Le Belem est donc arrivé dans le Vieux-Port de Marseille.
Florent Manaudou, célèbre nageur formé à Marseille et titulaire de quatre médailles d’or, était là pour accueillir la flamme, ainsi qu’un athlète paralympique - jusque-là, très bien. Mais la vraie surprise, ce fut l’arrivée du rappeur Julien Mari, dit Jul, meilleur vendeur de disques de France, multimillionnaire sans diplôme venu des quartiers nord de la cité phocéenne, mélodiste qui écrit ses instrus en un quart d’heure, auteur qui fait des fautes d’orthographe à tous les mots, chanteur qui corrige sa voix à l’Auto-Tune™ : une belle success story à la française, comme les jeunes en rêvent.
Jul est donc arrivé sur le tapis rouge, la flamme dans une main, l’autre main faisant le signe qui l’a rendu célèbre, avec sa casquette à l’envers, son survêtement immaculé et cette démarche de canard sous morphine qui signe, à deux cents mètres, l’origine sociale de nos nouvelles élites. La foule - 150.000 personnes selon la police, pour une fois d’accord avec les organisateurs - a applaudi à tout rompre. Et le chaudron - en réalité, un disque, métaphoriquement creux et plat - s’est enflammé sous les vivats, tandis que des fumigènes tricolores étaient tirés sur le Vieux-Port. Et voilà, c’était fait. Le monde entier nous regarde et nous lui offrons un rappeur hilare en guise d’apéro avant l’interprétation de Piaf par Nakamura.
Certains auraient préféré Zidane, paraît-il, mais Zidane, on s’en souvient, a quitté la carrière sportive après avoir mis un coup de boule à Materazzi. Pas top, pour les jeunes... On aurait pu tout simplement demander à Florent Manaudou, Marseillais et déjà sur place, de s’en charger. Trop simple, peut-être.
La Grèce peut avoir honte de Massalia
Jul s’est rendu célèbre en 2014 avec Sort le cross volé (sic, puisque « sort » devrait s’écrire « sors », c’est un impératif singulier, après tout). N’en retenons que le refrain (vous irez voir les couplets sur Internet si vous voulez) : « Sort le cross volé/Cabre même si la roue est voilée/Pétard en billet violet/Te déshabille pas j'vais t'violer. » Est-ce que c’est vraiment ce que nous voulions, en guise de culture française ? La décadence est toujours affreuse à voir : l’entrée d’Héliogabale dans Rome ne devait pas ressembler à autre chose, aux yeux des défenseurs de l’austère mos majorum. Une internaute sagace compare cruellement la très belle cérémonie grecque, inspirée de l’Antiquité, qui a eu lieu à Olympie pour l’allumage de la flamme, et cette pochade grotesque qui, une fois de plus, fait passer le pays de l’élégance et de la culture pour une poubelle.
Le J c'est le S. La flamme est arrivée.
— Gabriel Attal (@GabrielAttal) May 8, 2024
Que la fête commence ! pic.twitter.com/kmruSoTAMM
À ce sujet — [EDITO] Allumage de la flamme olympique : la Grèce a rappelé à la France qu’elle l’avait civilisée
Retenons bien une chose : ils ne s’arrêteront pas tant qu’ils n’auront pas tout dégradé, tout sali, tout rabaissé, tout diminué, tout pourri. Dans leur monde, dans leur « république » qui n’a plus rien à voir avec la France, il faut que les choix correspondent à ce qu’écoutent les Français, comme dit l’inénarrable Aurore Bergé. À preuve de cette déconnexion qui se veut démagogique, Gabriel Attal qui tweete « Le J c’est le S » - pour « Jul, c’est le sang », c’est-à-dire la famille. On en est là, un Premier ministre, ancien ministre de l'Éducation nationale, qui fait semblant de parler comme un « jeune ». Normal, quand la tribune officielle chantait « Nique ta mère sur la Canebière, nique tes morts sur le Vieux-Port ».
Ils ne s’arrêteront pas, c’est-à-dire que nous sommes loin d’avoir tout vu. Quelle terrible pitié au royaume de France, une fois de plus…
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