Comment résister au plaisir de vous annoncer la parution d’un nouveau décret pris le 24 avril dernier au nom de la désormais sacro-sainte sobriété énergétique ?
Un décret qui manquait à l’arsenal administratif que le monde entier nous envie depuis Courteline et signé par pas moins de quatre ministres dont le premier d’entre tous.
L’objet de ce texte est (je cite) l'« aménagement temporaire des dispositions du Code du travail relatives à l’utilisation d’eau chaude sanitaire des lavabos ». C’est ce qu’on doit appeler l’État stratège. Ça concerne qui ? « Employeurs privés et publics ; travailleurs, fonctionnaires, agents publics, militaires auxquels s’applique la quatrième partie du Code du travail relative à la santé et la sécurité des travailleurs. » Bref, et pour faire court, tout le monde qui bosse. On imagine que l’étape suivante consistera à s’occuper de votre cas personnel à la maison. Ce décret « permet, jusqu’au 30 juin 2024, la suppression de l’eau chaude sanitaire des lavabos dans les bâtiments à usage professionnel pour répondre à des objectifs de sobriété énergétique… », sous certaines conditions dont nous vous faisons grâce, histoire de ne pas vous perdre dans les méandres du Code du travail, passionnant comme un livre de Christine Angot.
Rassurez-vous, il n’est pas question que l’on demande aux travailleurs manuels de prendre, au sortir du chantier ou de l'atelier, leur douche à l’eau froide. Pour l’instant. Parce que, vous savez, les douches froides, c’est bon pour la santé, notamment pour la circulation sanguine. Le bon docteur Véran se dévouera bien pour nous expliquer tout ça, entre deux recettes pour lutter contre la montée de l'extrême droite. On verra ça plus tard. Pour l'instant, on en reste au lavabo qu'il est beau. On se souvient qu’au début de la guerre du Covid, Ursula von der Leyen avait expliqué à tous ses bons peuples de l’Union européenne, avec force pédagogie, le comment qu’il faut bien se laver les mains en chantant l’hymne européen. Rien, cependant, n’était précisé sur la température de l’eau. Il paraît qu’eau froide ou eau chaude, c’est du pareil au même pour lutter contre les virus, à condition d’utiliser du savon.
On attend qu’Élisabeth Borne - voire Emmanuel Macron, tant qu’à faire - nous offre un tutoriel pour nous expliquer tout ça. Ils adorent la pédagogie. En chantant « la Marseillaise » et l'hymne européen, pour rester dans le ton du moment.Et pour l’étape suivante ? C’est-à-dire ? Comment faut-y prendre sa douche pour sauver la planète tout en luttant contre le Covid et la montée de l'extrême droite (décidément, c'est une obsession !) ? C'est tout vu : on fera appel à Marlène Schiappa. N’est-elle pas l’auteur (pardon, l’autrice) de cette magnifique et très sensuelle description : « Quand le shampooing coule sur mes épaules, mon ventre, mes jambes, j’en ai partout, je me lave avec ce liquide blanc, je patauge dedans... » Tiré de son chef-d’œuvre Si souvent éloignée de vous. Bruno Le Maire, adepte, lui, du bain, nous expliquera comment se frotter le dos d'une main avec le gant de crin, tout en besognant dur de l'autre main à l'effondrement de l'économie russe. Blague à part, la France peut désormais s'enorgueillir d'avoir un gouvernement qui a inventé l'eau froide.
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