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jeudi 27 novembre 2014

Mistral, de port en « report »


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Le 26 novembre 2014
 
   
Aux yeux du monde, la France est un pays sans parole.

Lorsqu’il y a trois ans le gouvernement français et le gouvernement russe signèrent l’accord qui prévoyait la réalisation par l’une des deux parties contractantes et la livraison à l’autre de deux bâtiments de type Mistral, nul n’ignorait qu’il ne s’agissait pas de fabriquer deux pédalos ou deux yachts de plaisance mais bel et bien deux navires de guerre, et donc destinés à faire éventuellement la guerre.
La commande en question constituait le plus concret des hommages au savoir-faire français.
 Elle apportait aussi une bouffée d’oxygène particulièrement bienvenue à des chantiers navals au bord de l’asphyxie.
Elle concrétisait, enfin, la bonne entente entre deux pays que lient tant de souvenirs et d’affinités et qui, bien loin d’avoir le moindre sujet de litige, ont tout intérêt, dans le monde tel qu’il est, à se rapprocher, tant pour faire contrepoids à l’hégémonie nord-américaine que pour opposer un barrage à la montée d’un terrorisme international qui représente aujourd’hui la pire menace pour l’équilibre et la paix de la planète.
Des deux navires construits à Saint-Nazaire, l’un est d’ores et déjà disponible, l’autre en voie d’achèvement, et les délais prévus ont été tenus pour l’un comme pour l’autre.
L’acheteur a payé rubis sur l’ongle son fournisseur.
Cependant, l’actuel président de la République française ne cesse de lanterner son client et diffère, de « report » en « report », la livraison du Vladivostok, sans avoir osé dire, jusqu’à présent, qu’il ne respecterait pas l’engagement pris en 2011, au nom de la France, par son prédécesseur.
Ce faisant, François Hollande porte gravement atteinte aux intérêts, au crédit et à l’honneur de notre pays.
C’est au total à plus de trois milliards d’euros qu’est évalué le coût du dédit que la France, dans l’état où sont ses finances, devrait payer à la Russie au cas où elle persisterait dans son attitude actuelle.

Il est d’autre part bien évident que peu d’États se risqueront encore à passer des contrats de vente d’armements avec la France si nous prétendons conditionner l’exécution desdits contrats à l’usage qui en serait fait par nos partenaires.
Enfin – et c’est finalement le plus grave –, c’est sous la pression des pays naguère satellisés par l’URSS, sous la pression de l’Union européenne, sous la pression de l’OTAN, tous obéissant aux consignes de Washington, que nous avons laissé se recréer, s’envenimer et s’aggraver chaque jour un climat de guerre froide qui fait courir infiniment plus de risques à la paix et à la stabilité de l’Europe que la volonté affirmée et légitime de Vladimir Poutine de relever son pays et de reprendre pied sur des terres historiquement, ethniquement, affectivement et politiquement russes.

Au moins pourrions-nous jouer et aurions-nous joué en d’autres temps un rôle de médiateur dans une affaire dont nous ne faisons que suivre et accompagner les développements en jappant aux chausses du président russe au lieu de chercher avec les belligérants les voies de l’apaisement.
Le comble est que nous prenons de grands airs de matamores et proclamons notre indépendance là où nous ne sommes qu’un roquet qui, comme le caniche britannique, puise toute son audace dans les encouragements et les consignes que lui prodigue son maître américain.

Il y a longtemps, du reste, que le gouvernement de Kiev tiendrait un autre langage et aurait reconnu que le Donbass et la Crimée relèvent de droit comme de fait de l’ensemble russe s’il n’était, lui aussi, fait de pantins dont Washington tire les ficelles.

Ce n’est pas en 2014, c’est en 1930, en 1945 ou en 1956 qu’il y aurait eu du mérite à tenir tête à l’URSS stalinienne.

Le choix politique que fait actuellement notre gouvernement n’est pas celui du courage.

Il signifie seulement, aux yeux du monde, que la France est un pays sans parole.

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