Connaissez-vous Valérie Pécresse ? Non ? Vous devriez.
C’est une femme passionnante.
Une femme de convictions, d’abord, capable de signer une
tribune progressiste avec Rokhaya Diallo, il y a dix ans, et de devenir
la pasionaria de la droite dure il y a deux semaines. On n’aura pas la
cruauté d’évoquer ses revirements sur la question du mariage homosexuel.
Une oratrice, ensuite, spontanée, naturelle,
charismatique, semant les aphorismes définitifs. C’est Audiard en
jupons. Enfin, elle aimerait. Son meilleur mot – « Les sondages, ça va, ça vient, c’est comme la queue du chien » – n’est même pas d’elle, mais de son mentor Jacques Chirac.
Valérie Pécresse est, enfin, une femme courageuse qui n’hésite pas, comme elle le dit dans une vidéo devenue virale, à se lever à cinq heures du matin pour aller dans le Doubs.
Je ne sais pas si, en France, où les infirmières, boulangers,
conducteurs de train et femmes de ménage se lèvent plutôt vers 10 h – 10
h 30, on se rend bien compte de ce que ça représente, cinq heures du
matin.
Bref, c’est cette moderne Athéna qui, lors d’un
déplacement en Provence, a jeté l’un de ses yeux d’épagneul blasé sur
les « quartiers ». Elle y a vu de la misère et son cœur s’en est ému –
de colère, s’entend. Valérie Pécresse, femme de convictions, oratrice,
courageuse, a dégainé sur-le-champ l’une de ses propositions : faire
intervenir l’armée dans les cités. Une idée reprise à Éric Ciotti, et à
beaucoup d’autres…
Tout le monde, à droite comme à gauche, joue avec ce
fantasme d’impuissant depuis des années, oubliant commodément que la
dernière occurrence de maintien de l’ordre en France par l’armée,
c’était la bataille d’Alger, et que c’était très efficace mais qu’on
n’assumait pas vraiment à Paris. L’armée dans les « quartchiers », comme
ils disent, c’est la guerre civile au bout du RER : je ne dis pas que
c’est bien ou mal, mais c’est comme ça, c’est le nom que cela porte.
Qu’un coup de feu parte et ce sera l’embrasement général. La
condamnation par le camp du bien. Les sanctions financières à Bruxelles.
L’ONU qui organise des ponts aériens pour ravitailler les tours
diversitaires. Il faudra, en outre, définir des règles d’engagement,
prévoir un cadre juridique, intervenir en liaison avec la police, les
magistrats ou même les pays d’origine des hors-la-loi, si (par miracle)
ils sont étrangers. Bref, il ne suffira pas de transformer la Courneuve
ou la Castellane en parking poids lourds avec deux ou trois largages de
bombes pour régler le truc. Ou alors, on passe de la guerre civile au
massacre. On monte en gamme. C’est vous qui voyez.
Valérie, elle, ne voit rien de tout ça. Ou alors elle l’a
bien vu mais elle fait semblant car on est en campagne. Elle aime les
formules, de préférence ringardes et usées, on l’a vu : la queue du
chien, le Kärcher™,
tout ça. Des formules de droite classique, confortables comme les
chaussons de ses électeurs. Des poncifs qui n’engagent à rien, comme des
histoires qu’on se raconte entre potes, un peu arrangées, qui ne
changeront rien, mais qui font passer le temps. L’armée dans les
banlieues, par exemple, ça fait sérieux, solide. Cette fois, seulement,
elle adapte un peu, elle change à la marge : l’armée interviendra dans
les banlieues, oui, mais seulement pour mettre fin au trafic de drogue.
Sous forme de « Task Force », probablement, c’est-à-dire d’une unité ad hoc
composée de spécialistes, comme en opérations extérieures. La Task
Force chichon, si on veut. Il y a bien un pays qui s’y est risqué : le
Brésil. Les images des batailles rangées entre l’armée et les dealers
sont faciles à trouver sur Internet. C’est impressionnant. Il faut
simplement savoir ce qu’on veut.
Elle, ce qu’elle veut, c’est gagner à tout prix. Rien
n’est chiffré. Rien n’est concret. Les militaires y sont hostiles. Les
policiers aussi. Je ne vous parle pas des magistrats.
Décidément, rien n’arrête la candidate LR, condamnée à
être caricaturale pour ratisser large. Élue contre Ciotti, dont elle
méprise le programme, les idées et peut-être même les électeurs,
Pécresse joue à la droitarde sans rien y connaître. Elle était meilleure
en madame-je-sais-tout ultralibérale, déversant des millions dans les banlieues d’Île-de-France. C’était son style, c’était dans ses cordes. Pourquoi changer d’un coup ?
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