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mardi 31 décembre 2019

Pierre Lemaitre ne se refera plus prendre au vote Macron contre Le Pen

 
 

30 décembre 2019

Je n’ai lu ni Lolita ni Matzneff.

Et je n’ai fait que quelques incursions dans Harry Potter. Question de génération, sans doute.

Mais j’ai lu Pierre Lemaitre et, plus particulièrement, les deux premiers tomes de sa trilogie des années 30 intitulée Les Enfants du désastre : Au revoir là-haut, qui lui valut le prix Goncourt en 2013, et Couleurs de l’incendie, encore plus réussi et dont je vous ai dit tout le bonheur de lecture qu’on pouvait y trouver.
C’est dire si j’attends le dernier volet Miroir de nos peines qui doit suivre Louise dans les affres du printemps 1940.

Mais aujourd’hui, Pierre Lemaitre ne fait pas parler de lui pour son livre mais pour son coup de gueule, franc et vrai, contre Macron.

Pas étonnant de la part de cet enfant du 93, autodidacte, classé à gauche et dont le jugement sur les people de son camp ralliés à Macron est tellement juste.
Souchon, Renaud ? « Ils ne sont pas opportunistes, ils sont sincères. Ils se sont embourgeoisés. Ils ont envie de calme. Leurs anciennes valeurs ne les font plus vibrer. » Mutatis mutandis, on pourrait en dire autant d’une certaine droite…
Pour prolonger l’analyse devenue un lieu commun – mais qui n’en est pas fausse pour autant, Macron a réuni la gauche et la droite de l’ordre et de l’argent qui ont trahi le peuple.
Et Lemaitre demeure sincèrement du côté du peuple trahi, avec son prisme particulier du regard social et de la misère des femmes : « Le jour où j’apprends que de plus en plus de femmes accouchent dans la rue, Bernard Arnault devient l’homme le plus riche du monde. Que fait Emmanuel Macron ? ISF, assurance chômage, retraites. […] Je suis davantage en colère. Je n’essentialise pas les riches : ma lutte est l’écart entre les riches et les pauvres. »
On reconnaît là encore l’écrivain qui a fait de Madeleine Péricourt l’admirable héroïne de son tome 2 et qui a fait plus pour la cause des femmes que toutes les dingueries de l’écriture inclusive.

Pierre Lemaitre pointe aussi la dérive policière et autoritaire du macronisme : « Les attaques policières sont scandaleuses. La violence policière est indiscutable. Nous sommes entrés dans une démocratie autoritaire. »
Il a été dans la rue et il a vu les éborgnés, lui.
Son analyse politique est aussi documentée et acérée que son travail de romancier, et les commentateurs politiques devraient les lire avec attention.
Pierre Lemaitre semble encore sincère en allant au bout de ses constats et en revenant sur l’élection de 2017 : « Est-ce que Marine Le Pen aurait fait pire ? On ne m’y reprendra plus. Pour la dernière élection, je n’ai pas voté pour Emmanuel Macron mais contre Marine Le Pen […]. Il y a eu Jacques Chirac en 2002 et Emmanuel Macron en 2017. Il n’y aura pas de troisième fois. »
Intéressant… Et beaucoup de Français, sincèrement de gauche, doivent se reconnaître dans cette réaction.
Sauf qu’après 2002, on en avait aussi beaucoup entendu dire qu’il n’y aurait pas de seconde fois… Pour information, pour leur troisième fois, Emmanuel Macron inquiétant vraiment les commanditaires de l’opération, c’est François Baroin qui a été retenu.
Et, en plus, François Baroin est un fan de Renaud, alors…
Mais revenons à la réalité : une majorité de Français ne veut plus d’Emmanuel Macron et une autre majorité (les deux se recoupent parfois) ne peut glisser un bulletin Marine Le Pen dans l’urne.

Qui a dit que l’élection de était jouée d’avance ?

Certainement pas Pierre Lemaitre, aussi doué pour la critique sociale que dans l’art du rebondissement imprévu.

Pascal Célérier

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