pour tous », sans exception, n'est pas une utopie ou un simple slogan de campagne : tant de facteurs interviennent, sociaux, familiaux, voire génétiques ! Mais il est possible de restaurer partout un enseignement où tous les élèves qui en ont la faculté et la volonté pourraient tendre vers l'excellence, dans le domaine intellectuel, manuel ou technique. Cela suppose toute une révolution dans une Éducation nationale qui, depuis des décennies, s'accroche aux vieilles lunes dévastatrices. Est-il si difficile de remettre le savoir au centre du système éducatif, d'encourager l'émulation, de préférer la méritocratie à la médiocratie ?
En s'engageant dans cette voie – rêvons un peu ! –, le nouveau ministre échapperait au reproche de se contenter d'une école bonne pour les enfants des autres, ambitionnant de faire de chaque établissement scolaire une École alsacienne.
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