Les combats se poursuivent au Haut-Karabakh et l’armée azerbaïdjanaise poursuit sa progression, malgré une farouche résistance arménienne.
Sa supériorité en hommes et en matériel lui a permis de pénétrer dans le territoire proprement dit du Haut-Karabakh et de menacer la ville clé de Chouchi (appelée aussi Shushi).
Au début de l’offensive, déclenchée par le sud, le 27 septembre dernier, la progression des agresseurs n’était pas encore trop inquiétante. Elle se déroulait en plaine et dans les territoires annexés par l’Arménie après la fin de la guerre en 1994. Le Haut-Karabakh, stricto sensu, ne semblait pas menacé et l’on se demandait même si c’était vraiment un objectif de l’Azerbaïdjan de le reconquérir alors que cette enclave est presque exclusivement peuplée d’Arméniens.
Mais, galvanisé par le très actif soutien turc, le président Aliev semble maintenant décidé à aller jusqu’au bout. Une double offensive se déploie donc depuis plusieurs jours : tout d’abord vers le corridor de Lachine afin de couper l’enclave de son voisin l’Arménie. La route stratégique n’a pas encore été reprise mais les Azerbaïdjanais sont tout près et elle n’est, en tout cas, plus praticable. Le ravitaillement sera donc plus difficile et s’il reste une autre route au nord, celle-ci est extrêmement dangereuse. Quant aux blessés, ils ne pourront plus être évacués vers Erevan, la capitale de l’Arménie, mais à Stepanakert, capitale du Haut-Karabakh.
La seconde offensive est plus importante encore : elle vise la ville historique de Chouchi. Située sur les hauteurs, sa chute mettrait la capitale Stepanakert sous le feu de l’artillerie azérie et des redoutables drones généreusement fournis par la Turquie. L’envoyé spécial du Monde décrit des combats violents sur les pentes qui mènent à Chouchi, d’où les fantassins azerbaïdjanais ont pour l’instant été repoussés. Mais pour combien de temps ?
L’écart en matériel est trop important pour être comblé en quelques semaines. Israéliens et Turcs fournissent des armes sophistiquées à l’Azerbaïdjan depuis plusieurs années, tandis que l’Arménie a des armes russes plus anciennes. « Une guerre de retard », commentaient des officiers arméniens inquiets. L’écart en effectifs est essentiel, lui aussi : si tous les hommes du Haut-Karabakh (et de tous âges) sont au front, l’armée arménienne est restée en Arménie, le pays ne pouvant pas déclencher une guerre ouverte avec l’Azerbaïdjan. Il y a 10 millions d’habitants en Azerbaïdjan, tandis que 150.000 Arméniens peuplent le Haut-Karabakh, et si de nombreux volontaires arméniens sont venus prêter main-forte à leurs frères (certains sont même venus de France), cela ne peut évidemment rétablir l’équilibre.
Dans ce contexte, l’attentisme russe laisse perplexe. Certes, un camp de volontaires islamistes syriens en partance pour l’Azerbaïdjan a été anéanti par l’aviation russe dans la province d’Idleb, mais c’est tout (la source syrienne s’est d’ailleurs tarie, ensuite). Poutine et Lavrov (le ministre des Affaires étrangères) privilégient la voie diplomatique, mais les trois cessez-le-feu annoncés depuis un mois sont restés lettre morte.
On comprend bien que Moscou ne veuille pas couper les ponts avec Bakou, ce qui jetterait définitivement l’Azerbaïdjan dans les bras d’Ankara. Peut-être, aussi, que la Russie fait payer aux Arméniens leur intransigeance, puisque depuis 1994, ils refusent de rendre les territoires azéris conquis autour du Haut-Karabakh.
Quoi qu’il en soit, le temps presse et Erdoğan se frotte les mains.
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