Avez-vous entendu parler de Nayib Bukele ?
Comme son nom ne l'indique pas, cet homme politique quadragénaire, connu pour porter de temps à autre une casquette à l'envers, est le président d'un petit pays d'Amérique latine.
Et un récent sondage d'avril 2023, effectué dans neuf pays d'Amérique latine, prouve qu'il est plus populaire que le pape François dans sept d'entre eux. 90 % de ses compatriotes ont une bonne opinion de lui. Bref, c'est une rockstar. Mais quel peut bien être le secret de son insolent succès ?
En fait, c'est très simple : Nayib Bukele a été élu dans un des pays les plus dangereux du monde. Le Salvador est gangrené par les « maras », ces gangs ultraviolents nés dans la diaspora salvadorienne aux États-Unis. Les Américains ont expulsé les voyous dans leur pays d'origine pour se débarrasser du problème : ils ont recruté des adolescents, et ainsi de suite. Des quartiers entiers étaient soumis à la loi de ces barbares entièrement tatoués, sanguinaires et cruels. Il y a quelques années, le gouvernement avait même très officiellement conclu une trêve avec les maras. En mars 2022, 87 personnes ont été assassinées en un seul week-end. C'est là que Nayib Bukele entre en scène : jeune et décontracté, il a été élu sur un programme de fermeté sécuritaire, un vrai, qu'il entend appliquer (ce n'est pas Sarkozy). Le lundi qui suit ce week-end sanglant, il décrète un état d'urgence qui autorise la police à arrêter n'importe qui sur simple suspicion d'appartenance à un gang et permet aux citoyens de dénoncer les criminels. 71.000 personnes sont arrêtées en quelques semaines. Petite précision : le Salvador, c'est 6,5 millions d'habitants. Dix fois moins que la France...
Aujourd'hui, l'état d'urgence est toujours en cours. Dans les prisons surpeuplées, les détenus dorment par terre, mangent peu (car le président ne veut pas consacrer trop de budget à nourrir des criminels), n'ont ni intimité ni extinction des lumières. Certes, cela ne se fait pas. Une série de maxi-procès est prévue dans les deux ans qui viennent. En attendant, les Salvadoriens se promènent sans crainte dans les rues et leurs voisins regardent avec envie la manière dont le Salvador s'est libéré d'un fléau que beaucoup de pays d'Amérique du Sud subissent également.
Quel rapport avec notre pays, me direz-vous ? La France est-elle vraiment un narco-État, dont des pans entiers obéissent à des caïds jeunes et ultraviolents ? Est-elle vraiment un pays dont la classe politique a renoncé et dont les citoyens ont peur pour leur survie ? À vous de juger. Nous faut-il un Bukele français ? Chacun se fera son opinion. Les Latino-Américains commencent à se dire que la répression a du bon. En Équateur, c'est un ancien tireur d'élite de la Légion étrangère qui fait campagne en treillis. En Haïti, un procureur, qui a été filmé en train de tirer sur un voyou, fait partie des prochains présidentiables. C'est spectaculaire, un peu vulgaire et probablement outrancier. Certes. Mais peut-être, au lieu de commencer par nous boucher le nez, devrions-nous reconnaître que nous sommes, nous aussi, en train de nous « salvadoriser », et que ce n'est pas une classe politique de parasites hors-sol qui va nous sortir des ronces. En attendant, en France, pays des Bisounours, les dealers organisent la fête durant l'été dans les cités...
J’ai lu que les Maras qui ne sont pas en prison au Salvador, sont maintenant en Europe. Il y en aurait 3.000 en Espagne et 2.000 au Portugal. Désolée d’avoir cassé l’ambiance.
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