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samedi 5 décembre 2015

Roncq : enchaînée pendant trois semaines car «déshonorée»


Par la rédaction pour La Voix du Nord, Publié le 04/12/2015

PAR LAKHDAR BELAÏD


Le père écope de deux ans de prison, dont 18 mois avec sursis et incarcération immédiate. PHOTO ARCHIVES «
LA VOIX
».


La police a mis fin, lundi, au calvaire d’une jeune femme de 22 ans. Depuis trois semaines, elle vivait enchaînée dans un caravane à Roncq.
Son tort : avoir perdu sa virginité.
L’étape suivante : le passage devant un « tribunal des gitan

 Il a 41 ans, le regard hagard et n’a jamais eu affaire à la justice auparavant.
Les magistrats, eux, veulent tout simplement comprendre.
« J’ai perdu un peu de respect, marmonne ce père de famille. J’ai eu honte. »
En face, la procureure Clémentine Chatein ne décolère pas.
« Il lui a coupé les cheveux », rappelle la représentante du parquet.
La victime, elle, répète les mêmes mots : « Chez nous, on n’a pas le droit d’appeler la police, soupire M.C’est le tribunal des gitans qui décide. »
La jeune femme ne parle pas le français, mais l’une des langues les plus mystérieuse d’Europe, le gitani.
Son père n’est jamais allé à l’école.
L’affaire, elle, s’est déroulée à Roncq, sur un parking de centre commercial, au coeur de l’une des zones les plus urbanisées du monde.
En octobre, M. fugue avec un autre jeune homme de la communauté des gens du voyage.
Lui vit dans un camp en Belgique.
Sa famille ne trouve pas grâce aux yeux du père de sa conquête.
Au retour de celle-ci, le patriarche la fait escorter chez un médecin par des femmes du clan.
La virginité de M. n’existe plus.
La jeune femme est immédiatement séquestrée dans une caravane, une chaîne à la jambe.
Les membres de sa famille, notamment sa soeur, se relaient à ses côtés pour assurer sa toilette et sa subsistance.
Quelques gifles volent.
Jusqu’à quand ?
La convocation d’un « tribunal des gitans ».
« Et il devait faire quoi ? », interroge le président Bernard Lemaire.
« Réunir les deux familles, décider d’un possible mariage, acheter une caravane », sanglote presque le père.
En clair, réparer l’outrage.
« On est dans le droit coutumier, plaide son avocat Stéphane Bulteau, de sa voix bourrue. Il y a quelques générations, dans notre société, c’était pareil. »

En novembre 2015, appelée en désespoir de cause par la mère et la tante de M., c’est la police qui doit exfiltrer la séquestrée avant de battre rapidement en retraite avec la rescapée face à un camp de plus en plus en en effervescence.

Sanction : deux ans de prison, dont 18 mois avec sursis et incarcération immédiate.

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