Coup de tonnerre dans le ciel européen : après cinq années de gouvernement d’une coalition de gauche, Pedro Sánchez et son parti le PSOE viennent de subir une défaite retentissante aux élections régionales et municipales espagnoles.
Douze régions autonomes étaient en jeu, dont neuf gouvernées pas des socialistes, mais trois seulement le sont toujours.
Le Parti populaire présidé par Alberto Núñez Feijóo redevient le premier parti espagnol, avec 7 millions de votes (2 millions de plus qu’en 2019 et 760.000 voix d’avance sur le PSOE), quand le PSOE se classe deuxième, à 28,1 % des voix. La majorité gouvernementale ne contrôle plus que trois des dix-sept régions espagnoles.
Le progressisme ne paie pas
La gauche radicale, alliée de gouvernement de Pedro Sánchez, se révèle avoir été un boulet pour lui : la course à l’échalote de la mesure la plus progressiste, woke, hors-sol, la surenchère idéologique des militants des minorités extrêmes a fini de dégoûter les électeurs espagnols qui se sont massivement reportés sur les candidats de la droite (Parti populaire, PP) et de Vox. Cette dernière formation, créée en 2014 par des anciens du Parti populaire qui voyaient d’un mauvais œil le recentrage (ou la gauchisation ?) de la formation de droite classique, a su susciter et cueillir le sursaut de la population de droite. Et voit ses thèmes de prédilection - immigration, identité, patriotisme, anti-wokisme et anti-féminisme - primés, élection après élection.
Dans la foulée, Pedro Sánchez a dissous les Cortès et convoqué des élections législatives pour le 23 juillet prochain.
Pourquoi des élections anticipées ?
Si d’aucuns ont pu saluer la décision « démocratique » de Pedro Sánchez de convoquer des élections anticipées, en plein mois de juillet, on devine sans peine un calcul politique, ou plutôt une tentative de coup de poker : sommer la gauche de s’unir au plus vite sous peine de défaite en rase campagne, qui augurerait d’une défaite encore plus massive aux élections européennes de 2024. Et, pour cela, mener une blitz-campagne en martelant le danger de l’extrême droite face au score de Vox, en pleine ascension. Son entourage n’a dès lors pas hésité à poser les termes du débat et de la campagne : un gouvernement des forces du progrès ou un gouvernement de droite, mais avec Vox.
La question étant de savoir si cette hypothétique union des gauches se ferait toujours sous la houlette de Yolanda Diaz, ministre du Travail espagnol, communiste et néanmoins soutien de Sánchez. Elle a déjà tenté de constituer un embryon d’union des gauches plutôt radicales et certainement progressistes, Sumar, crédité aujourd’hui de près de 10 % des voix. Le mauvais résultat de Podemos, qui s’est effondré (0,59 % des scrutins, contre 5,86 % quatre ans plus tôt) fragilise d’autant la constitution d’une coalition de gauche dont on ne sait pas encore qui en aurait le leadership. Bref, l’extrême gauche au pouvoir, une illusion qui franchit difficilement l’épreuve de la réalité.
Cette convocation surprise d’élections anticipées, habile politiquement de la part de Pedro Sánchez, force le PP à prendre ouvertement date avec Vox pour former des coalitions sans lesquelles il n’obtiendrait pas de majorité absolue. Et contracte fortement le temps de la campagne et des négociations : celles pour la constitution des gouvernements régionaux et conseils municipaux se tiendront en même temps que la course à la députation pour le PP comme pour le parti de Santiago Abascal. Ou comment tenter de dynamiter la dynamique d’union des droites…
La stratégie gagnante d’union des droites
Car cette stratégie électorale n’est pas un tabou, en Espagne, et peut être victorieuse comme en Italie. Le PP gouverne déjà depuis un an la province de Castille-et-León avec Vox. Isabel Díaz Ayuso, réélue triomphalement à la tête de la province de Madrid, incarne au PP un courant que l’on pourrait dire de droite assumée qui ne dédaigne pas les alliances avec Vox.
Dès le 29 mai, Alberto Núñez Feijóo, président du PP, a d’ailleurs déclaré : « Hier soir, nous avons eu un contact informel avec Vox. Nous avons échangé des félicitations et, ce matin, Monsieur Abascal et moi avons discuté. »
Enfin, et ce n’est pas de moindre importance dans ce contexte, l’Espagne assure la présidence tournante de l’Union européenne en juillet pour six mois. Puis viendra le temps de la campagne électorale pour les élections européennes.
Aujourd’hui, après l’Europe de l’Est, après l’Europe du Nord, c’est le Sud, mené par l’Espagne et l’Italie, qui montre les signes d’un réveil des peuples ou, tout au moins, de soubresauts de plus en plus fréquents. Tandis que des discussions entre le Parti populaire européen et les Conservateurs européens du CRE, dont font partie Vox et Fratelli d’Italia, se poursuivent, on peut espérer qu’enfin, en Europe, le vent se lève et vire à droite.
Mardi, à l’occasion d’un colloque à Rome, Giorgia Meloni, à la tête d’une coalition gouvernementale de droite qui vient de remporter plusieurs élections municipales ce week-end, affirmait : « Il n’est pas sans importance qu’aujourd’hui ces idées, nation et patrie, soient devenues centrales dans le débat politique, historique, philosophique, juridique, et soient sorties d’une marginalité dans laquelle elles avaient été reléguées pendant des décennies. […] Ce n’est que sur la solidité de ces racines qu’une nation peut tirer la force, l’enthousiasme, le courage pour être protagoniste de son temps. »
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