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mercredi 19 mars 2025

19 mars, cessez-le-feu en Algérie : nos lecteurs refusent d’être oubliés

guerre d'Algérie 19 mars 
 
©Chabe01, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons 

 

Face à une repentance incompréhensible, nos lecteurs veulent "une politique purement réaliste et comptable" avec Alger. 

« L’Histoire les a oubliés, les politiques les ont sacrifiés, l’opinion publique les a abandonnés. » Ainsi commence le prologue de Raphaël Delpard dans son livre Les Souffrances secrètes des Français d’Algérie. Histoire d’un scandale (Michel Lafon). Aujourd’hui, le cessez-le-feu en Algérie a 63 ans, et depuis la loi du 6 décembre 2012, le 19 mars est « la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ». Une date anniversaire qui, loin d’apaiser ceux qui ont vécu le déracinement, loin de rendre hommage aux morts et disparus civils et militaires qui avaient choisi la France, « marque […] l’amorce d’un drame pour les rapatriés, contraints au déracinement, et le début d’une tragédie pour les harkis, massacrés dans les semaines qui suivirent, au mépris des accords d’Évian », selon l’ex-secrétaire d’État aux Anciens Combattants Marc Laffineur. Les relations franco-algériennes étant loin d’être apaisées, la repentance perpétuelle de nos représentants ne semblant pas être payée de retour. Peut-être s’agirait-il de changer de méthode ?

Utiliser la repentance du gouvernement français est une stratégie payante pour Tebboune, que ce soit pour légitimer son gouvernement ou pour faire plier la France.


Une repentance incompréhensible

Selon Malika, une de nos lectrice d’origine algérienne, « cette repentance est incompréhensible, à moins de justifier ce comportement par un biais religieux catholique, ce qui prouverait que la France n’est pas réellement laïque et qu’il existe une mémoire inconsciente avec une notion de péché et qu’il faudrait payer les fautes commises. S’il y avait une lecture purement politique, monétaire et factuelle, la France et les Français cesseraient de se flageller et adopteraient une politique purement réaliste et comptable, un bilan actif et passif, et basta ! »

En 2017, alors candidat à la présidentielle, Emmanuel Macron avait qualifié de « crime contre l’humanité » la guerre d’Algérie. L’historien Guy Pervillé, dans un entretien au Figaro Vox, se demandait si cette déclaration de repentance n’était pas une « manœuvre politicienne visant à capter le soutien de l'Algérie et le vote des électeurs franco-algériens ». Il craignait que cela n'encourage « les dirigeants algériens à relancer la revendication de repentance qu'ils avaient abandonnée » et redoutait un recommencement de la guerre d'Algérie « sur le plan politique et juridique ». N'est-ce pas à cela qu'on assiste, aujourd'hui, de façon larvée ?


Des Français moins bien traités que des migrants

La repentance transforme le « Qu’ils aillent se réadapter ailleurs » de Gaston Defferre en « Qu’ils se fassent oublier ». Un de nos lecteurs, Gaby, pied-noir, âgé de six ans lors de l’indépendance, se souvient : « J’ai eu beaucoup de mal à faire comprendre à certains qu'on était de vrais Français qui avaient largement contribué à la construction militaire de la France. » Si Gaby n’attend plus rien du gouvernement, il remarque que « les politiciens aujourd'hui ont bien plus d'égards à l'accueil de migrants qu'ils en ont eu envers [eux] qui ét[aient] français ».

« Le nombre des "Européens" enlevés après le 19 mars 1962 est sujet à controverse, peut-on lire dans L’Histoire : 3.000, selon le gouvernement français, jusqu'à 9.000 pour d'autres. Quant aux harkis tués, les estimations varient de 30.000 à 150.000. Au demeurant, le chiffre le plus débattu reste celui des musulmans tués pendant la guerre. » Le cessez-le-feu n’en avait que le nom.


Que justice et lumière soient faites

Pourtant, nombreux sont ceux qui se battent encore avec acharnement pour que justice et lumière soient faites. Jean-Félix Vallat, par exemple, dont les parents ont été assassinés quand il avait 8 ans par un commando du FLN, est le président de la MAFA (association qui œuvre à la défense de toutes les injustices subies par les rapatriés et non réparées). Il explique que « le FLN a utilisé le terrorisme pour bâtir des murs de sang » en égorgeant son père, maire de Thierville, et en tirant à bout portant sur sa mère, institutrice qui « se battait pour que les petites filles arabes aillent à l’école ». Si l’on croit qu’« un peuple qui ignore son passé est condamné à le revivre », sans doute serait-il judicieux de cesser cette repentance unilatérale et d’adopter « une politique purement réaliste et comptable, un bilan actif et passif, et basta » !

Lorsque Macron veut « engager un dialogue exigeant et respectueux » avec le gouvernement algérien, peut-être faudrait-il lui rappeler que pour dialoguer comme pour cesser le feu, il faut être deux.

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