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C’est un « appel à l’aide » qu’a lancé Julie Salan. Sur les réseaux sociaux cette étudiante de vingt-et-un ans a interpellé Emmanuel Macron dans une lettre juste, sincère et poignante. Sa volonté : que les jeunes français désemparés soient enfin écoutés. Découverte.
Le moral des étudiants n’a jamais été aussi bas. Aujourd’hui, ceux qui se considèrent comme les grands oubliés de la crise sanitaire n’en peuvent plus d’être invisibilisés par l’État. Sur Facebook, Twitter ou encore Instagram, de nombreux jeunes au bord du gouffre ont donc décidé de raconter leur survie depuis la pandémie.
C’est le cas de Julie, une étudiante qui, avant le Covid-19, rêvait d’exercer le métier de ses rêves : professeur des écoles. Mais à présent, la jeune femme ne croit plus en son avenir. Pour alerter Emmanuel Macron sur son état de santé inquiétant, et celui de ses camarades, elle a décidé de prendre la parole à travers un texte fort et percutant.
Voici la lettre retranscrite ci-dessous :
« Monsieur le Président de la République, Mesdames et Messieurs les ministres,
Je m’appelle Lucie, j’ai 21 ans. Oui, c’est le bel âge, l’âge de vivre, l’âge de découverte, l’âge où l’innocence demeure encore présente et permet ainsi de savourer la vie plus intensément. Actuellement, je suis étudiante. Je me souviens quand j’étais au lycée, mon frère venait de rentrer dans les études supérieures. J’admirais ce qu’il faisait, le virage que sa vie prenait : des enseignements qui l’intéressaient, des sorties, des expériences, des rencontres… Mon tour est venu. Une première et deuxième année d’études supérieures où j’ai pu me découvrir moi-même, réellement comprendre ce que je pensais, ce qui m’intéressait. Je découvrais tout simplement la vie, une vie active et intense. Je suis rentrée en troisième année de Licence heureuse, le sourire aux lèvres.
En effet, je me sentais épanouie, accomplie, enrichie de découvertes et heureuse chaque matin d’apprendre un peu plus. Et puis ce fichu Covid est apparu. Les universités, comme la totalité du pays, se sont plongées dans un long sommeil. Je l’ai compris, la pandémie faisait rage, nous devions nous protéger et protéger notre nation. Dans ma tête, je me disais : « après l’orage, il y a toujours un arc-en-ciel. » La motivation était là, je suivais mes enseignements avide de connaissances. Je développais comme chaque français des occupations. J’entretenais des liens avec mes amis de façon différente. Cette période, bien que inédite et effrayante, je l’ai appréciée. J’ai beaucoup appris. Je me suis rendu compte des choses essentielles et de l’importance de la solidarité entre nous.Aujourd’hui, des mois sont passés. Je suis rentrée en Master pour, à l’avenir, exercer le plus beau métier du monde : professeur des écoles. L’année scolaire a plutôt bien commencé. J’ai emménagé dans une nouvelle ville, découvert une nouvelle université et de nouveaux étudiants. J’avais tout pour être heureuse. Le Covid était encore présent, mais nous faisions attention. Je m’auto-imposais de ne pas sortir trop tard dans les bars, de limiter le nombre de personnes que je fréquentais, de respecter à la lettre les gestes barrière. La seconde vague est arrivée et vous avez refermé les facultés. Là encore, je l’ai entendu et je l’ai compris. Ma motivation n’était plus la même cependant, je me forçais à ne pas me plaindre : j’ai un toit, une famille, à manger et aucun souci de santé. Mais aujourd’hui, cette vision a totalement disparu. Je suis abasourdie par ce que j’observe. Je dois rester l’intégralité de ma journée face à un ordinateur, mais j’ai le droit de faire les magasins dans des centre commerciaux bondés. La cohérence n’est plus là. Personne ne nous donne d’horizon. Ma vie, et celle de milliers d’étudiants, sont mises entre parenthèses. Personne ne nous prend en considération. Je remercie tout de même le corps enseignant qui, chaque jour, travaille d’arrache-pied pour nous motiver, faciliter les enseignements, prendre de nos nouvelles. Eux sont humains. Vous, à qui je m’adresse, ne l’êtes pas. Des milliers d’étudiants passent leur journées enfermés, seuls devant un ordinateur, et souffrent. Le lieu de vie et le lieu de travail se confondent, notre tête ne fait plus la différence, nos repères sont brouillés. C’est un appel à l’aide aujourd’hui que je vous écris. Il faut trouver une solution. Les étudiants ne sont pas uniquement « des jeunes voulant s’amuser et faire la fête. » Nous sommes des jeunes qui veulent vivre une vie digne. Quelle génération êtes-vous en train de façonner ? Pourquoi ne jamais nous mentionner ? Nous savons que nous ne sommes pas la seule chose à prendre en considération. Cependant, nous représentons tout de même une partie non négligeable de la population. Vous ne pouvez plus nous ignorer de la sorte. Il faut trouver des solutions de façon urgente avec application immédiate. Nous avons pleinement conscience que les études supérieures et la vie étudiante ne peuvent pas reprendre comme avant la crise sanitaire, mais elle doit reprendre à minima, elle doit avec votre aide se réinventer. Il le faut.
Mon sourire s’en est allé, mes rêves se délayent de jour en jour, mon intérêt pour mes études n’est plus qu’un lointain souvenir. La jeune étudiante du début de cette lettre a laissé place à son ombre. Je suis devenue l’ombre de moi-même. »
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