Voilà un communiqué qui devrait faire du bruit.
Amnesty International a enquêté sur les frappes russes effectuées depuis avril sur les fronts du sud (Mykolaïv) et de l’est, dans l’ensemble du Donbass.
Et le constat, publié le 4 août, n’est pas tendre : « Le fait de se trouver dans une position de défense ne dispense pas l’armée ukrainienne de respecter le droit international humanitaire », a ainsi déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty.
La rapport précise que des civils ont été mis en danger par l’installation de bases militaires dans des hôpitaux ou des écoles et par l’organisation de contre-attaques depuis des zones où les civils vivent nombreux.
L’organisation précise notamment que des bases ont été installées dans des bâtiments civils dans 19 villes et villages du front concerné, et que des frappes avaient été lancées depuis ces zones résidentielles.
C’est une situation d’autant plus inacceptable que la plupart de ces installations étaient situées à des kilomètres du front, précise l’ONG.
D’autres options, qui ne mettraient pas en danger la vie des civils, étaient donc possibles, ajoute-t-elle. Amnesty précise, en outre, qu’aucune consigne d’évacuation des civils n’avait été donnée. Ses demandes d’explication auprès du ministère de la Défense ukrainien sont restées sans réponse.
L’Ukraine a évidemment réagi et le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, cité par Le Point (4/8/2022), s’est déclaré indigné par ce constat « injuste » et, en bon dialecticien, inverse l’accusation et affirme que l’ONG participe « à une campagne de désinformation et de propagande » au service du Kremlin.
Amnesty International agent de Poutine, il fallait y songer, mais dans cette guerre de l’information à laquelle nous assistons depuis le 24 février, plus rien ne nous étonne.
Jusqu’à présent, les voix qui détonnaient sur la guerre en Ukraine étaient systématiquement marginalisées et rarement invitées sur les grands médias, à de rares exceptions comme Sud Radio et « Bercoff dans tous ses états ».
Les débats sur les plateaux des chaînes d’information ont un côté fascinant depuis cinq mois : une sorte de surenchère irréelle entre généraux, journalistes, essayistes, anciens agents du KGB et spécialistes militaires autoproclamés nous expliquant gravement que Poutine était fou et isolé, que, bien sûr, la Russie perdrait une guerre qu’elle avait déclenchée sans aucune raison comme il se doit.Ce communiqué sur la stratégie ukrainienne mettant en danger ses propres civils n’est pourtant pas une surprise. Il suffit de suivre quelque peu les opérations militaires pour constater qu’en effet les Russes doivent attaquer les villes et villages où se sont retranchés les soldats ukrainiens, et tant pis pour les civils.
Le communiqué d’Amnesty peut-il légèrement changer la doxa en vigueur ?
Il est permis d’en douter. Certes, la désinformation des guerres passées en Irak ou en Libye a été battue en brèche et la vérité a fini par se faire jour. Mais, des années après, tout reste à faire au Kosovo ou en Syrie, où la pensée unique continue à triompher. Ce sera sûrement le cas pour cette guerre qui est géopolitiquement si importante et qui nécessiterait de vrais débats et non des slogans infantiles.
Lire le rapport d'Amnesty ICI
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