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dimanche 9 avril 2023

Tribulations de Macron en Chine : un nouvel échec sur la scène internationale


 

 Frédéric Lassez 8 avril 2023

Emmanuel Macron aura, une fois encore, contribué au rayonnement de la diplomatie française. 

Son déplacement en Chine n’était même pas achevé que la presse, en France et à l’étranger, annonçait déjà un échec. 

« À Pékin, Emmanuel Macron ne parvient pas à convaincre Xi Jinping de faire un geste pour l’Ukraine », écrivait Le Monde, ce vendredi. Aux États-Unis, Politico a fait le même constat, la veille, mais en ajoutant quelques détails sur les impairs du chef de l’État français qui, lors de son apparition conjointe avec le président Xi Jinping devant la presse, jeudi, a « parlé environ deux fois plus longtemps que son hôte ».

« Un faux pas protocolaire que les membres de l'entourage chinois de Xi ont remarqué », note le média américain, qui ajoute que le président chinois lui-même avait parfois « l'air impatient et agacé » et qu’il avait « poussé plusieurs soupirs profonds ». La logorrhée macronienne épuise donc jusqu’aux confins de l’Asie. On passera sur la séquence de la photo avec son hôte et la présidente de la Commission européenne au cours de laquelle un Macron main dans la poche a été manifestement interpellé par les photographes afin d’adopter une posture plus solennelle.



On voudrait partager les rires de ceux qui brocardent le Président français sur les réseaux sociaux, mais on se souvient du motif affiché de sa venue à Pékin : « Travailler dans le sens d’un retour de la paix en Ukraine. » Une ambition élyséenne qui s’est heurtée comme prévu au mur froid de la realpolitik. « Je sais pouvoir compter sur vous pour ramener la Russie à la raison et tout le monde à la table des négociations », avait dit le chef de l’État français à Xi Jinping, au début de leur rencontre. Y croyait-il lui-même ? On peut en douter.

À bien y regarder, en dehors des naïfs et des courtisans, personne ne s’attendait à un miracle, surtout de l’autre côté de l’Atlantique. Le premier jour de son arrivée en Chine, le Washington Post ne prenait pas de gants pour faire le constat suivant : « Peu de gens à Washington accordent beaucoup de crédit à la capacité de Macron à faire avancer une résolution du conflit en Ukraine grâce à ses discussions avec Xi. »

On pourrait s’étendre longuement sur ce nouvel échec élyséen, mais ce serait passer à côté de l’essentiel de ce qui se jouait là-bas. Pour Xi Jinping, la préoccupation première portait moins sur l’Ukraine que sur sa capacité à convaincre la France de l’aider à garder ouvertes les voies commerciales avec l’Europe au moment où résonnent à Bruxelles les menaces de mesures de restriction et de sanction.

Le discours prononcé par Ursula von der Leyen, peu de temps avant son déplacement à Pékin, avait toutes les raisons d’inquiéter le président chinois. Le cadre choisi par la présidente de la Commission pour s’exprimer était en lui-même symbolique, puisqu’il s’agissait de l’Institut Mercator, un think tank allemand placé sous sanction par le gouvernement chinois en raison de ses prises de position.

C’est à un véritable réquisitoire que s’est livrée Ursula von der Leyen, qui a déroulé une longue liste de griefs à l’encontre de Pékin. Était reproché à la Chine : son soutien à l’égard de Moscou, sa « démonstration de force militaire en mer de Chine méridionale et orientale », ses « graves violations des droits de l'homme au Xinjiang », l’« intensification de ses politiques de désinformation et de contrainte économique et commerciale » ou encore sa volonté de « changement systémique de l'ordre international ».

Après de telles déclarations, Macron avait sans aucun doute, auprès de lui lors de son déplacement, la partenaire idéale pour des échanges apaisés et fructueux. D’autant plus que la présidente de la Commission avait très clairement fait comprendre à la Chine, lors de son discours, qu'il fallait envisager la possibilité de l'enterrement définitif d’un accord commercial (CAI) conclu en 2020 mais bloqué par la suite et que Pékin souhaitait relancer. Sans parler des mesures annoncées afin de « réduire les risques » des économies européennes face à la Chine, notamment dans le secteur des technologies sensibles.

Des outils censés défendre les intérêts de l’Union européenne et renforcer son autonomie mais pris, en réalité, sous la pression de Washington qui, lentement mais sûrement, entraîne l’Europe dans une guerre économique et commerciale avec la Chine. Dans ce contexte, la presse occidentale elle-même reconnaît que l’administration Biden prend appui sur la présidente de la Commission pour s’assurer d’un alignement toujours plus prononcé des Européens.

« Ursula von der Leyen, tout à son atlantisme assumé, pousse désormais ouvertement l’Union à se ranger derrière la bannière américaine dans le conflit, de moins en moins larvé, qui oppose les États-Unis à la Chine », écrivait Libération/a>, en mars dernier, après un déplacement de la présidente de la Commission à Washington.

Qu’espérait alors Emmanuel Macron en l’entraînant avec lui dans ses tribulations chinoises ? Devait-elle jouer le rôle d’épouvantail ? Car, si l’on en croit le Washington Post, l’idée du Président aurait été de proposer à Xi Jinping un accord monnayant la résistance de la France aux pressions américaines pour se dissocier de la Chine contre l’investissement diplomatique de Pékin pour ramener la paix en Ukraine. Manifestement, une grande réussite. Comme lors de la Seconde Guerre mondiale, il ne reste désormais plus qu’à attendre que le conflit européen ne fasse plus qu’un avec celui qui progresse en Asie.

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