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vendredi 9 novembre 2018

Élève braqueur à Créteil : pour sa famille, c’est lui la victime !

 
 
 
 
Si vous ne l’avez pas encore regardé, je vous invite à visionner le témoignage glaçant d’une professeur de REP publié le 24 octobre sur ce site.

Il dit tout de l’impossibilité de faire cours à laquelle sont aujourd’hui acculés les enseignants, coincés qu’ils sont entre une hiérarchie tétanisée, des élèves ensauvagés et des parents qui ne le sont pas moins.
Depuis quinze jours, leur parole s’est « libérée », comme on dit chez les sociologues.
Il a fallu, pour cela, la mise en ligne du braquage d’un professeur en plein cours, suscitant une vague d’indignation jusqu’au sommet de l’État qui, promis juré, va nous présenter dans les semaines qui viennent « LE » plan violence qui sortira enfin l’école de la tranchée où elle tente d’échapper à l’ennemi.
J’emploie à dessein la rhétorique de la Grande Guerre.
Parce qu’on en est là, avec des profs désarmés, lâchés par une hiérarchie de poltrons planqués au chaud dans leurs bureaux des rectorats (cf. #PasDeVague) et confrontés à la haine et l’agressivité croissantes des élèves et de leurs parents.
Les faits, donc : au lycée Édouard-Branly de Créteil (Val-de-Marne), un élève de seconde braque son enseignante pour exiger qu’elle l’inscrive « présent » et non « absent » sur le registre.
La scène est filmée, mise en ligne… Déclenche ce qu’on vient d’évoquer.
Si l’on en croit les témoignages, ce n’est pas une première, mais… pas de vagues !
L’important n’est pas ce qui se passe, c’est le bruit que ça fait.
Et le bruit, à l’Éducation nationale, on s’emploie à l’étouffer.
Bien vite, tout le monde s’est empressé de préciser qu’il s’agissait d’une arme factice.
Un pistolet à billes, nous dit-on.
Je connais, moi, quelqu’un dont le fils est mort en chahutant avec un pistolet à billes, jouant à la roulette russe.
Sur la tempe, ça ne pardonne pas.
Et puis, quand on vous braque, vous ne savez pas si c’est du lard ou du cochon (vu le contexte, assurément ni l’un ni l’autre).
Le jeune braqueur s’est présenté à la police, a été déféré devant un juge pour enfants et mis en examen pour « violences aggravées ».
Le vidéaste amateur a également été arrêté et mis en examen, mais pas celui qui a introduit le faux revolver dans le lycée, « aucun fait ne pouvant légalement lui être reproché », a dit le parquet.
Ah bon, malgré les plans Vigipirate et autres tracasseries pour le citoyen honnête, introduire une arme dans un lycée n’est pas illégal ?
Il va falloir qu’on nous explique.
Les ministres Blanquer (Éducation) et Castaner (Intérieur) se sont fendus d’un communiqué commun annonçant la réunion d’un « comité stratégique » afin « d’arrêter un plan d’action ambitieux, visant à mettre un terme à de tels comportements ».
Comme si cela allait remédier à des décennies d’impéritie et de lâcheté.
Mais il faut bien essayer, même si l’on n’y croit plus.
On n’y croit plus parce que le mal est profond, et que si les élèves sont pour certains d’ingérables sauvages, c’est parce que leurs parents le sont tout autant.
Parce que les agressions et les menaces viennent plus encore de l’extérieur que de l’intérieur de ces lycées et collèges des territoires perdus de la République où, comme le rapporte l’enseignante sur Boulevard Voltaire, on « exfiltre » les enseignants par des portes dérobées !
Voilà pourquoi la famille du jeune mis en examen, après qu’il eut braqué sa prof, hausse aujourd’hui le ton.

Cette affaire est « surmédiatisée », s’est plainte la mère sur RMC, dénonçant un événement « monté en épingle ».
Cette affaire, dit-elle, n’aurait pas eu lieu sans la diffusion de la vidéo et estime que son fils en a « déjà assez subi » les conséquences.
Le pire est qu’elle a sans doute raison : sans la mise en ligne, cela n’aurait été qu’un « incident » de plus dans le quotidien cauchemardesque d’une prof de banlieue.

La hiérarchie l’aurait dissuadée de faire remonter l’incident, puis elle aurait pris un congé maladie…

Surtout, pas de vagues !

Marie Delarue

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