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dimanche 23 juillet 2023

L’Algérie serait-elle inhumaine avec ses propres immigrés ?


 

 

 Marc Baudriller 22 juillet 2023

Le site Info Migrants n’a rien d’une officine extrémiste.  

« Co-financé avec l’Union européenne », ce « projet multiplateforme collaboratif » est « piloté » par trois grands médias européens, trois médias publics : le Français France Médias Monde, la chaîne allemande d’information internationale Deutsche Welle et l’agence de presse italienne ANSA. 

Objectif : « Lutter contre la désinformation dont sont victimes les migrants où qu’ils se trouvent : dans leur pays d’origine, sur la route ou déjà dans le pays où ils espèrent bâtir une nouvelle vie. » Autant dire qu’Info Migrants, traduit en six langues (français, arabe, anglais, dari, pachto et bengali), diffuse une information quasi officielle.

Or, Info Migrants s’indigne. L'objet de cette indignation ? Le traitement de ses immigrés par un pays en particulier. Le week-end des 15 et 16 juillet, 1.300 migrants venus du Mali, de Guinée et de Gambie, parmi lesquels des femmes et des enfants, ont été expulsés manu militari, sans eau ni nourriture, hors des frontières du territoire sur lequel ils étaient arrivés. Direction : le désert du Sahara ! Ils ont été contraints de marcher dans le sable plusieurs kilomètres pour rejoindre le Niger.

24.000 expulsions vers le Niger

Quel pays jette-t-il ainsi ses immigrés dans le désert ? L’Algérie ! Une nation coutumière des expulsions musclées, nous apprend le même Info Migrants. « Les forces algériennes raflent les migrants chez eux ou dans la rue et les expulsent dans la foulée à la frontière », détaille le site, photos à l’appui. En 2022, plus de 24.000 personnes auraient ainsi été conduites sans ménagement d’Algérie vers un village du Niger proche de la frontière.

Et c'est cette même Algérie qui vient d’envoyer à la France, au moment du décès de Nahel, cette mise en garde ahurissante : « Le gouvernement algérien continue à suivre avec une très grande attention les développements de cette affaire tragique, avec le souci constant d’être aux côtés des membres de sa communauté nationale au moment de l’adversité et de l’épreuve. » BV s'en était fait l'écho.

Soufflé, le gouvernement français n’a pas répondu. C’est encore l'Algérie qui impose aux dirigeants français des génuflexions au mémorial du Martyr, ce monument surplombant Alger, érigé en 1982 pour le vingtième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie et dédié aux combattants de la guerre d'indépendance contre la France.

Cette même Algérie qui refuse le retour de nos OQTF. Ce pays demeure, de loin, le premier représenté en nombre parmi les condamnés à la prison en France. Notre amie l’Algérie, toujours prête à nous tirer l’oreille, ne se comporterait donc pas exactement comme une mère avec ses propres migrants ? On n’ose y croire.

« La police algérienne confisque nos téléphones »

Le même Info Migrants a pourtant d'autres exemples. Il raconte, par exemple, l’accouchement sans ménagement d’une femme nigériane, le 7 juillet 2023, en Algérie. « Une scène chaotique : une mère accouche à même le sol, sans équipement ni personnel médical, les femmes autour d'elle crient et sanglotent. La vidéo a été filmée à l’aide d’un des rares téléphones qui ont échappé à la vigilance des policiers, dans le centre de refoulement de Dely Ibrahim, près d’Alger. » Le site retranscrit les propos d’un Camerounais qui a fréquenté le même centre de migrants : « Je suis passé par ce centre pendant une semaine, raconte ce Camerounais. Les conditions sont terribles. Je n’avais pas d’eau, pas de nourriture. On pisse et on dort à même le sol, les odeurs nous étouffent. Le camp n’est pas grand, environ six pièces. On nous enferme à 500-1.000 personnes. La police algérienne confisque nos téléphones, parce qu’ils ont peur qu’on prenne des enregistrements pour dénoncer les conditions de vie. » Apparemment, la sollicitude algérienne s’arrête à ses propres ressortissants : faites ce que je dis mais pas ce que je fais…

La Tunisie tancée par l'ONU

À dire vrai, l’Algérie n’est pas la seule à adopter la manière forte avec ses migrants, dans cette région du monde : la Tunisie voisine ne semble pas, non plus, d’une immense douceur. « Après la mort, le 3 juillet dernier, d'un Tunisien à Sfax à la suite d'affrontements avec des migrants, une vague de violences a gagné cette ville du centre de la Tunisie, rappelle Info Migrants, dans un autre article : des centaines d’exilés subsahariens ont été chassés de la commune, principal point de départ des embarcations pour l’Italie. Ils ont alors été conduits par les autorités aux frontières libyenne, à l'est, et algérienne, à l'ouest. Abandonnées sans eau ni nourriture, ces personnes, dont des femmes et des enfants, ont tenté de survivre dans des zones désertiques, sous une chaleur dépassant les 40 degrés. » Décidément, la solution désert s'impose… Ce traitement a poussé l'ONU à se saisir du dossier. Des experts des Nations unies viennent ainsi d'exhorter la Tunisie à faire respecter les droits des migrants : « Nous appelons les autorités [tunisiennes, NDLR] à cesser immédiatement toute nouvelle expulsion et à poursuivre et élargir l'accès humanitaire à une zone dangereuse à la frontière tuniso-libyenne où de nombreuses personnes, y compris des femmes enceintes et des enfants, ont déjà été expulsées », tance l’organisme international, dans un communiqué publié mardi 18 juillet.

Mais qu’on se le dise, le méchant pays, violent, raciste, inhumain, appuyé sur une police sanguinaire, c’est bien sûr… la France.

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