La Cour des comptes est chargée d’ausculter tous les organismes qui dépendent de l’État.
À ce titre, elle a protesté à maintes reprises contre l’avantage accordé aux employés d’EDF ou de GDF leur permettant de ne régler que 10 % de leur consommation d’énergie.
Mais ces réductions ne sont qu’un complément de salaire, une façon de rémunérer à moindre coût les employés et qui est commune à toutes les entreprises : les vendeurs des concessions automobiles roulent toujours dans des voitures neuves de moins de 6 mois, les chargés de clientèle dans les banques ont droit à des emprunts à des taux encore plus bas que ceux qui sont consentis aux particuliers, etc.
Mais l’avantage accordé aux salariés de la SNCF dépasse – et de loin – ce que les autres entreprises publiques offrent à leurs employés.
Chaque agent ou retraité de la SNCF a droit à la gratuité totale des billets de trains et 8 réservations par an, leur conjoint (marié, pacsé ou concubin), leurs enfants bénéficient de « 8 cases gratuites » (grossièrement, un aller-retour en 2 jours) et ne payent que 10 % du prix des autres billets.
Mieux : les parents et les grands-parents des cheminots ainsi que les parents et les grands-parents de leurs conjoints ont droit, eux aussi, à 4 cases gratuites, comme le rappelle Capital.
Avantage qui, parfois, atteint un montant de 1.000 euros annuels !
Une centaine d’agents basés à Paris s’occuperaient de gérer ce privilège et de dresser la liste de ceux qui y ont droit.
Au total, ce système profite à 1,3 million de personnes (2 % de la population de l’Hexagone).
Les actifs, les conjoints d’actifs et les enfants d’actifs ne représentent que 35 % des heureux élus.
Les retraités et la parentèle lointaine constituent les gros bataillons des privilégiés.
Non seulement la SNCF perd le prix des billets qu’auraient payé, sinon, les cheminots ou leur famille proche ou lointaine, mais, en outre, ces places occupées manquent aux autres voyageurs et les trains sont artificiellement bondés.
On évalue à 30 millions d’euros cet effet d’éviction.
L’entreprise ferroviaire règle, en outre, tous les ans, 20 millions de charges sociales pour cet avantage salarial.
Au total, le dispositif coûterait 220 millions par an à la SNCF.
C’est une hypothèse basse, car ce montant n’est calculé que pour les voyages en TGV soumis à une réservation obligatoire.
Les trajets en TER à prix cassé ne sont pas pris en compte.
Certes, cela représente moins de 5 % du déficit global de l’entreprise ferroviaire, qui est de 14,4 milliards d’euros par an ; chaque Français est racketté de 234 euros au profit de la SNCF, même s’il ne prend jamais le train.
Mais alors que les gestionnaires de la SNCF cherchent à tout prix à faire des économies, le privilège des cheminots et de leur parentèle interpelle.
Les magistrats de la Cour des comptes s’étaient déjà émus de ces coûteux cadeaux en 2013, en vain : le nombre de bénéficiaires des réductions a augmenté de 20 % depuis 2011.
Une des pistes suivies serait de n’accorder cet avantage qu’aux agents actifs de la SNCF et à leur famille proche pour un coût total de 80 millions d’euros, ce qui constituerait un net progrès.
Mais la SNCF a fait la sourde oreille quand la Cour des comptes lui a fait cette suggestion en 2013, et rien ne dit qu’elle sera plus réceptive en 2019.
Christian de Moliner
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