Jeudi dernier, Erdoğan est allé à Moscou s’agenouiller devant Poutine, comme d’autres se rendirent jadis à Canossa.
Une dépêche de l’agence chinoise Xinhua révélait que « commentant des informations selon lesquelles Vladimir Poutine, Recep Tayyip Erdoğan, Angela Merkel et le Président français Emmanuel Macron [auraient pu] se rencontrer vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a répondu que le président russe avait d’autres projets ce jour-là ».
En termes moins diplomatiques, Poutine aurait refusé tout net qu’Erdoğan soit accompagné de Macron et Merkel.
Information confirmée dimanche, sur France 24, par la journaliste de Libé Hala Kodmani.
À quoi pourraient donc servir ces deux-là ?
Quelle part ont-ils pris au conflit ?
Quelle influence leur reste-t-il dans la région ?
La mine penaude, lâché de toutes parts, Erdoğan dut accepter sans sourciller les conditions de son vainqueur, baissant les yeux comme l’enfant terrible en passe de recevoir la fessée de son maître.
Mais, comme toujours, les dictateurs défaits trouvent toujours des plus faibles sur qui se rabattre pour pouvoir, à nouveau, rouler des mécaniques.
Alors, Erdoğan s’en est pris à l’Union européenne, et au plus fragile de ses membres, la Grèce, par ailleurs ennemi héréditaire de son pays.
L’envoi de milliers de migrants a provoqué un séisme à Athènes et les choses sont en train de tourner à la guerre entre populations locales et réfugiés.
Les forces armées turques sont intervenues, tirant avec des balles en caoutchouc sur les pompiers grecs venus repousser les assauts des migrants.
Là, Erdoğan peut à nouveau plastronner et faire oublier sa déconvenue d’Idleb : ce n’est pas la pauvre Grèce et encore moins l’Union européenne qui risquent de lui infliger un nouveau camouflet.
Car la Grèce essaie, avec ses moyens, de repousser l’invasion, sans aucun soutien de l’Union européenne.
Madame von der Leyen a beau s’inquiéter de cette nouvelle vague, qui doit lui faire revivre le fantôme de 2015, quand son pays reçut en quelques semaines plus d’un million et demi de réfugiés, elle ne propose rien de concret pour stopper la nouvelle brèche béante ouverte dans la frontière de Schengen.
Et Merkel et Macron sont aux abonnés absents.
La pauvre Grèce est donc seule au front, dans la panade, face à une Turquie décidée à se venger sur elle de sa déconvenue face aux Russes.
Mieux encore : oubliant la terrible leçon de 2015, l’Union européenne n’a rien trouvé de mieux que de ressortir des tiroirs les quotas de réfugiés à se répartir entre pays membres.
Et une aide de 700 millions d’euros pour soulager la Grèce, c’est-à-dire, en fait, pour la convaincre d’accepter les arrivants.
La capitulation de l’Union européenne est doublement grave : elle recrée de facto un nouvel appel d’air pour les migrations ; en plus, elle sonne comme un aveu de défaite face à Ankara, car si, en 2015, les migrants avaient été accueillis volontairement par l’Allemagne, aujourd’hui, ils nous sont imposés par Erdoğan.
Le tyran d’Ankara peut dormir tranquille : si Poutine lui inflige défaite sur défaite, il peut toujours se refaire une santé sur Bruxelles, Berlin et Paris.
Et passer auprès de sa population pour un vainqueur, quand il ne fait que recueillir des lauriers sur l’impotence européenne.
Olivier Piacentini
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