Emmanuel Macron est plus prompt à contraindre le chef d’état-major des armées à démissionner qu’à démettre un chargé de mission qui, selon toutes les apparences, se comporte comme une barbouze.
Il faut que le parquet ouvre une enquête préliminaire et que ce collaborateur assez spécial soit placé en garde à vue pour que la présidence de la République prenne la décision d’engager une procédure de licenciement.
D’un côté, un général, respecté de ses pairs et de ses troupes, considéré comme une autorité morale, qui eut le tort de contester devant les députés de la commission de la Défense, comme c’était son devoir, une coupe budgétaire de 850 millions d’euros : il fut publiquement désavoué.
De l’autre, un homme, bénéficiant, semble-t-il, de toute la confiance du président de la République, puisqu’il l’accompagnait dans tous ses déplacements, publics ou privés, qui participe, pour le moins brutalement, à une opération de maintien de l’ordre.
Cet individu, membre du service d’ordre du Parti socialiste, où il a fait ses armes, a rejoint l’équipe du candidat Macron en tant que garde du corps.
Après l’élection, il est « chargé de mission » auprès du chef de cabinet de l’Élysée pour assurer la protection ponctuelle du Président, sans appartenir au Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), dont c’est pourtant le rôle.
Une sorte de « police parallèle » ?
Les barbouzes ont toujours existé sous la Ve République – et sans doute avant, sous d’autres noms. Plus ou moins liées à des mouvements politiques et agissant dans l’ombre, elles permettaient aux Présidents de garder les mains propres tandis que s’accomplissaient de basses besognes dont ils pouvaient prétendre ne rien savoir.
Cette période étant théoriquement révolue, on peut se demander pourquoi notre Président met tant de temps à réagir ?
Sans doute veut-il signifier qu’il n’a rien à voir dans cette affaire et interviendra-t-il quand quelques « fusibles » auront sauté.
Cet honorable collaborateur de l’Élysée est visé pour des faits de « violences en réunion par personne chargée d’une mission de service public », « usurpation de fonctions », « port illégal d’insignes réservés à l’autorité publique » et « complicité de détournement d’images issues d’un système de vidéoprotection », ce qui n’est pas une simple peccadille.
Il aurait obtenu de la préfecture de police des images de caméras de vidéosurveillance entourant la place de la Contrescarpe qu’il n’était pas autorisé à détenir : trois fonctionnaires de police ont, d’ailleurs été suspendus, puis mis en garde à vue.
De nombreuses questions restent en suspens : l’enquête en cours leur apportera-t-elle des réponses ? On attend de savoir, notamment, pourquoi ce chargé de mission disposait d’une voiture de fonction équipée de dispositifs normalement destinés à la police et, tout récemment, d’un appartement dans une dépendance de l’Élysée, qui lui aurait été attribué bien après sa mise à pied temporaire.
Pourquoi, aussi, cet « observateur » se trouvait place de la Contrescarpe, brutalisait au moins deux personnes et avait été filmé, peu de temps auparavant, avec un brassard de police.
Les histoires de barbouzes ne sont jamais claires et beaucoup sont restées dans l’ombre.
Il y a fort à parier que l’entourage élyséen, à l’instar de son patron, était aveuglé par un sentiment de puissance et d’impunité.
Pourquoi soupçonnerait-on les promoteurs de la République exemplaire ?
Ni vu ni connu !
Malheureusement, ce collaborateur zélé a été vu et reconnu, pris, en quelque sorte, la main dans le sac.
En tardant à intervenir, Emmanuel Macron alimente les rumeurs sur cette ténébreuse affaire, où il risque fort de payer les pots cassés.
« La République est inaltérable », a-t-il seulement commenté à Périgueux.
Lui ne l’est pas !
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