La plaisanterie de Zemmour, ce fusil pointé pour rire sur des journalistes lors du salon Milipol, aura fait le tour du Web.
Et mobilisé le pouvoir. Ce 21 octobre au matin, Clément Beaune, secrétaire d’État aux Affaires européennes, se rengorgeait sur LCI : « Marlène Schiappa a bien fait d’alerter sur ce qui s’est passé hier à Milipol […] Faire de l’humour avec une arme contre les journalistes, ça ne me fait pas rire et ça m’inquiète. »
Encouragée par le succès d’un premier tweet qui a lancé l’offensive, Marlène Schiappa en remet une couche : « Viser des journalistes avec une arme en leur disant “Reculez !” n’est pas drôle. C’est horrifiant. Surtout après avoir dit sérieusement vouloir “réduire le pouvoir des médias”. Dans une démocratie, la liberté de la presse n’est pas une blague et ne doit jamais être menacée. » Tremblez, bonnes gens ! Agiter la menace Zemmour sur le « pouvoir des médias » de la part d’un gouvernement dont la réputation d’autorité n’est plus à faire, qui a poussé les lois de la députée Avia et qui finance l’inquiétante commission anti-complotiste Bronner relève d’un incroyable culot qui ne surprendra pas les Français. La gauche est donc affligée. Le vice-président de LREM à l’Assemblée, Hugues Renson, juge la « séquence inouïe » et qualifie son auteur de « saltimbanque ». Libération devait se saisir, ce matin, de ce grave problème pour la patrie, quitte à user de rapprochements hasardeux. La fin – enrayer la fusée Zemmour – justifie les moyens. Zemmour n’a-t-il pas lancé, à Béziers : « Nous avons des contre-pouvoirs qui sont devenus le pouvoir, c’est-à-dire la Justice, les médias, les minorités. Nous devons enlever le pouvoir à ces contre-pouvoirs. » Tremblements de terreur à Libération.
Le site du quotidien dénonce gravement « un homme qui a donc un projet politique de réduction des libertés et d’atteintes à l’équilibre des pouvoirs construits depuis des siècles dans ce pays. Un homme qui a annoncé clairement qu’il s’y attaquera si, demain, il est élu président de la République. Pointer une arme vers des journalistes quand on aspire à cette fonction, ce n’est pas une “plaisanterie”, c’est une intimidation. » En clair, Zemmour a tenu en joue toute une profession traumatisée.
Ainsi, sur la base d’une plaisanterie que l’on peut trouver insignifiante, voire mauvaise, pourquoi pas, la gauche mobilise ses meilleurs lanciers et ses grandes orgues… qui ne se grandissent pas dans cette dispute de cour d’école. Le seul intérêt de cette non-affaire, c’est ce qu’elle dit du vide qui semble avoir aspiré de l’intérieur toute critique argumentée venant de gauche contre Zemmour. Le ridicule de l’attaque témoigne d’un désarroi. Flashé autour de 5 % dans les sondages, le PS est exsangue. Et la Macronie, qui ne s’attendait pas à la poussée vertigineuse de Zemmour dans les sondages, donne des signes d’affolement. On attend toujours, à gauche, une vision de la France qui contredise celle du polémiste, des alternatives à un programme qu’il esquisse de plus en plus précisément sur l’immigration, les frontières, l’indépendance de la France, le pouvoir d’achat, comme l’a fait courageusement Jean-Luc Mélenchon. Et comme le fait la droite LR. Non, le camp de Macron relayé par les médias de gauche préfère rebondir sur une plaisanterie pour faire ce qu’il fait de mieux : administrer des leçons de morale enfantine et faire peur sur la base d’un lien acrobatique entre plaisanterie dans un salon militaire et opinion du polémiste sur les médias. La gauche tape bas, très bas. Pas sûr que cette offensive ne provoque pas une nausée chez certains électeurs qui attendent mieux. La minuscule affaire Milipol illustre l’effondrement idéologique de la gauche face au retour en fanfare de la droite patriote.
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