Chloé (au centre), 19 ans, a été étonnante de courage au moment de faire face à son bourreau et de revenir sur le calvaire qu'elle a vécu durant toute sa séquestration. Photo Arnold Jerocki
La jeune victime a livré le récit de sa séquestration et demandé des excuses à son violeur
Kamel Bousselat venait de terminer le récit de son horrifiant périple criminel quand Chloé a demandé à s'adresser à lui.
La présidente de la cour d'assises du Gard a "exceptionnellement" accepté le principe, et la salle a retenu son souffle.
La frêle silhouette de Chloé s'est avancée à la barre pour parler à celui qui l'a enlevé devant chez ses parents à Barjac, près de Bagnols-sur-Cèze, dans le Gard, le 9 novembre 2012, puis l'a violé à de multiples reprises jusqu'à son arrestation une semaine plus tard, en Allemagne.
Il est jugé depuis lundi, à Nîmes.
"Je voudrais qu'il me regarde, a lancé l'adolescente d'une voix fluette, claire et ferme. J'attends ses excuses, que je n'ai jamais reçues. S'il veut bien les présenter."
Ses yeux se plantent alors dans ceux de son bourreau, lequel enclenche un dialogue surréaliste qui serre la gorge de ceux y assistent.
"Même si pour vous ça n'aura pas beaucoup de valeur, je tiens à vous présenter mes excuses, bredouille Kamel Bousselat. Même si je sais que vous ne les accepterez pas, je vous les dois."
Chloé, du tac au tac : "Je ne les accepterai pas mais j'ai de la peine pour toi."
"Trop dangereux"
"Le plus dur, c'était la distance avec mes parents, savoir qu'ils ne savaient pas où j'étais" a-t-elle confié, rappelant ce moment "terrible" où, dans la voiture de son ravisseur, elle a entendu "la voix de ma mère à la radio, son désespoir".
Entre deux viols dans des "endroits discrets", elle restait trois, cinq, huit heures dans le coffre de l'Audi de Kamel Bousselat.
"C'était d'autant plus compliqué que j'étais claustrophobe et qu'il y avait deux bidons d'essence qui prenaient beaucoup de place" précise-t-elle sans en rajouter, sans s'apitoyer, sans trembler.
Se laver ?
Impossible.
Manger ?
Un sandwich, de temps en temps.
Dormir ?
"La plupart du temps, je faisais semblant parce que j'avais peur des abus sexuels".
Sa survie, elle la doit peut-être à ces dialogues qu'elle s'est évertuée à nouer avec son agresseur.
"J'ai beaucoup parlé de moi, de mes amis, de ma famille. Il avait parfois des gestes prévenants. Quand je pleurais il me prenait dans ses bras, mais ça finissait toujours par un viol."
Sa survie, elle la doit aussi selon sa psychologue à son déni, "ce mécanisme de défense qui lui a permis de se dire : "je vais faire comme si j'allais me promener avec un ami". Elle ne pouvait pas avoir accès à ses émotions, c'était trop dangereux".
Mais quatre ans après les faits, le traumatisme poursuit inexorablement Chloé.
Elle dort mal, mange peu, prend plusieurs douches par jour parce qu'elle se sent "sale".
"Je ne souhaite à aucun parent et à aucune jeune fille de vivre ce qu'on a vécu" a témoigné sa mère. L'espace d'un instant, un sourire a interrompu son flot de larmes: "Quand ils ont retrouvé Chloé, c'était le plus beau moment de ma vie. Et quand je l'ai revu, c'est comme si je l'avais mis au monde une deuxième fois".
Verdict dans les heures qui viennent
L'accusé partait "avec un seul but : abuser d'elle"
Face à la Cour, l'accusé a raconté les faits comme un gamin timide et honteux avouerait laborieusement une bêtise.
"Je rôdais en voiture autour de Barjac pour commettre des vols, a-t-il commencé, les bras ballants et un mouchoir dans la main droite. J'ai croisé un scooter. Quand j'ai vu que c'était une fille, je me suis dit "il me la faut". Je l'ai suivie jusqu'à chez elle. Là, je l'ai attrapée. Elle a crié alors je lui ai dit "tais-toi. Suis-moi sinon je vais te tuer". Je l'ai ligotée . Dans ma tête, je partais avec un seul but : abuser d'elle."
Hier, le ravisseur de Chloé n'a pas tenté de susciter la pitié ou de minimiser sa responsabilité.
La perpétuité requise
L'avocat général a requis hier la réclusion criminelle à perpétuité avec 22 ans de sûreté contre Kamel Bousselat, "ce prédateur sexuel très bien organisé" qui a vu Chloé comme "un jouet avec lequel il voulait s'amuser jusqu'à ce qu'il casse."
Ce matin, comme le veut la procédure, le dernier mot reviendra à l'accusé avant que les jurés ne se retirent pour délibérer.
Le verdict devrait tomber dans la journée.
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