Le 06/05/2018
Olivier Damien
Les événements survenus dans les rues de la capitale à l’occasion de la fête du Travail, en d’autres temps, auraient provoqué le départ immédiat du ministre de l’Intérieur…
Non contents de s’être montrés d’une incompétence crasse dans la gestion des manifestations du 1er mai, le gouvernement et son préfet de police sont aujourd’hui ridiculisés par les suites judiciaires réservées aux interpellations qui ont suivi les destructions et les violences commises à cette occasion. Il ne fallait pourtant pas être grand clerc pour deviner que, sur les 283 individus interpellés, et sur les 109 personnes placées en garde à vue, aucun ne serait sérieusement condamné.
Et cela, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, parce que notre système pénal est inadapté à ce genre de situation.
En effet, ce dernier repose essentiellement sur la réalité d’un élément matériel qui doit pouvoir être, sans contestation possible, attribué à l’auteur présumé de l’infraction poursuivie.
Or, il apparaît que, pour la grande majorité des individus déférés devant la 23e chambre, une telle démarche n’a pas été possible.
Interpellés en marge des manifestations ou en dehors de tout geste flagrant révélant la commission de l’infraction poursuivie, le verdict ne pouvait être que celui de la relaxe.
Cet état de fait relève du décalage trop important qui existe entre le moment de la commission des infractions et celui de l’intervention des forces de l’ordre.
Une fois encore, les atermoiements de la chaîne de commandement (cabinet du ministre, préfet de police, direction de l’ordre public) sont les seuls responsables de ce fiasco opérationnel et judiciaire.
Ensuite, parce que les infractions qui permettraient d’intervenir préventivement, telle l’interdiction de participer à une manifestation en ayant le visage dissimulé, ne sont jamais appliquées.
Il est vrai que s’agissant, pour cette dernière, d’une simple contravention, elle est dans le contexte de violences de ces événements totalement inapplicable.
D’où l’intérêt qu’il y aurait à en faire un délit, afin que des interpellations préventives puissent être effectuées et des gardes à vue prononcées.
Enfin, l’inadaptation de l’organisation policière face à des groupes d’activistes qui ne cessent de perfectionner leurs modes d’action.
Il est indéniable que les forces mobiles, engagées depuis de nombreuses années dans la lutte contre le terrorisme, ont perdu en technicité.
Ce qui faisait leur excellence en matière de maintien de l’ordre a peu à peu disparu du fait d’un manque d’entraînement devenu chronique et d’une stratégie qui, faute de s’être adaptée à ces nouvelles formes de violences, est désormais inopérante. Si l’on ajoute à cela les failles innombrables dans la chaîne décisionnelle, les matériels devenus obsolètes ou bien l’interdiction qui est faite aux CRS de se servir de certains d’entre eux, le résultat ne peut être que celui observé le 1er mai dernier.
La réponse à ces échecs répétés dans la gestion de l’ordre public ne se trouve évidemment pas dans le déploiement d’effectifs de police ou de gendarmerie toujours plus nombreux.
Elle se trouve, d’une part, dans la volonté politique de mettre fin à de tels débordements, afin de protéger la liberté de manifestation.
D’autre part, dans une remise en cause des priorités assignées à nos forces mobiles, notamment le retour à des techniques opérationnelles adaptées à ces nouvelles formes de manifestations violentes. Enfin, par une révision complète de notre arsenal juridique, pour le mettre en adéquation avec les réalités du terrain.
Mais il y a fort à craindre que les événements survenus dans les rues de la capitale à l’occasion de la fête du Travail, qui, en d’autres temps, auraient provoqué le départ immédiat du ministre de l’Intérieur, ne soient suivis d’aucune remise en question.
Les casseurs ont encore de beaux jours devant eux.
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