En tant que blogueur à succès qui se la pète, je me suis posé la question de savoir si j'allais faire un billet sur Johnny. Et pourtant, c'était évident, il était à écrire.
Il y a une différence fondamentale entre Jean d'Ormesson et Johnny Halliday, les deux pertes nationales du moment.
Si tout le monde n'a pas lu du Jean d'O, si certains pouvaient ignorer qui était cet homme, nul en France ne pouvait, ne peut et ne pourra ignorer qui était Johnny qu'on l'ait apprécié, aimé ou détesté. Là est le mystère Johnny.
Il n'y avait que lui pour éclipser ce matin la disparition de Jean d'Ormesson.
Je n'ai jamais acheté le moindre disque de Johnny et je ne suis jamais allé à un de ses concerts, je le regrette aujourd'hui.
Je n'ai jamais été ce que l'on appelle un fan; comment expliquer dès lors que je connaisse quasiment par cœur au moins une bonne trentaine de ses chansons.
Le mec faisait partie de nos vies, tout simplement, depuis soixante ans.
L'idole des jeunes, Jésus-Christ était un Hippie, le pénitencier (qui fermait chaque nuit la boîte de nuit éponyme que je fréquentais dans les années 90), Quelque chose en nous de Tennessee, Gabrielle, Noir c'est noir, Que je t'aime, Je te promets, Ma gueule, Laura, Marie, La musique que j'aime, Mirador, Allumer le feu, Je t'attends...
Autant de chansons que l'on a tous entendu.
Partout où je suis allé, en France ou de par le monde, j'ai entendu du Johnny.
Oui, Johnny était un monument de la chanson française et j'ai un peu de peine aujourd'hui de savoir qu'il n'est plus là.
Johnny, c'était une voix, une présence, un charisme évident, une bête de scène.
Je me souviens que mes parents n'aimaient pas que l'on écoutât du Johnny, comme ils n'aimaient pas que l'on se régale avec du Gainsbourg ou avec tous ces chanteurs et chanteuses qui représentaient pour eux une certaine forme de dépravation, une sorte de menace sur l'ordre des choses qui avait fait leur quotidien; pour nous la liberté, la jeunesse débridée, la révolution des mœurs,...
Et voilà que pourtant, l'Ancien me dire ce matin que le départ de Johnny ne le laisse pas indifférent.
Johnny (et quelques autres), c'était notre Drug, Sex and Rock'n Roll à nous lorsque nous étions jeunes.
Puis peu à peu, il s'est installé dans nos vies au gré des tubes qu'il sortait et que nous chantonnerions tous à un moment ou à un autre.
Johnny, c'était Sylvie Vartan, Nathalie Baye, Eddy Mitchell, Dutronc, Dick Rivers,... autant de noms que l'on ne peut dissocier de celui de Johnny.
Johnny, c'était le seul chanteur de rock dont certains hommes politiques osaient dire qu'ils en étaient fans, allant même jusqu'à aller assister à ses concerts.
L'actuel président de la République n'aura pas attendu 8h30 ce matin pour nous dire qu'il assisterait à ses obsèques, il ne l'avait pas fait pour Jean d'Ormesson ou Simone Veil.
Ses obsèques donneront sans doute lieu à des scènes de délires et d'hystérie que seules celles d'Edith Piaf, Mike Brant ou Claude François ont pu égaler.
La déferlante médiatique s'est mise en branle dès tôt ce matin, déferlante qui m'insupportait pour d'autres et que pourtant je comprends aujourd'hui.
Les hommages pleuvent sur les réseaux sociaux (#JohnnyHalliday en TT monde ce matin !), certains sont émouvants, d'autres nous donnent confirmation de la bêtise incommensurable de certains (Omar Sy, Benoit Hamon, Alexis Corbières...).
Johnny, c'est plus de 90 couvertures de Paris Match, plus que Chirac, Sarko, Hollande et Macron réunis.
Alors j'en lis certains qui pinaillent, qui critiquent l'homme, qui le trouvaient mauvais, qui ne lui reconnaissaient comme seul talent que celui de s'être bien entouré, qui disent qu'il chantait mal, qu'il n'était pas bien fin, un brin taré, j'ai lu tout cela, oui, facile, mais qui peut se vanter d'avoir aussi bien réussi pendant autant d'années ?
Qui peut prétendre à de tels hommages nationaux et internationaux ? Personne.
Quel était le seul rockeur pouvant, selon Mick Jagger himself, rivaliser avec les Rolling Stones ? Johnny.
Cet après-midi, j'ai fait la sieste en écoutant du Johnny passé en boucle sur CStar, c'était bien.
Une star, une vraie pour le coup, nous a quitté, une star dont l'un des talents, et non des moindres, fut de n'avoir laissé personne indifférent pendant soixante ans.
Qui aujourd'hui ou demain pour prendre sa place tout en haut de l'affiche ? Personne.
Je n'ai pas grand chose d'autre à dire.
Si ce n'est qu'à l'instar d'Elvis Presley, il a su simplement, et naïvement !, transcender sa propre personne et donner quelque chose de plus que la distraction que procurent la plupart des chanteurs à leurs publics.
Faire resurgir quelque chose de profondément ancré en nous, de surhumain et de totalement viscéral que je peine à nommer (G. Cloutier).
Le dessin de Plantu ci dessous n'est pas terrible en soi mais il dit bien qui était aussi Johnny: un morceau de France, un personnage historique.
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